Dans le milieu des télé-crochets français, il est rare de voir de véritables artistes émerger, et encore plus de les voir fonctionner auprès du grand public. La dernière saison de The Voice a réussi ce double-exploit. Tout d’abord, le gagnant Kendji GIRAC - et son insupportable Color Gitano- et donc les FRERO DELAVEGA. Ces deux mecs plutôt sympathiques, amis d’enfance et natifs d'Arcachon, échouent en quart de finale, mais ils ont la bonne idée de jouer avec le télé-crochet et d’avoir une stratégie marketing bien rodée. Cet album était déjà presque finalisé avant d’intégrer l’émission, puisqu’ils tournent dans les festivals depuis de nombreuses années et ne sont pas des débutants. Ils profitent de la grosse machine TF1 pour sortir ce premier album directement dans la foulée de leur élimination bénéficiant ainsi de l’attention toute fraiche du public. Résultat payant, l’album fonctionne plutôt bien au niveau des chiffres. Mais musicalement, ça donne quoi ?

Et bien, sans être exceptionnel, c’est plutôt pas mal. Jérémy FRERO et Flo DELAVEGA - d’où le nom du groupe, pourquoi faire compliqué ? - sont de vrais potes et cela se ressent clairement sur le disque. Leurs voix s’accordent parfaitement, il y a une réelle alchimie. Ce n’est pas un duo, mais deux voix qui se complètent à merveille. Malgré des défauts plutôt évidents, l’ensemble est cohérent, et bien que très monotone par moment, leur style folk est assez sympa et moderne, dans l’air du temps.

Le disque se partage en deux parties. Une moitié de titres originaux, et l’autre moitié composée de reprises, déjà interprétés pour la plupart dans The Voice. Un disque composé entièrement de nouvelles chansons aurait largement suffi, mais si c’est une façon de faire la transition après l’émission, bah pourquoi pas. Les reprises ne sont certes pas dégueulasses, mais n’apportent rien de spécial. Les deux derniers titres sont à part, car le morceau de David GUETTA est amené complètement ailleurs, c’est frais et enjoué, loin des arrangements ultra électro du titre d’origine. J’ai une préférence pour la reprise de « Caroline », très très sympa qui là aussi s’éloigne du rap romantique de MC SOLAAR pour quelque chose de très pop et estival. Dans les points négatifs, « Il y a » est particulièrement décevante, mais n'étant pas fan de la chanson de Vanessa PARADIS, ceci explique peut-être cela.

En ce qui concerne les titres originaux, il y a 11 chansons toutes fraiches. Dans l’ensemble, c’est plutôt pas mal, mais cela reste, hélas, beaucoup trop monotone. Les mélodies sont trop similaires, les textes parlent quasiment toujours de la même chose. On s’ennuie mortellement au milieu de toutes ces chansons romantiques. On y parle d’amour, d’amour et encore un peu d’amour. C’est très peu original, mais en même temps on ne s’attendait pas à les voir refaire le monde. Le duo délivre donc quelques morceaux très calmes comme le très beau « Chant des sirènes » qui bénéficie d'un texte plein de nostalgie, ou « Reviens » qui rappelle étonnement les premiers albums de DE PALMAS. Ils s’en sortent bien dans ces morceaux plein de mélancolie, jouant assez sur l’acoustique,. Mais ils sont sans doute meilleurs sur les morceaux plus rythmés. Le premier single « Sweet darling » est ultra commercial et pas follement intêressant, là où « Que toi », « Mon héroïne" et surtout « Mon petit pays » relèvent nettement le niveau. De vraies chansons d’été, super positives et entêtantes, on ne leur en demande guère plus.

Ce petit disque est donc plutôt sympathique : ça s’écoute facilement, c’est frais et jovial. Après, ce n’est pas de la grande musique, et comme une petite amourette d’été, ça s’étiole très vite. Reste que Jeremy et Flo ne sont pas sans talent et que certains titres sont à écouter, comme le petit bijou du disque « Le chant des sirènes ». Je reste curieux de suivre leur direction pour le deuxième album. C’est déjà beaucoup mieux que l’album du gagnant, Kendji, et ça au fond, c’est déjà une jolie victoire.