Délétère.

Le mot peut arborer deux définitions possibles : qui met la vie en danger ou corrompt l’esprit. Ce cas d’usage précis ne permet en aucune façon de trancher, englobant toutes les possibilités, tel un nuage de nitrogène liquide qui aurait avalé entier l’espoir né d’un millénaire neuf.

Mezzanine était sorti en 1998. On croirait qu’un siècle s’est écoulé depuis. C'est un peu comme si on était en apesanteur, écartelé entre ciel et terre, tel un ascenseur coincé entre deux étages. Au dehors, parmi ces millions d’oiseaux mécaniques paniqués essayant de trouver une hypothétique sortie, un papillon comme unique preuve de vie, mais dont la fragilité se manifeste par un faible battement d’ailes. Une fois congelé, n’importe quelle matière organique est brisable en mille morceaux si on plante un couteau en son cœur.

Album le plus ambigu de la carrière de MASSIVE ATTACK, 100th Window a tout du malentendu, vestige des dissensions dans lequel il a été engendré : 3D demeurant seul après les non-participations de MUSHROOM et DADDY G. Une austère plaque de glace irradiée par Sinéad O’CONNOR qui transforme tous ses titres en moments immortels ("What Your Soul Sings" et surtout le monumental "A Prayer for England", peut-être bien leur joyau le plus beau et secret).

Le soleil se leva comme d’habitude, aucun élément ne pouvait présager les tumultes à venir. L’homme dont l’identité demeurera à jamais mystérieuse travaillait peut-être au restaurant Windows on the World. Quand il passa devant la 100ème fenêtre, il se trouvait dans une situation analogue au chat de Schrödinger. Ni vivant ni mort. Ni suicidé ni assassiné.

"Everywhen" et son maître de cérémonie Horace ANDY amèneront leur résilience tôt ou tard, une fois les ultimes vestiges d'une guerre civile synthétique urbaine dissipés. Mais l’heure est à la prière silencieuse.