Dans la famille des pionniers de la musique électronique anglaise, on ne demande que rarement la carte de Robert RENTAL. Il faut dire aussi que ce natif de Port Glasgow ne fut guère un artiste très productif mais également que sa carrière fut exceptionnellement courte. Entre 1978 et 1980, deux singles seulement sortent à son nom, en plus d'un live en compagnie de The NORMAL et d'un album en collaboration avec Thomas LEER. Et pourtant, notre Écossais est l'un des premiers à avoir ouvert le bal d'une certaine New-Wave outre-Manche, aux côtés de Daniel MILLER, CABARET VOLTAIRE, The HUMAN LEAGUE ou encore FAD GADGET.

C'est à la fin des années 70 que Robert RENTAL quitte son Inverclyde natal pour venir s'installer à Londres, alors en proie à la nouvelle frénésie du punk-rock. Il y emménage en compagnie d'un compatriote, Thomas LEER, avec lequel il partage la même passion pour Brian ENO ainsi que la scène électronique allemande, en particulier CAN et KRAFTWERK. Il fréquente les membres de THROBBING GRISTLE et lors d'un concert de ces derniers fait aussi la connaissance de Daniel MILLER.

Pourquoi rappeler tous ces détails ? Justement pour souligner le fait que notre homme incarnait alors la synthèse de tous ces artistes ou styles cités plus haut, une des premières collisions entre la musique électronique encore balbutiante et l'éthique DIY des punks.

À l'époque, Robert RENTAL ne projette rien d'autre que de sortir un disque, son disque. Pas besoin de chercher un label puisque l'autoproduction marche aussi bien (1). En ce qui concerne le matériel, lui-même ne possède qu'une guitare et un Dubreq Stylophone, sorte d'antique clavier miniature et bon marché, et loue avec Thomas LEER un magnétophone Tascam pour l'enregistrement.

Paralysis est donc son premier coup d'essai, fabriqué avec son camarade dans l'intimité de leur appartement de Battersea. Inutile de préciser combien la qualité sonore s'avère ici médiocre. Musicalement néanmoins, ce single reste encore à l'heure actuelle un objet bien étrange, évidemment à la confluence de nombreux genres, du post-punk à l'Ambient, en passant par la musique industrielle. Son morceau-titre sombre d'emblée dans une torpeur vaporeuse et mécanique, toujours aussi gênante quarante plus tard. Côté voix, Robert RENTAL est souvent plus proche du non-chant de Damo SUZUKI que des vocalises approximatives de Brian ENO. En face B, « ACC » se révèle plus conventionnelle mais préfigure déjà un peu plus la suite, notamment The Bridge (1979) et Double Heart (1980).

Certes, ce disque ne marque pas autant que le Warm Leatherette de The NORMAL. Moins percutante, perfectible, la première copie de Robert RENTAL s'approche plus difficilement. Mais, malgré une distribution plus confidentielle, celle-ci demeure incontestablement l'une des œuvres fondatrices de la scène électronique anglaise des années 1980 et, à ce titre, mérite bien qu'on la redécouvre aujourd'hui.

Note : 3/5

(1) En réalité, Paralysis est sorti une première fois chez Regular Records, label fondé par RENTAL lui-même, et une seconde sur un autre label éphémère, Company Records.