Après deux albums grands guignolesques notre LITTLE RICHARD signe avec Mercury pour continuer d'enregistrer des albums, ainsi que le seigneur Djizeus lui a ordonné de le faire. C'est celui qui n'est pas encore l'immense Quincy Jones qui se colle au taf de la production. Ne rigolez pas, car encore aujourd'hui Quincy déclare à qui veut l'entendre que Richard Penniman est le plus grand chanter de l'histoire....voila de quoi poser une réputation, dont notre ex rock star évangélisateur n'a que faire, tout perturbé qu'il est par sa vocation, même si la police l'arrête en cette année 62 à mater obstinément les hommes dans les toilettes... Bref, aux Etats-Unis tout ceci est normal, C'est bien pour ça que notre bon pasteur a beaucoup de boulot à effectuer pour sauver le monde de ses turpitudes.

Cela dit, il est facile de se gausser mais bien difficile de ne pas s'extasier sur la qualité de l'interprétation sur certains titres : voyez donc "Do You Care", où le petit RICHARD semble ici atteindre au sublime de cet exercice de style qu'est le Gospel. L'orgue sur "It's real" nous plonge direct dans le délire de la pâmoison des parpayots ricains, oui c'est beau et la voix du pionnier du rock est carrément à se damner. "Peace In The Valley" est un des titres les plus connus du répertoire liturgique. Admettons que la performance défonce celles de ses potes, dont celle d'ELVIS, mais bon, le king est moins emberlificoté dans les bondieuseries que son voisin de Georgie. C'est tout doux, avec des choeurs qui foutraient de l'urticaire aux PLATTERS.

Quelques inflexions ? On entend presque les intonations passées du chanteur sur la trépidante "Joy Joy Joy", et ça le fait pas mal, on se doute qu'il commence à avoir des fourmis dans les doigts à force de ne pas manipuler son...piano ? Bande de blaireaux vous vous attendiez à quoi ? Nous avons aussi "Ride On King Jesus", en mode cavalcade, comme pour emporter les esprits loin du monde tangible, ouais comme dans les temples de Haarlem, ou les ouailles semblent médusés par le pouvoir des prédicateurs.

Sur "Do Lord Remember Me", une titounette guitare se fait entendre... Ah, par les épines de la sainte couronne du rejeton divin, mais notre RICHARD ressentirait-il des picotements dans ses envies ? Se dirigerai-t-on vers le rock'n'roll, il parle de blues en tous cas. Il y a du swing dans "Ride On King Jesus"... Mais finalement toutes ces chorales bien pensantes de Gospels, ne serait-ce pas une manière déguisée de faire du wok'n'woll lightounet ? Hypocrite de ricains va, on vous a reconnu avec vos tenues bicolores à faire les pseudos religieux !

De vrais trompettes dignes de l'empire romain sont à l'oeuvre sur "The Captain Calls For You", parole on jurerait un titre de recrutement pour l'armée américaine, vous savez, celle qui amène joie prospérité et éducation partout ou elle passe... Passons d'ailleurs, les américains y croient dur comme fer... Comme en Djizeus leur sauveur d'ailleurs, cela semble aller de pair. Mais cette version vibrante de foi vaut son pesant d'hosties frelatés. On continue sur le thème de l'armée avec "He's Not Just A Soldier", le tambour est là, le clairon aussi, même le sergent, les bons sentiments aussi... Oui ça fait peur !

Bref, ce troisième opus de Gospel est sans aucun doute le meilleur de la trilogie de LITTLE RICHARD, tout au moins celui à découvrir pour les amoureux de ce genre musical. Et Quincy confirme ! Cela dit, nous voyons nous aussi la lumière au bout du tunnel, et notre pasteur va retomber dans le rock'n'roll satanique l'année suivante vous allez voir. Enfin un peu de rock à se mettre dans les esgourdes, tout ça était bien sympa mais tout à une fin !