Suite à la sortie du premier véritable album de Frank SINATRA, le phénomène prend une ampleur inattendue et vient concurrencer CROSBY ou COMO au sommet des charts américains. IL est donc temps de remettre le couvert. Ce deuxième album repose certes sur la voix magique de Frank, mais il ne faut pas négliger les aspects d'arrangeur du grand Alex Stordhal, qui parvient en de multiples occasions à transcender des morceaux souvent très datés. Nous continuons donc la découverte du Great American Songbook via La Voix ! Donc, du Cole Porter, du Jerome Kern, du Gershwin, du Irving Berlin... On nage dans l'opulence au niveau qualité des compositeurs, pour sur !

Il s'agit à nouveau une compilation de quatre 78 tours du début de carrière du natif d'Hoboken, comme pour le premier album. L'époque ne se prête guère au marketing, et quand on regarde la couverture de cet album, on est partagé entre le rire et l'incrédulité... Nous sommes donc en 1947 au niveau de la sortie des chansons et 1950 pour le vilain package du LP.

Débutons par ce qui est le plus connu ! Et... soyons objectifs ! La version que notre Frankie propose ici du giga classique de Judy GARLAND "Over the rainbow" n'a rien de bien folichon. Premier constat, c'est trop rapide, donc pas assez smooth, pas non plus assez romantique. Décidément, je ne suis pas fan de cette tentative. Impossible de la positionner dans le panthéon des reprises de ce standard. Trop banale, ai-je envie de dire !

Le classique de Glen MILLER "That old black magic" swingue plus et nous ramène de suite vers des sonorités plus jazzy. Beaucoup de cuivres donnent l'occasion à la voix de planer au dessus des considérations techniques de ce bas monde. Une très jolie performance ! D'ailleurs, "I concentrate on you" de Cole Porter produit les mêmes effets, le rythme est plus enlevé et permet à Frank de briller par la versatilité de sa voix incomparable. On n'est finalement pas si loin que ça d'un rock. En tous cas, on sent que le chanteur aime se frotter à un répertoire plus ambitieux que de se borner à chanter l'amour déçu !

"Embraceable you" est certainement daté, d'autant que l'orchestration donne un esprit encore plus kitsh à ce titre, qui aurait fait une bonne BO d'une comédie de ces années. Je trouve la voix un brin trop traînante sur ce titre mais la composition est belle, pas de doute. "She's funny that way" est plus smooth, on reste dans une ambiance jazzy assez standard. "All the things you are" de Kern est certainement plus symbolique du cinéma ricain de ces années, entre un "Gilda" et un "La route semée d'étoiles", cinéma dans lequel Frank va bientôt se tailler une place de choix.

"How deep is the ocean" est le parfait symbole de ces années, on lui préférera sans doute les versions plus tardives, car pourvues d'une orchestration un brin moins surannée. Cela dit, la chanson est belle, et romantique à souhait. Et sinon "I'm sorry I made you cry" sonne tellement kitschounette que s'en est surprenant. Les éléments orchestraux sont réellement datés, et ne permettent pas au titre de gagner ses galons en matière de postérité. Ce style demeurera à jamais le pré carré exclusif de son aîné Bing CROSBY. On ne le retiendra donc pas comme un instant suprême du disque !

Malgré une note semblable, je suis plus fan du premier album de Frank, clairement plus smooth. Certes, notre italo-américain a déjà 32 ans, mais sa carrière n'en est finalement qu'au début, et le son va évoluer, de même que les différentes tessitures de sa voix, qui ne cessera de grimper en intensité les années passant. En tous cas un témoignage direct de la musique des années Quarantes ! Voila qui n'est pas banal !