Pas de doute, c’est bien elle. Il ne faut en effet pas bien longtemps pour reconnaître le timbre caractéristique et le style de CLARIKA, à l’écoute de son huitième album, A la lisière. Ce mélange de fraîcheur naïve, d’aisance naturelle et d’attaques aux fleurets mouchetés qui donnent naissance à une fusion heureuse de variété et de Pop. Avec toujours, cette petite pointe de mélancolie, ou de désabusement, qui transpire des textes de Claire KESZEI (son vrai nom).

Nous sommes clairement en terrain connu, et si l’on devait parler de surprise, la seule que l’on pourrait évoquer de prime abord serait celle qui nous fait constater qu’avec la même recette et un style qui n’évolue guère, CLARIKA parvient toujours à nous charmer. Tout au plus pourrait on pointer la participation du québécois Pierre LAPOINTE qui vient poser sa voix sur "Venise". Pourtant ce A la lisière aurait dû marquer un changement de fond dans l’œuvre de CLARIKA en cela qu’il a été élaboré en très étroite collaboration avec Florent MARCHET, qui avait déjà co-réalisé l’album Moi en mieux (2009). Au-delà de son rôle de réalisateur, ce dernier a composé la grande majorité des musiques, et est crédité en tant que multi musicien. En effet, il joue du piano, des claviers (dont du clavecin), des percussions, de la guitare, de la basse, du marimba, du vibraphone, de l’épinette… A quoi cela s’ajoute une participation aux chœurs et la prise en charge des arrangements orchestraux. Ce genre de collaboration n’est pas une première pour celui qui, pour mémoire, avait déjà composé pour Sylvie VARTAN, Elodie FREGE et Axelle RED.

Pour autant on ne retrouve pas l’identité musicale que développe sur ses disques l’auteur des excellents Courchevel (2010) et Bambi Galaxy (2014), et c’est bien l’identité de CLARIKA qui prend le dessus. On peut voir cela comme une preuve que Florent MARCHET a su mettre son talent au service de la chanteuse, et que cette dernière a su imposer sa personnalité et son identité musicale. Ou bien voir dans cette collaboration une sorte de mariage non consommé, qui nous prive du fruit hybride né de la rencontre artistique de ces deux fantastiques musiciens. Au regard de la qualité de ce A la lisière, je préfère opter pour la première de ces hypothèses, tout en me disant que des digressions plus prononcées vers l’univers plus électro pop de MARCHET auraient peut-être apportés un relief supplémentaire à cet album. Mais il faut mettre au crédit de ce dernier qu’il a su se mettre en retrait afin de permettre à CLARIKA de développer son propre son univers musical. Univers qu’il semble avoir parfaitement compris. Tout au plus peut-on noter une propension à faire appel, en de rares occasions, à des orchestrations un peu plus riches qu’habituellement. Cela est assez sensible sur des morceaux de la trempe de "La lisière", ou "Anne, ma sœur Anne".

Quoi qu’il en soit, les raisons de se réjouir sont nombreuses à l’image des excellents "Même pas peur", "Tout, tout de suite", "Le Désamour" ou bien "Sous ton cortex" au travers desquels nous retrouvons la verve poétique, légèrement teintée d’impertinence de CLARIKA. Cet équilibre heureux entre variété et pop sucrée, entre fausse naïveté et engagement sociétal. Le tout porté par des mélodies toujours aussi bien ciselées. Pas de grands changements, ni de grosses surprises, au final, mais un plaisir d’écoute qui reste intact et des retrouvailles qui se révèlent très réjouissantes.