Recherche avancée       Liste groupes



      
ALTERNATIF  |  STUDIO

Commentaires (5)
L' auteur
Acheter Cet Album
 

 

- Style : Kitchens Of Distinction
 

 Site Officiel (3396)
 Myspace (1190)

INTERPOL - Turn On The Bright Lights (2002)
Par THOM le 26 Août 2006          Consultée 8256 fois

Aux premières résonances d'"Untitled" il est clair qu'on tient là quelque chose d'inhabituel, quelque chose que personnellement je n'avais jamais entendu. J'appris plus tard, sous la plume de myriades de critiques, que ça ressemblait beaucoup (trop pour certains) à Joy Division. Les griefs: même voix sépulcrale, même refrains tourmentés et autres guitares également métronomiques. Mais, et tant pis pour les nostalgiques des 80's, le combo de New York réalisa avec ce premier LP bien plus qu'un simple plagiat. Car l'intensité qu'Interpol fait passer dans ses morceaux ne peut résulter d'un vulgaire pompage. "Turn on the Bright Lights" fut ma révélation de la rentrée 2002: sombre, classe, stylé et boutonneux à l'image des protagonistes à peau grasse posant en costard et lunettes Carrera, comme présentés dans le livret.

Quoi qu'il en soit, pour leur premier effort, levé de rideau sur ce spectaculaire "Untitled". Le morceau est le parfait exemple des constructions du groupe: lignes de guitares/basse superposées et répétitives, assises sur la batterie retenue de Sam Fogarino (certainement l'un des batteurs les plus sensationnel de sa génération, d'une inventivité rare dans le petit monde du rock à guitares). Puis vient le chant ténébreux de Paul Banks, à la voix sombre et décharnée, en talentueux disciple de feu Ian Curtis. L'ensemble donne une chanson hypnotique, comme drapée de vapeurs narcotiques (!!), qui prévaut dans de nombreuses chansons d'Interpol, notamment dans Hands Away, autre grand rendez-vous des sentimentaux qui souhaiteraient ressortir les yeux mouillés...

Pas un morceau de trop, pas un qui manque: Interpol décline toutes les nuances à tirer de la structure qu'il s'est imposée. D'où un style de rock aigre, amer, pincé, tel le son des Gibson utilisées quasi uniquement. Pour jouer du manche, absence totale de guitar hero et de solos virevoltants: les chorus tiennent uniquement par de subtils assemblages de notes répétées, où les instruments se mêlent par couches successives. Et là-dessus des textes: pas de l'eau de rose, du vrai fielleux qui transpire malheur, cruauté et ressentiment. Mais pourtant toutes ces choses inavouables sont savamment planquées sous des dehors propres et classieux, qui plairont à la belle-mère (le groupe a d'ailleurs pris l'habitude de porter beau linge en concert, avec cravate de circonstance pour la plupart, voire borsalino chez Banks).

Passons ensuite au single, le premier des deux "Obstacles" que contient l'album. Où l'on découvre que tout n'est pas volatile chez Interpol, mais aussi rêche et nerveux. A n'en juger que par la batterie implacable qui amorce la chanson, tout ici est tiré au cordeau, mais fait aussi preuve d'une originalité que beaucoup envient (notamment les sympathiques Editors, qui devraient retourner bosser encore un peu dans leur backroom avant de prétendre faire aussi bien...).

Dans la même veine on trouve aussi "PDA", et sa partie instrumentale en milieu de chanson. Comme quoi il suffit de trois notes bien choisies (et bien répétées) pour donner une construction ô combien somptueuse. Suit "Say Hello To The Angels", un exercice de lacération de guitare rythmique pour Daniel Kessler, et un morceau de bravoure pour le chanteur, qui débite furieusement ses paroles en gardant cette même tension dans la voix en première partie de la chanson. Car en effet, les titres ont tendance à finir bien différemment de la manière dont ils ont commencé, avec souvent un nouvel horizon qu'on entrevoit dans les dernières mesures.

Les poils se hérisseront une fois de plus au son de "Obstacle 2", où il faut s'imaginer Paul Banks prophétisant, tête relevée et yeux mi-clos ("you don't trust yourself more at least one minute each day"), alors que, du fond, sifflent les guitares telles des sirènes aux dents longues... D'autres encore valent plus que le détour, à l'instar de "Stella...", "Roland" ou "The New" et son solo "allégé": stupéfiant. Pour ceux qui pensent pouvoir en faire autant, comme c'était mon cas au début, il faudra d'abord trouver une rythmique aussi bien aiguisée ^^.

Le sommet du glaçage de sang est toutefois atteint dans le dernier morceau, le terrifiant "Leif Erikson". C'est au sens propre, de la Cold Wave: on se laisse juste transporter par cette vague de froid qui nous enveloppe, et tranquillement bercé par quelques nappes de Fender Rhodes, on coule sûrement vers les limbes. (en gros, l'effet "Détraqueur", le baiser en moins...).

Cependant, ce n'est pas à tous les coins de bacs de disquaire qu'on rencontre un chef-d'oeuvre. Alors puisqu'à tout seigneur tout honneur, il fallait laisser le meilleur pour la fin. La chanson s'appelle "NYC", elle pèse 4 minutes 19 secondes: tout d'abord deux accords brumeux, solennellement lancés au son clair de la Les Paul. La voix froide du chanteur s'y mêle harmonieusement, tandis qu'apparaissent les autres protagonistes. Superposé à lui-même lors de chaque phrase du refrain, le chant contribue à un tissu instrumental qui s'étoffe tout au long du morceau, préparant le terrain pour que surgisse le fameux "it's up to me now, turn on the bright lights", lancé tel un avertissement d'outre-tombe par quelque fantôme de Ian Curtis flottant au-dessus de ce vaporeux entrelac mélodique. A mon sens une des meilleures chansons des années 2000. Non, allez, des dix dernières années. Et puis non, au diable l'avarice: une des meilleures de tout l'univers intergalactique (de toute façon ça n'engage que moi).

Ne serait-ce que pour ce morceau, on attribuerait les yeux fermés la note maximale à l'album. Mais comme j'en ai longuement glosé, la galette contient encore de nombreuses merveilles, chacune apportant sa pierre à cet édifice sidérant. Pas un concept album à la sauce 70's, mais une oeuvre diablement franche et enlevée, voire franchement diabolique...

A lire aussi en ALTERNATIF par THOM :


OASIS
Don't Believe The Truth (2005)
Britpop




EELS
Souljacker (2001)
Alternatif


Marquez et partagez





 
   THOM

 
   SEIJITSU

 
   (2 chroniques)



- Paul Banks (chant, guitare)
- Daniel Kessler (guitare)
- Carlos Dangler (basse)
- Sam Fogarino (batterie)


1. Untitled
2. Obstacle 1
3. Nyc
4. Pda
5. Say Hello To The Angels
6. Hands Away
7. Obstacle 2
8. Stella Was A Diver And She Was Always Down
9. Roland
10. The New
11. Leif Erikson



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod