C'est entendu. The Queen Is Dead est considéré comme le meilleur album des Mancuniens et comme l'un des opus les plus marquants de la Pop contemporaine. On doit même obligatoirement pour tout être normalement constitué se délecter de ces notes subtiles et de ces mots corrosifs trempés dans l'encre de l'humour noir. A l'image du Pornography de CURE, même pour le fan, il est pourtant très difficile de s'écarter de l'orthodoxie smithienne. Il est vrai que Morrissey et ses trois compères semblent s'être surpassés mais est-ce suffisant cependant pour adhérer pleinement à ce troisième album ?

Ce statut d'album marquant, attention, je n'ai pas dit chef d'œuvre tient sans conteste au fait qu'il expose certains titres qui sont assurément parmi les plus beaux des SMITHS. Il est en effet impossible de rester insensible face au sommet d'émotions que constituent "I Know It's Over" et "There Is A Light That Never Goes Out". C'est toute la science de l'introspection lacrymale de Morrissey ainsi que la précision et la richesse soniques de Marr qui se présentent à nous. En quelques minutes, l'auditeur porté par ce jeu entre autres magnifique de guitare s'identifie pour toujours à ces vies banales, à cette frustration qui ronge, à ces envies d'ailleurs. Les SMITHS là encore réussissent à allier compositions accueillantes et acidité du propos. Que ce soit avec le cristallin "Some Girls Are Bigger Than Others" ou le léger et caustique " Frankly, Mr Shankly", le quatuor (re) donne sans conteste à la Pop ses lettres de noblesse.

Néanmoins, et peut-être est-ce subjectif, The Queen Is Dead ne possède pas l'intensité de Meat Is Murder. La faute à quoi ? A ce sentiment de déjà entendu et des morceaux plus faibles. Même si les titres suivants se distinguent quand même du tout venant par leur qualité globale, l'engouement n'est pas cette fois-ci total. Ils leur manquent un je ne sais quoi. " Vicar In Tutu" nous refait le coup du rockabilly petite frappe du nord de l'Angleterre et " Never Had No One Ever" ne semble pas vouloir finir et ce malgré la fluidité paradoxale de l'ensemble. Je n'ai pas l'âme d'un martyr façon saint Sébastien (" The Boy With The Thorn In His Side") ,mais certaines chansons créent un indéniable ennui. L 'introductif au vitriol "The Queen Is Dead" marque par sa longueur. A l'image de la section rythmique frénétique, Morrissey déploie toute sa verve mais par Elisabeth II, que c'est long. La sensation est identique avec le pourtant plus que classique " Bigmouth Strikes Again". La Grande Gueule frappe mais elle n'atteint pas le cœur de certains de ses auditeurs.

Voilà, vous l'avez compris. Même si The Queen Is Dead fait son devoir en nous proposant un disque élégant avec d'intenses moments de bravoure, il ne tient malheureusement pas sur la longueur. Comme quoi, la reine n'est peut-être pas tout à fait morte.