Aujourd’hui, la nouvelle mode vintage est partout : Slims, converses, vestes en cuir, coiffures à la Johnny Knoxville et désinvolture à toutes épreuves parcourent les rues avec une insouciance coupable et une arrogance extrême (inhérente au fait de vouloir recréer un style vieux de plusieurs décennies).
En marge, on remarque un renouvellement conséquent de l’intérêt pour la scène rock, résultant en un nombre incroyable d’insanités déblatérées par certains incultes …
-« Les eighties c’est les meilleures » (vintage… vingt ans d’âge ? non ?).
-« Boys Don’t Cry’ c’est le plus beau morceau des Cure ».
-« Lou Reed il sait pas chanter alors il parle à la place ».
-« Ouah, BB Brunes c’est des poètes parfois ».
-« Les White Stripes font de la bonne musique » (ahem).
… Mais aussi en un véritable et bienvenu revival de tout ce qu’ont pu donner les sixties-seventies, le coté business en plus et l’idéo en moins.

Et tout ça, on le doit aux Strokes.

Désignés avant même leur premier album comme sauveurs du rock et dignes héritiers des Television et du Velvet (rien que ça...), les mecs de New-York City n’avaient pas le droit à l’erreur et se devaient de justifier leur nouveau statut avec une première sortie conforme aux attentes.
Et le moins qu’on puisse dire à l’écoute d’Is This It ?, c’est que la bande à Casablancas a fait le boulot ; ce qu’on remarque d’abord, c’est l’exemplarité des lignes de basse et la recherche sur les accords de grattes : faute au Grunge, au punk-à-roulette et à la simplicité chronique de la britpop, on n'avait pas vu ça depuis un sacré bout de temps. La production, de plus, est parfaitement gérée et apporte au groupe une identité surprenante par le biais d’un mixage maîtrisé, très axé sur la guitare et les lignes vocales (particulièrement monocordes).

Niveau compos, les Strokes rassemblent tout leur capital inventivité dans le but de pondre l’album le plus parfait possible, et ça marche. Au-delà de l’aspect « conquête des charts » de beaucoup des titres, la subtilité des breaks et la recherche sur les structures rendent les chansons agréables et enfantent d’une certaine ligne directrice, indispensable à l’homogénéité de ce genre d’album. Le tout est égal et régulier en qualité, avec pas mal de temps forts (morceau titre, refrain de « Someday », « New-York City cops »...) et un nombre minimal de baisses de régimes. On regrettera cependant le bornage de Casablancas à maintenir ses lignes dans les mêmes octaves... Heureusement, il corrigera ça avec le temps, puis on peut aussi se dire que c’est justement la sobriété de sa voix, ici en parfaite harmonie avec le duo guitare-basse, qui crée le charme global et ce génial parfum de culte qui fait d’ « Is This It » un véritable succès…

A travers un enthousiasme transpirant, un talent certain et la sortie de cet album coup-de-poing, les Strokes ont réussi à se placer en pionniers reconnus du nouveau rock et ont, presque à eux seuls, ravivé l’intérêt général pour notre scène musicale fétiche, on ne les en remerciera jamais assez.

4,5/5