Peu de groupes aux States reflètent comme les MAVERICKS la diversité de population qui compose ce pays. Pourtant, à la fin des années 80, lors de la constitution du groupe, cette diversité ne se fait pas encore réellement sentir. Le groupe a été fondé en 1989 par Raúl MALO, un Américain de Miami mais d'origine cubaine, dont les parents avaient fui le régime castriste. MALO, qui a grandi en écoutant la collection de disques country de ses parents, s'est tourné vers la musique pop à l’adolescence, jouant dans des groupes de la scène rock locale de Miami jusqu’au jour (ou plutôt nuit) où il assista à une prestation de Rodney CROWELL qui lui a fait l’effet d’une révélation. A partir de cet événement, MALO décidait de constituer son propre groupe. Peu de temps après, il rencontrait le guitariste Ben PEELER, un étudiant en musique de formation classique, avec lequel il se produisait dans les clubs de la région avec des intermittents de la musique. Après quelques mois à chercher la formation idéale, ils recrutèrent Paul DEAKIN, un batteur de Miami, et le bassiste Robert REYNOLDS qui s’avéraient être de leurs amis. Cependant, pour Ben PEELER, ce sera le seul disque avec les MAVERICKS, celui-ci quittant le groupe par la suite pour devenir musicien de studio (WALLFLOWERS, SHAKIRA, Garrison STARR, Jim WHITE, Shelby LYNNE, Jimmy CLIFF, LITTLE TORNADOS, …).

D’emblée, ce qui frappe avec ce premier album est la voix de MALO, un chanteur ténor avec une tessiture entre celle du King, même si cette dernière avait plus de profondeur dans les graves, et celle de Roy ORBISON. Les chansons sont toutes de Raúl MALO et témoignent déjà d’une certaine maîtrise dans le "song-writing". Dès les deux premiers titres, nous sommes transportés dans son monde fait de joyeuseté qui sera la marque de fabrique des MAVERICKS. Le mixage met Ben PEELER en avant, non pas dans les solis, mais surtout dans l’accompagnement, même si le solo sur "The End Of The Line (Jim Bakker)" est joliment troussé. Surtout, c’est la batterie qui fait l’architecture de ce titre et qui donne envie de danser et taper du pied. "You’ll Never Know" est une chanson optimiste que certains ont pu comparer au répertoire de Ricky NELSON dans les années 50 et 60. C'est un très bon rock mais avec du violon et de la steel en vedette dans le mix.
Une des chansons typiques du style de MALO est "Mr. Jones". Démarrage cool à la guitare électroacoustique puis les instruments entrent tranquillement dans le morceau en mid-tempo, entourés par les notes de l’harmonica. Moment fort du disque par sa mélodie particulièrement accrocheuse qui se clôt sur un fade-out, tel un miroir à l’entrée en matière. Un must-have du groupe.

Toujours la guitare en vedette dans "Tomorrow Never Comes", avec malheureusement un solo un peu faiblard, mais où le violon de Debbie SPRING est mis en évidence sur un titre typé années 60 (dans le style de Buck OWENS). Cependant, Ben PEELER se rattrape sur "Watch Over Me", un country-rock rapide que n’aurait pas renié Albert LEE. Cette guitare mise aussi en avant avec sa reverb' sur des notes aigües dans "This Broken Heart", donnant l’impression que la voix de MALO est placée sur "Sleep Walk", la ballade de SANTO & JOHNNY reprise, entre autres parmi les plus belles versions, par les SHADOWS, Danny GATTON ou Larry CARLTON. Jolie trouvaille, le solo n’est pas à l’électrique mais à l’électroacoustique. "The Lonely Waltz" qui, comme son nom l’indique, est une valse, n’est pas transcendante, même s’il y a un joli travail de mandoline de Ben PEELER et d’harmonica par Homer WILLS. Ce n’est pas la chanson la plus mémorable. Mais, comme tout disque de country qui se respecte, il faut le slow de circonstance. Cependant, placé en plein milieu de l’album, il fait un peu tâche. Personnellement, je l’aurais plutôt mis à la fin. Au lieu de cela, nous avons "Strength To Say Goodbye" qui est le pendant acoustique de "You’ll Never Know", avec quasiment le même rythme que la première chanson du disque.

Il y a quand même quelque chose de très étonnant avec cet album. Souvent les rythmes des chansons ne correspondent pas à l’ambiance décrite en leurs seins. A deux ou trois reprises, les thématiques sont plutôt tristes avec des rythmes enlevés qui détonnent totalement. Ainsi, "A Better Way", "Keep Moving On" ou "I'll Give You Back (When You Belong To Me)", un jazz léger, ont plutôt des mélodies joyeuses alors que les paroles ne reflètent pas cet état d’esprit. Nul doute que, s’il les réenregistrait à nouveau, Raúl MALO ralentirait le rythme. Mais si l’on fait fi des paroles, la diversité des ambiances permet un certain équilibre rendant disque plaisant à écouter, d’autant plus pour un premier essai. Autre particularité, après que Ben PEELER aura quitté le groupe, les MAVERICKS retourneront en studio enregistrer leur second album, celui qui lancera réellement leur carrière. Or, fait assez rare à souligner, ce second album comprendra 4 titres issus du premier et réenregistrés pour des versions supérieures à celles de ce disque. Dès lors, les MAVERICKS pouvaient se faire un nom. Mais ceci est une autre histoire.