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POST-PUNK/INDIE COLD WAVE  |  STUDIO

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2019 Dogrel
2020 A Hero's Death
2022 Skinty Fia
 

- Membre : Grian Chatten

FONTAINES D.C. - A Hero's Death (2020)
Par K-ZEN le 17 Septembre 2020          Consultée 1405 fois

Pour débuter, on peut aller voir le clip de "I Don’t Belong" pour se faire une idée. « Je n’appartiens à personne ». Est-ce de l’aigreur ? Apparaît à l’écran un chanteur immobile, alors qu’au même instant l’eau commence à monter, habillé modestement. Une voix monocorde. Sans émotion. Et un accent particulier, une erreur de grammaire volontaire dans la seconde phrase. « Telling people what they was ». Cette hargne, cette morgue, cette insolence apparente. Plus que Sheldon Cooper, impossible de ne pas songer à Liam GALLAGHER. Un soleil couchant. Des vagues accélérées. Un bateau désaffecté. Un moulin et notre chanteur réapparaît. Son accent se fait plus pressant sur le refrain et ses « I don’t belong to anyone ». Comme un lointain écho à « Hello » qui ouvrait superbement What’s The Story (Morning Glory) ?, le second chef-d’œuvre de OASIS. Un phare. Direction la plage. Toujours ces nuages dans ce ciel. La mer gagne du terrain. La caméra s’emballe, balayant de haut en bas, de droite à gauche. Ça virevolte, ça tremble. Notre chanteur est dans l’eau à présent. Est-ce un suicide ? Il finit entièrement immergé sous un ciel rose. Félicitations, « I Don’t Belong » est une ouverture de folie assortie d’un clip totalement dément. Cette distance et cette froideur, un avant-propos parfait de ces quarante minutes.

Le premier titre constitue également le premier questionnement sur l’identité, un thème comme un fil rouge de ce second album des FONTAINES D.C. Celle du chanteur Grian CHATTEN, à la position complexe d’irlandais de père anglais ou finalement simple produit vendu aux masses comme il l’a ressenti lors de la tournée aux USA pour promouvoir leur premier disque Dogrel, sorti en 2019 et qui avait rencontré le succès. Un succès auquel le groupe ne s’était pas forcément préparé. "A Lucid Dream" traite de ce rapport à la célébrité et du succès brutal. Un rêve lucide devenu réalité et un homme qui n’est plus vu que comme le front-man des FONTAINES, dépossédé de sa propre identité. Un rêve lucide, c’est aussi une expérience consciente du rêve. La frontière entre le rêve et la réalité est fine, Dogrel représente une matérialisation à demi rassurante de cette démarcation.

Plus loin, "A Hero’s Death" expose ses chœurs très WHO et envoie un riff pour le moins menaçant sous cet aspect popisant apparent. La proximité avec Mark E. SMITH, quand il vocifère sur "My New House" ou "Hey Luciani !" devient vraiment impossible à nier. Ce titre poursuit notre questionnement intime. L’identité de l’humain se dissout à nouveau dans celle d’un produit sous couvert d’une critique de la réclame et de ses slogans claquants et positivistes. Plus qu’une bande-son pour relire K. Dick, c’est en réalité une vraie charge contre la réponse conditionnée utilisée dans la publicité consistant à associer un stimulus positif comme une jolie musique ou une belle image à un produit quelconque. Pour grossir (volontairement) le trait, songez par exemple à ces femmes voluptueuses qui paradent avec les armes proposées par Serge dans le troisième Flic de Beverly Hills. Cette thèse découle des recherches de Pavlov et de son fameux reflexe, quand le chercheur réussit à faire saliver son chien par l’intermédiaire d’un métronome après avoir associé cet objet à sa gamelle. "Televised Mind", à l’éloquent intitulé, semble indiquer une fuite des paillettes et de ce qui brille pour se concentrer sur quelque chose de plus intéressant et underground via la comparaison entre Broadway et le cabaret.

Ailleurs, des tubes. "Love Is The Main Thing" révèle une autre influence prégnante, celle des CHAMELEONS UK au niveau des guitares. Pas illogique lorsqu’on songe aux compositions d’équipe, exposant chacune deux guitaristes. "You Said" arbore un riff typique du revival post-punk sur un texte comme une charge contre la vie qui va trop vite ("operating Faster"), toujours plus vite. "Living In America", opaque et aérien, postule immédiatement au rang de climax. Pas de réchauffement de température notable cependant à noter. Toujours cette insolence dans le chant. Un phrasé typique, celui de Manchester ou de l’Irlande. Liam toujours, Shane McGOWAN (THE POGUES) parfois dans les aspects les plus punk. Mais aussi des intonations de Syd BARRETT. Et le champ lexical du temps que l’on retrouve comme on l’avait sur le second album de l’ancien chanteur de PINK FLOYD ("Sunny", "Oh Such A Spring"). Avec les rêves dont on a déjà vu l’empreinte, ne manquent que les dominos.

L’atmosphère se réchauffe en fin de disque et révèle un aspect plus surprenant. "Sunny" sonne comme un BEACH BOYS. Mais un BEACH BOYS un peu cramé, déprimé. Ou fatigué peut-être après ce shooting photo bidon avec des surfs. Impossible de se rappeler. Quelle importance ? "No" propose enfin une acceptation des choses de la vie et des sentiments, mêmes les plus durs (« apprécier le gris »). Un bien bel élément de résolution. L’association de ces deux titres forme d’ailleurs « Sunny No ». Ne manque qu’une virgule pour obtenir un hommage à « Caroline, No », excellente chanson de Pet Sounds ?

Finalement, si on n’y réfléchit bien, A Hero’s Death, c’est un carambolage autoroutier. THE FALL est bien évidemment le premier protagoniste avec cet aspect aliénant et monocorde, des paroles scandées ad nauseam comme des slogans de manifestation ou publicitaires. Mais dans son pare-chocs, se logent les BEACH BOYS, INTERPOL, CHAMELEONS U.K. mais aussi, inévitablement, le péché originel JOY DIVISION. Parfaitement digérées, ces influences se fondent dans un disque vraiment magistral, distant et froid, peut-être bien la meilleure sortie de 2020 pour le moment.

Ou alors...

Dans un univers parallèle, A Hero’s Death c’est juste le meilleur album de OASIS depuis des lustres. Son album cold wave et alien, celui qu’on attendait comme le messie. A l’image de ce que représente 13 pour les rivaux BLUR.

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- Grian Chatten (chant, tambourin)
- Carlos O'connell (guitare, chœurs)
- Conor Curley (guitare, piano, chœurs)
- Tom Coll (batterie, percussion, guitare)
- Conor Deegan (basse, guitare, chœurs)


1. I Don't Belong
2. Love Is The Main Thing
3. Televised Mind
4. A Lucid Dream
5. You Said
6. Oh, Such A Spring
7. A Hero's Death
8. Living In America
9. I Was Not Born
10. Sunny
11. No



             



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