J'adore cette pochette. On devrait créer une galerie des plus belles pochettes en version agrandie... Et j'adore ce disque. Le deuxième effort de Joan OSBORNE ne paraît que cinq ans après le premier, un délai suffisamment large pour se faire oublier, surtout quand, arrivé à échéance, il n'y a aucun tube à la clé. Depuis Relish et la révélation « One of Us », l'Américaine a rompu son contrat avec Mercury, changé son équipe (au revoir Eric Bazilian), et conçu ce deuxième album en « R », non moins magique que le premier.

Righteous Love est taillé sur mesure pour la voix de la jeune chanteuse, pour tout ce qu'elle nous évoque : de l'élégance, de la sensualité, un souffle rock aussi, et du blues bien sûr. D'un autre côté, ce disque a un charme aussi fou que double : c'est un peu comme si Joan OSBORNE hésite entre un esprit d'artiste soul et un autre qui tient plus du rock alternatif/indépendant.

Prenez le morceau-titre, un slow blues à la mélodie magnifique et qu'OSBORNE porte avec grâce (ce final en montées, « I've never been so sure of loooove », avec ces choeurs... de l'or !), débute avec un gros son crade de guitare, tandis que l'autre joue en arpèges « aquatiques ». Quel climat ! Et les saxophones barytons forment un accompagnement encore plus déroutant, alors qu'on pourrait être dans un registre soul traditionnel. De quoi prendre aux tripes !

C'est une marque de fabrique, que l'on entend aussi sur le plus rock « Baby Love » où les saxos se réservent des refrains en supplément à ceux chantés. La manière dont Joan OSBORNE passe d'une voix normale à une modifiée sur ce titre est excellente (et ces fredonnements..), le côté alternatif s'affirme. La chanteuse est accompagnée par des Anglais et des Américains : les guitaristes Joseph Arthur, Val McCallum, le batteur d'Elvis COSTELLO (Pete Thomas) mais aussi le claviériste Mitchell Froom, ce qui promet une certaine flamboyance du côté des touches noires et blanches.

Le piano Wurlitzer se balade en effet sur « Angel Face », suivi de près par la basse, pour une mélodie douce et brumeuse, avec un excellent jeu de rythmique batterie/percussions à contretemps, sans oublier les cordes splendides du pont. Le sautillant « Safety in Numbers » permet à Froom d'ajouter du clarinette, et c'est l'un des titres où OSBORNE se double elle-même en fond et en aiguës sensuelles au possible. « Running Out of Time », « Love Is Alive », « Hurricane » qui fait beaucoup penser à ce que faisait Sheryl CROW quelques années plus tôt, développent cet aspect blues/soul chaud et a de quoi nous séduire à plus d'un titre.

Ce qu'il faut comprendre, c'est que le nombre restreint de musiciens favorisent la cohésion, et que les arrangements massifs, choeurs, saxophones et cordes, ne sont jamais superflus. Les musiciens jouent avec un sens du détail que l'on peut fortement saluer, et de belles surprises entre la remontée de synthétiseur sur « Love Is Alive » et la guitare-sitar de « Running Out of Time ». La chanteuse est brillante et les mélodies sont quasiment toutes inspirées. Un simple bémol pour « Grand Illusion », dont la légèreté est moins convaincante.

Au contraire, gros coup de coeur pour ce titre fantastique qu'est « If I Was Your Man » et son ambiance orientale. Percussions, oud, guitare 12 cordes, voix, tout y est excellent. La diversité est de mise, même pour la fin du disque qui repose sur deux tempos lents, un slow gospel et une ballade folk (« Make You Feel My Love », empruntés à DYLAN), enchanteurs à leur manière. C'est donc, malgré une carrière dont le souffle est déjà retombé, un autre grand disque de la chanteuse. Dommage que les compositions ne paient pas, et que par la suite, Joan OSBORNE devient plus simplement une interprète.