Quand on sort un disque, c’est une partie de nous-mêmes qu’on accouche plus ou moins douloureusement. Quant à savoir si celle-ci est récupérable après coup, c’est une autre paire de manches, a fortiori si on en a réellement la volonté, un fait loin d’être acquis. Personnellement, je pense qu’une fois expulsée, la chose ne peut prétendre que difficilement à regagner une place restée vacante seulement un instant, la nature ayant horreur du vide. Cependant, si le compartimentage s’avère bon, peut-être aura-t-elle été remplacée par un clone demeurant toutefois imparfait, tout objet organique non produit industriellement cultivant une unicité véritable.

Quand on sort une chronique, c’est une partie de nous-mêmes qu’on accouche plus ou moins rapidement, à l’instar de nos héros de l’autre côté du sillon.

Dans le cadre de Romance, on ne peut pas dire que cela avait commencé sous les meilleurs auspices. Ce 23 août 2024 était ainsi marqué par un problème de distribution du quatrième album des FONTAINES D.C. qui devait sortir initialement ce jour, un incident plutôt gênant servant d’inauguration à la signature du groupe irlandais sur un nouveau label. En outre, le disque était fortement attendu pour un quintet devenu une référence de son époque après trois solides sorties et armé d’un néo-statut à assumer.

Malgré tout, les fidèles des FONTAINES en appétit avaient pu profiter d’un morceau en avant-première : l’inquiétant "Starburster" aux faux-airs du paranoïaque "I Am the Walrus" des BEATLES, shooté aux médicaments afin de soigner son agoraphobie envahissante. Un titre dont on s’apercevra finalement a posteriori qu’il n’est pas si représentatif de l’album complet mais uniquement de sa première phase. En effet, le batteur Tom Coll nous livre cette indication capitale : l’ordre des chansons composant Romance est important. Entre début et fin, on passe de l’éponyme à "Favourite". Soit des ténèbres à la lumière. Et le contraste est absolument saisissant, un peu à l’image de la jaquette faisant figurer un gigantesque mais difforme cœur versant une larme.

À nouveau confronté à la noirceur. "Romance" est une terrible ouverture, livrant sa théâtralité gothique crue à la limite du morbide héritée de Nick CAVE ou d’un 'Underground' introduisant Swordfishtrombones signé Tom WAITS. Difficile de ne pas songer également aux climats délirants dispensés par le loyal "Hellfire" des défunts black midi. Cependant déjà fourni avec une éclaircie, celle-ci se concrétisera pleinement dans l’autre diagonale via "Favourite", émouvant voyage à travers la route de la nostalgie – et composition favorite du groupe à ce jour – entérinant une transformation définitivement réussie.

S’il conserve quelques stigmates du passé via l’incisif et très PIXIES "Death Kink" ou le garage "Here’s the Thing", le post-punk des FONTAINES D.C. s’est fortement teinté d’une coloration indie rock indéniable – voire country rock par instants, avec la présence non négligeable de guitares acoustiques – qu’il faut réussir à appréhender. Mais une fois fait, on prend plaisir à écouter un disque à l’écriture toujours impeccable où Grian Chatten semble avoir apporté les idées esquissées sur son ouvrage solo (le post-rock précieux de "Desire", premier d’une série de titres conviant des cordes) en même temps qu’un chant évoluant vers un aspect lyrique croissant (on pense parfois à Chris MARTIN… !)

Enregistré en France, le disque a fait un carton dans toutes les presses, qu’elles soient spécialisées ou non et la colossale tournée à venir s’annonce triomphale.

Romance ou l’histoire d’un groupe s’offrant une vacation campagnarde, mettant de côté sa coloration typique pour se parer d’une palette enrichie de nuances variées, telles celles qu’on a pu voir ornant leurs costumes lors de séances photos récentes. Une parenthèse dorée dont on ne sait si elle se prolongera indéfiniment ou pas.

Le meilleur album de COLDPLAY depuis des lustres. Et une sortie plus que solide encore pour les FONTAINES D.C.
Car tu demeures mon favori et ce depuis un long moment.