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ROCK ALTERNATIF/PUNK  |  STUDIO

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PIGALLE - Regards Affligés Sur La Morne Et Pitoyable Existence (...) (1990)
Par RED ONE le 18 Août 2015          Consultée 4134 fois

En cette fin de décennie 1980, François Hadji-Lazaro est sur tous les fronts. Après la sortie du premier album de PIGALLE en 1986, François donne la priorité aux GARÇONS BOUCHERS, qui connaissent alors un franc succès sur la scène alternative française et qui sortiront pas moins de trois albums entre 1987 et 1990. Il ne faut pas oublier non plus Los CARAYOS, qui continue de tourner et d'enregistrer plus ou moins régulièrement durant cette période. Parallèlement, Hadji-Lazaro fonde son célèbre label Boucherie Productions, qui produira notamment les premiers efforts discographiques de la MANO NEGRA. Dans ce contexte d'hyper-productivité, PIGALLE n'est alors plus qu'un simple projet parallèle pour François, qu'il gère presque intégralement en solo, quand son emploi du temps le lui permet. Le bassiste Daniel Hennion, désormais guitariste des GARÇONS BOUCHERS, passe à l'époque le relais à son camarade Riton Escudier. François Hadji-Lazaro envisage alors sérieusement d'arrêter PIGALLE. Dans ce but, il s'attelle donc à l'écriture d'un ultime album studio, prévu pour clore l'histoire en beauté.

François Hadji-Lazaro ne faisant jamais les choses à moitié, ce deuxième album de PIGALLE prend la forme d'un gros LP de 18 titres, à la pochette illustrée par Jacques Tardi et doté d'un titre à rallonge assez unique dans la discographie du rock français. Attention, retenez votre souffle :

"Regards affligés sur la morne et pitoyable existence de Benjamin Tremblay, personnage falot mais ô combien attachant."

Eh oui, ceci est bel et bien le titre INTÉGRAL de cet album ! Vous avez bien sûr remarqué que nous n'avons même pas pu le rentrer en entier dans notre base de données... Rassurez vous, même les fans du groupe n'arrivent pas tous à s'en souvenir de façon exacte.

Pris dans son ensemble, le disque se présente comme un concept-album, tournant vaguement autour de la vie d'un certain Benjamin Tremblay, Lorrain de naissance ayant émigré à Paris, un être en chute libre dont chaque chanson de l'album développe l'un des aspects de la pitoyable vie, de façon directe ou indirecte... Néanmoins, ce concept se révèle bien vite assez secondaire à l'écoute de l'opus, puisque les paroles des chansons ne présentent pas toujours de lien évident les unes avec les autres. Pourtant, l'ensemble forme un tout extrêmement cohérent. Au travers de ces 18 titres, PIGALLE nous évoque un Paris noir, sale et dépressif, des êtres humains réduits à l'état d'épaves, errant de bar en troquet, de bordel en lupanar, survivant laborieusement au sein d'un paysage urbain cauchemardesque et désespéré. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la pochette est signée Jacques Tardi, bien connu pour ses bandes dessinées torturées.
En dépit de cette profonde noirceur, PIGALLE s'attache à nous décrire un monde toujours très humain, où l'on croise de nombreux personnages. Beaucoup sont d'ailleurs féminins : "Marie la Rouquine", "Sophie de Nantes", "Angèle"... Hadji-Lazaro plonge ici la tête la première dans l'intimité malade de son personnage, et n'hésite pas à nous évoquer sa sexualité de façon crue, frôlant parfois la poésie pornographique ("Une nuit"). On suit Benjamin Tremblay au fil de ses pérégrinations urbaines ("Paris le soir", "Le chaland"), de ses aventures alcooliques ("Un petit paradis", "Dans la salle du bar-tabac de la rue des Martyrs"), voire de quelques unes de ses sinistres confessions ("Eternel salaud", "Les lettres de l'autoroute")... Le titre final, "Renaître", synthétise à lui seul l'ambiance glaciale et sombre de l'album, évoquant la solitude des grandes villes et le spleen de ses habitants. François Hadji-Lazaro ne peut enfin s'empêcher d'évoquer la scène alternative de l'époque dans une chanson hommage, "Chez Rascal et Ronan", où il déplore déjà la fin annoncée d'une période bénie pour le rock français. Nous sommes effectivement en 1990, de nombreux lieux alternatifs parisiens ferment et certains groupes commencent à signer chez des majors...

Comme son prédécesseur de 1986, l'album reste empreint d'un véritable feeling rock malgré la présence de plus en plus affirmée d'arrangements folk qui vont devenir la marque de fabrique du groupe. La collection d'instruments de François Hadji-Lazaro (violon, vielle à roue, accordéon...) continue d'être utilisée à bon escient, sans être envahissante. La boîte à rythmes, très en avant, donne un certain cachet à l'ensemble, et contribue à ancrer l'opus dans son époque. On retrouve donc encore des traces de cet electro punk minimaliste, aux sonorités très parisiennes, typiques de la scène française ("En bas, en haut", "Dans la prison", "Une nuit"). PIGALLE se permet enfin une reprise du fameux "Tourbillon", chanson rendue célèbre par Jeanne Moreau dans le film "Jules et Jim" de François Truffaut, qui est ici revisitée par des arrangements aux frontières du folk, de la new wave et de l'electro punk. C'est réellement superbe.

L'album est d'une unité à toute épreuve, qui force le respect. Une réelle épaisseur littéraire, dense et fouillée, émane de cet opus dont l'écriture raffinée tranche avec le joyeux bordel punk produit à la même époque par les GARÇONS BOUCHERS. Initialement conçu pour "clore" la carrière de PIGALLE, c'est pourtant suite à ce deuxième LP que le groupe parisien va commencer à connaître la gloire. Bénéficiant de l'aura médiatique des GARÇONS BOUCHERS, l'opus est un beau succès critique et commercial, et plusieurs clips vidéos sont réalisés pour l'accompagner. "Dans la salle du bar-tabac de la rue des Martyrs" devient rapidement le titre emblématique du groupe, en même temps qu'il contribue à remettre au goût du jour une autre idée de la chanson française, moins superficielle et plus réaliste. Le succès rencontré par l'album conduira évidemment PIGALLE à partir en tournée, et François Hadji-Lazaro ne tardera pas à s'atteler à l'écriture d'un troisième opus.

Véritable réussite artistique, Regards Affligés peut être considéré comme le chef d’œuvre de la carrière de François Hadji-Lazaro. Mais il s'agit aussi et surtout de l'un des albums les plus emblématiques de la scène alternative française des années 1980-1990, d'une œuvre majeure totalement représentative de son époque. Un véritable document historique, en somme.

Incontournable.

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   RED ONE

 
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- François Hadji-lazaro (chant, guitares, instruments divers, programmation)
- Riton Escudier (basse)
- +
- Alain Wampas (contrebasse)
- Steff Gotkovski (trombone)
- Gepeto Ben Glabro (trombone)
- Toto (trombone)


1. Écris Moi
2. Marie La Rouquine
3. Une Nuit
4. Le Tourbillon
5. Y'a L'aventure
6. Première Fois
7. Les Lettres De L'autoroute
8. Dans La Salle Du Bar-tabac De La Rue Des Martyrs
9. Sophie De Nantes
10. Éternel Salaud
11. Chez Rascal Et Ronan
12. Dans La Prison
13. Angèle
14. En Bas, En Haut
15. Le Chaland
16. Un Petit Paradis
17. Paris Le Soir
18. Renaître



             



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