Fidèle et infidèle à la fois, je déniche une nouvelle amoureuse en musique chaque mois, sans oublier les précédentes toutefois. Ah, si seulement elles ne faisaient pas d'aussi bons albums !... C'est au tour d'EMJI, belle Haute-Normande qui rayonne depuis son Evreux natal et son Paris d'adoption, suite à un passage à la Nouvelle Star dont elle est ressortie vainqueure.

Avec elle, on pense directement à Emilie SIMON, plus accessoirement aux petites soeurs qui ont réalisé un premier effort solide récemment comme Marina KAYE. Bien entourées, oui, mais elles sont fortes ces filles. Et belles, si belles... Certes, il s'agit d'un critère bien intime, mais comment snober ou parler avec détachement de ce qui fait une composante essentielle de leur univers ?

Les clips d'EMJI présentés sur YouTube sont formels ; "Lost" est partagé entre la froideur clinique de son ambiance et le charme de la chanteuse, beauté aussi flamboyante que sa chevelure et que son empreinte vocale... Que dire de "Dur Dur", nettement plus léger, et où l'auditeur masculin peut rêver un temps de se retrouver (ou pas, bonjour la frustration) à la place du monsieur sur la chaise...

Des "folies douces" joliment choisies pour un album fort bien fait, un de ces débuts qui permet à EMJI de se hisser, oui déjà, parmi les belles offrandes pop françaises de cette année 2016. En même temps, derrière elle, on rencontre Antoine Gaillet qui sort d'un travail également louable pour Joyce JONATHAN, et l'arrangeur Olivier Daviaud qui vient de prêter main forte à DIONYSOS... Autant d'éléments réunis pour un ensemble peaufiné, d'excellente facture.

La télé et le reste des médias ne cessent d'alimenter la peur, le dégoût ; on a fort heureusement des rayons de soleil comme EMJI. Soleils entiers même, elle le porte sur sa tête ! En écoutant "C'est Si Doux", n'avons-nous pas l'impression d'entendre Emilie SIMON telle qu'on l'avait laissée à l'époque de Végétal, il y a une dizaine d'années ? La poésie d'EMJI est moins fleurie que celle de sa consoeur montpelliéraine, mais tout autant surréaliste, plus directe et énergique, à l'image de ce bout de femme splendide et comme elle le révèle dans ses prestations live.

Certaines chansons sont particulièrement habitées par cette image, notamment "Pas à Pas", déjà présente sur l'EP Préliminaires, tout comme "Lost". Un titre très "affranchi" dans le ton du texte et de la musique, pop celtique saupoudrée de cornemuse et d'arpèges de harpe en cascade. Enivrant, pour ne pas dire mieux... De même, ce "Embrasse-Moi" furieux où Olivier Daviaud fait pleuvoir des notes de piano funk sur fond de musique flamenco symphonisante et où la belle nous enveloppe d'un voile-tourbillon de passion et de tourments...

Les cordes et les cuivres se mêlent à la voix d'EMJI (qu'elle dédouble à son gré en usant d'un looper) et à une rythmique forte dès le départ, avec le somptueux "Dame Love", chargé de sorcellerie. La demoiselle n'a qu'à pousser sa voix sur un saut d'octave, mélodiquement parlant, lançant quelques paroles magiques ("Elle t'enlèvera dans ses ailes / Dame Love / Elle t'emmènera jusqu'au ciel / Dame Love") et en y mettant tout son urgence sentimentale. On retrouve cette inspiration très colorée sur "Désaccordée", "L'oiseau vert", "Picasso" dont le texte est écrit par Elodie FREGE...

Folies Douces, un titre bien choisi pour caractériser l'équilibre voulu entre légèreté et noirceur, introspection et euphorie musicale. Un ensemble de quinze morceaux (dont trois interludes) qui se tient pleinement. Il y a bien le disque bonus qui reprend quelques-uns des meilleurs moments d'EMJI à la Nouvelle Star, et qu'on écoutera avec plus ou moins d'intérêt. La refonte des chansons ("Toxic", "Crazy in Love") est bienvenue, "Toboggan" reste un beau moment qui comporte la patte Malzieu, pour refaire un lien avec DIONYSOS... Il aurait été sympathique de soigner un réenregistrement du tube de KISS, "I Was Made for Lovin' You", présent lors de la finale de l'émission !