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NOISE ROCK/POST-HARDCORE  |  STUDIO

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BLACK MIDI - Schlagenheim (2019)
Par K-ZEN le 19 Juillet 2020          Consultée 1375 fois

BLACK MIDI, en dèche de majuscules, c’est un oxymore. En effet, à part pendant une éclipse, midi est plutôt l’heure où le soleil brille le plus fort, du moins classiquement dans nos sociétés d’Europe du Sud. C’est un peu à mi-chemin entre "l’obscure clarté" de Corneille dans Le Cid et le "soleil noir et lourd, qui épaissit le jour" de Bernard LAVILLIERS dans l’excellent "Plus Dure Sera La Chute".

Peu d’informations ont filtré sur ce groupe, toujours enveloppé de mystère. Tout juste sait-on qu’ils sont anglais, la réunion s’étant concrétisée en 2017 à Londres. Si on parcourt les réseaux sociaux, on tombe sur quelques bribes d’interviews, des affiches classieuses pour des concerts ou des mixtapes, à l’iconographie assez étrange, la typographie du nom du groupe moyenâgeuse se heurtant à des illustrations plutôt modernistes et réalistes aux couleurs criardes.

Schlagenheim, leur premier effort studio, au nom aussi tranchant qu’une machette, est sorti en 2019.
Sa pochette, empruntée à Christo ou Cesar, nous emmène dans une décharge. Amoncellement de pièces métalliques et motorisées, celles-ci forment un cheval sur la droite, ce qui ressemble à un golem sur la gauche, tenant entre ses mains crispées une promesse d’évasion. Perdue dans ce maelstrom et comme présentée à un potentiel avide public, ce tableau représente une fée semblant suivre une lune dans un ciel d’azur. Mais devant elle, une montagne sombre s’élève, à moins que ce ne soit une immense vague. Est-ce un danger imminent, l’expression d’une impossible échappatoire ou simplement la matérialisation de l’ambivalence de la musique du groupe ?...

L’objectif musical de BLACK MIDI est très clairement exprimé sur "Speedway", second single extrait de l’album, un math rock où résonnent les phrases prononcées par le bassiste Cameron Picton qui, à première vue, n’expriment qu’un mécontentement sur la société en général. Mais ces « nouvelles villes » mentionnées, ce ne sont que ces productions musicales avec lesquelles on nous arrose quotidiennement en nous promettant monts et merveilles mais qui finalement ne sont souvent qu’amères déceptions. En ce sens, la phrase du pont "We won’t build to this code", littéralement "Nous ne construirons pas selon cette norme", c’est la profession de foi du groupe, la promesse de quelque chose qui en vaille la peine.

Et c’est le cas. Frénétiques, schizophrènes, les morceaux de black midi se baladent entre post-punk au groove prégnant et rock expérimental noisy à (2) guitares. Des compositions très travaillées, agrémentées de synthétiseurs et autres séquenceurs, le groupe n’ayant pas simplement voulu répliquer son live set en studio. Le galop introductif et rageur de "953" reste finalement presque sans suite, si n’est le très politique "Near, DT MI" traitant de la pollution de l’eau de la ville de Flint dans le Michigan sur fond de corruption, un morceau hardcore bien rude à la ligne de basse menaçante comme savaient si bien les pondre FUGAZI. Les autres titres présentent des structures plus complexes et alambiquées. Une violence larvée et délicatement infusée, traversée par le chant nasillard de Geordie GREEP, comme un croisement bâtard entre David THOMAS (PERE UBU) et certaines intonations de DEVO.

"Western" est l’autre mise en musique du duel entre Frank et l’homme à l’harmonica dans Il était une fois dans l’puest, son country rock subissant des accélérations bien senties au gré de la tension grandissante et des balles échangées. "Of Schlagenheim", histoire d’un homme rencontrant une femme qu’il n’aime pas juste pour du sexe, s’apparente plutôt à une balade dans une maison des miroirs, croisant la même phrase jusqu'à l’aliénation sur le chemin, seul variant une lettre : "He’s at the centre ; she’s at the centre". Un procédé répété sur le maniaque "bmbmbm" (prononcer : Boom Boom Boom, du nom du son de guitare sur cette chanson), imperturbable titre industriel mené par la basse, dont l’insanité n’aurait pas dépareillé sur Trout Mask Replica de CAPTAIN BEEFHEART. "Ducter", sous son riff post-punk revival propret que les FOALS ont oublié d’écrire, cache un lourd secret. C’est cette montée, cette poussée de fièvre irrésistible et symétrique à l’image de "A Day In The Life" des BEATLES ou de "Good Morning, Captain" de SLINT. Croquis de la relation ambivalente pouvant exister entre un chef d’orchestre ("Con-Ducter") et ses musiciens, voilà une fermeture d’album pour le moins emblématique.

Publié sur le mythique label anglais Rough Trade créé en 1976 et dédié au punk et au post-punk – à qui on doit notamment Grotesque des FALL ou Deceit de THIS HEAT, pour citer 2 de ses plus emblématiques sorties -, vous devez encore vous poser à ce stade précis une seule question. Non pas "Dois-je acheter/écouter Schlagenheim ?" mais plutôt : "Schlagenheim est-elle une ville d’Alsace ou non ?"

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- Geordie Greep (chant/guitare)
- Matt Kwasniewski-kelvin (chant/guitare)
- Cameron Picton (chant/basse)
- Morgan Simpson (batterie)


1. 953
2. Speedway
3. Reggae
4. Dear Dt, Mi
5. Western
6. Of Schlagenheim
7. Bmbmbm
8. Years Ago
9. Ducter



             



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