AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Amis lecteurs, il est temps d'évoquer une saga cinématographique culte mais incomprise, aussi bien par le public que par ses principaux acteurs (réalisateurs, comédiens, scénaristes... surtout les scénaristes) : Rambo. J'en vois qui rient au fond de la salle, et c'est exactement à eux que je pense. La série de films suivant les aventures de John Rambo est souvent présentée comme un truc bien débile, crétin jusqu'au bout des ongles et reaganien à mort. Et quand on voit Rambo 2 et 3, avec ce seul homme qui massacre du Vietnamien et du russkov derrière sa sulfateuse, oui, on peut alors dire que la chose devenue propriété d'un Sylvester Stallone superstar dans ces déjà lointaines années 80. Et puis, qui ne connaît pas la fameuse expression « Rambo et con à la fois ? ».

Mais avant tout ça, il y a le premier Rambo, connu aux États-Unis sous le nom de First Blood. Quand on ne connaît que le mythe de Rambo, force est de constater qu'on tombe de haut avec le film de 1982 (lui-même adapté d'un roman), qui présente avec moult émotions l'histoire d'un exclu, d'un vestige de la honteuse guerre du Vietnam, qui n'a de cesse de rappeler jusqu'où s'est effondrée l'US Army. Rambo évolue dans une Amérique se voulant amnésique autant que conquérante, qui ne comprend pas la douleur d'un homme utilisé comme chair à canon. Plus qu'un film de guerre, c'est un film d'action doublé d'une réflexion profonde sur l'homme. Si si, allez donc voir le film si vous ne me croyez pas.

Pour une telle oeuvre, niveau musique, le réalisateur Ted Kotcheff a plutôt fait classique. C'est en effet le géant Jerry Goldsmith qui a été retenu. La feuille de route était sans doute de composer une musique retranscrivant la bataille psychologique entre Rambo et les autorités de la ville de Hope (tiens tiens...), ainsi que la chasse à l'homme constituant l'essentiel du film. Et pour être franc, Goldsmith abat une fois de plus dans sa carrière un travail formidable. Rien que le thème principal de First Blood est un moment fort. Qu'il soit décliné sous une forme rythmée (le début de "Mountain Hunt") ou bien plus calme et poignante à la fois ("The Tunnel", et surtout "Home Coming"), il en jette sans taper dans le grandiloquent ridicule, et s'imprègne bien dans la tête. Et s'il revient plusieurs fois à la charge, il ne déçoit pas, sauf peut-être pour "It's a Long Road", chanson servant au générique de fin, et très connotée années 80.

Tout au long de la BO de First Blood, en plus de ce thème principal, Jerry Goldsmith s'amuse à faire du Jerry Goldsmith, et avec talent. En particulier, les cuivres sont à l'honneur pour créer une musique palpitante, nerveuse, transcrivant bien la fuite puis le combat de Rambo face à ses agresseurs dans la froideur de l'état de Washington. La musique prend aux tripes, au point qu'elle fonctionne très bien sans les images qu'elle parvient au passage à sublimer. Mais Goldsmith n'est pas seulement doué pour de grosses musiques haletantes. Il parvient, par le jeu des cordes et de quelques synthétiseurs discrets mais décisifs, à donner du relief à ses compositions, en témoigne le clavier de "Hanging On".

Si certaines facilités ne peuvent être évitées (le recyclage de "My Town" dans "Over the Cliff"), il ne fait aucun doute que First Blood jouit d'une bande originale marquante et réussie. Il fallait bien ça pour un film d'exception, qu'il fait bon redécouvrir sans les préjugés sur l'univers très burné et violent de John Rambo. Si Jerry Goldsmith répondra de nouveau présent pour les deux films suivants de la saga, il ne pourra cependant rééditer l'exploit, car se mettant au diapason de leur médiocrité.

Note réelle : 3,5/5