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FOLK BOOM  |  STUDIO

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1962 Peter, Paul And Mary
1963 In The Wind
Moving

PETER, PAUL AND MARY - Peter, Paul And Mary (1962)
Par LE KINGBEE le 16 Novembre 2020          Consultée 1457 fois

Ce trio demeure l’une des figures majeure du Folk Boom US du début sixties. Monté à l’instigation du producteur Albert Grossman, le gars qui avait déjà dégoté une toute jeune Joan BAEZ et Bob Gibson, le trio PETER, PAUL and MARY a fait ses gammes au Bitter End, célèbre petit club situé sur Bleeker Street au cœur de Greenwich Village.
Après avoir auditionné bon nombre de folkleux et de songwriters, Grossman retient Peter Yarrow, Noel Paul Stookey et Mary Allin Travers♠ et les rebaptise tout simplement PETER, PAUL And MARY. Une bonne pioche pour le producteur. Bien qu’originaire du Kentucky, Mary a ses racines au Village où ses parents se sont établis quand elle avait deux ans. Ancienne membre des Song Swappers, Mary a rencontré et joué avec Pete SEEGER alors qu’elle était au collège. Mère d’une petite fille d’un an, elle hésite encore entre une carrière au théâtre et celle de chanteuse. Peter Yarrow, son cadet de deux ans, sort diplômé en psychologie de l’Université privée de Cornell. Son père, un avocat d’affaires, a du pognon à craquer et pour l’anecdote fut l’un des instigateurs d’une honorable officine gouvernementale connue sous le nom de CIA. Mais la psychologie n’intéresse guère Peter, lui son truc c’est la guitare. Après s’être produit au Folk Sound USA, une émission télé de la CBS, il passe au Newport Folk Festival où Albert Grossman le recrute. Paul, le dernier membre du trio, est une trouvaille de Mary. Noel Paul Stookey, après des études à l’Université du Michigan, s’est essayé au métier d’humoriste avant de bifurquer vers le Folk et l’activisme. Albert Grossman (futur manager de Bob DYLAN) a eu une idée lumineuse : créer un trio capable de prendre la succession des Weavers, le quatuor de Pete Seeger et Lee Hayes placé sur la célèbre liste noire du sénateur McCarthy.

Après avoir fait répéter le trio pendant plus de six mois, Grossman parvient à faire programmer son trio dans plusieurs salles new-yorkaises. En quelques semaines, tout Greenwich Village s’arrache le trio. A l’orée des sixties, le Folk Boom parti des campus connaît une vague qui enivre l’Amérique. Le mouvement devient une alternative commerciale aux variétés et à la musique populaire. Mais si le mouvement connaît de gros succès dans le Nord, il est en fait un exutoire des traditions sudistes. Bientôt, de nombreux labels bien implantés se spécialisent dans le Folk : Prestige, Vanguard, Elektra, Folkways ou la Warner. Mais si certains voient dans le lancement du Folk Revival un bon procédé pour se remplir les fouilles, la réalité est tout autre. D’un côté, on a des artistes qui expriment une colère et une révolte légitime contre le conformisme américain, le conflit américano-vietnamien et l’American Way of Life (Joan BAEZ, Buffy Sainte Marie, Karen Dalton, Barbara Dane, Bob DYLAN, Woody GUTHRIE, Phil Ochs, Dave Van Ronk) et de l’autre des chanteurs plus maniables, plus lisses (The KINGSTON TRIO, The BROTHERS FOUR, The Journeymen, The Limeters, Chad Mitchell) auteurs de répertoires permettant au système de promouvoir et de récupérer commercialement un mouvement dérangeant, voire déviant, pour la bonne société américaine. En politique comme en musique, ce sont bien souvent les plus gros et les plus cons qui, au bout du compte, raflent la mise.

Ce premier disque éponyme du trio faillit être édité par la firme Atlantic ; le label d’Ahmet Ertegun et Jerry Wexler, très impliqué dans le R&B, la Soul et le Jazz voulait diversifier son catalogue avec du Folk. Mais au dernier moment, la Warner décrochera le gros lot. Excellent producteur très attaché aux retombées financières pour ses artistes, Grossman était parvenu à sceller un accord avec la Warner dans lequel le trio gardait un contrôle total sur ses créations et ses enregistrements. Bien aidé par Artie Mogull, futur président d’United Artists, Grossman lui renverra l’ascenseur en lui faisant signer le premier contrat d’édition de son futur poulain Bob DYLAN.

Sorti en mai 1962, ce premier disque éponyme reste dix mois dans les classements du Billboard, grimpant même à la plus haute marche des classements Pop, une première pour un disque de Folk. Si l’album est porté par le succès des singles "If I Had A Hammer" et "Lemon Tree", son impact auprès de la jeunesse blanche reste important. Aujourd'hui encore, certains titres de PETER, PAUL AND MARY sont étudiés dans les écoles américaines, l’Europe n’échappant pas à la règle.
Si le trio a construit son succès sur le carton des titres précités parus en singles en juillet, la moitié du répertoire reste personnel, Yarrow et Stookey étant les créateurs de six morceaux. Le disque s’ouvre sur "Early In The Morning" ⃰, titre qui chez nous connaît un petit succès via l’adaptation assez lisse de Joe DASSIN ("Dans la brume du matin"). "Sorrow" ⃰ ⃰ instaure un climat mélancolique, les jeux de guitares acoustiques renforcent cette impression tandis que le timbre contre alto de Mary Travers vient se poser en contrepoint des voix de ses deux partenaires. Sur "This Train", Peter Yarrow s’inspire d’un Negro Spiritual du Florida Normal and Industrial Institute Quartette gravé au milieu des années 20. Rien de rédhibitoire en soit, le Folk américain ayant bien emprunté au folklore des Iles Britanniques. Si à l’origine la chanson évoquait un train chargé à la gloire de Dieu, Peter Yarrow a pris le train en marche, à la manière de Bob Gibson quatre ans plus tôt. "It’s Raining" s’apparente à une chanson pour enfant pleine de métaphores. Si le Folk s’est inspiré des chansons britanniques et des chants d’églises, l’Old Time reste lui aussi une influence importante. "Cruel War" prend sa source sur un air du banjoïste Land Norris. Les banjoïstes Peter Steele, Obray Ramsey et Peggy Seeger (demi-sœur de Pete) avaient offert des variantes du titre changeant par-ci par-là quelques mots. Si la mélancolie est encore de la partie, le titre est à ranger dans le domaine de la Protest Song. La voix de Mary contribue à attrister la chanson. Suite à l’engagement du Président Bush dans sa campagne contre l’Afghanistan, les chanteuses Country Dolly PARTON et Patty Duke reprendront le morceau. "Autumn To May" s’apparente à une seconde comptine pour enfants. Cette fois-ci, le tandem Yarrow /Stookey délivre un tas d’allégories animales pour un titre d’une grande tendresse, repris par les sœurs Wilson, du groupe Heart, dans une compilation de chansons pour enfants dont les bénéfices étaient destinés à la recherche contre le virus HIV.

"I’m Nine Hundred Miles Away From Home", un vieux titre du violoniste Fiddlin’ John Carson remontant aux années 20, n’a cessé d’engendrer des petits : "Old Reuben", "Lonesome Whistle", "Train 45". "500 Miles" accrédité à la banjoïste Hedy West n’échappe pas à la règle avec cette belle histoire de voyageur sans un rond, loin de chez lui, se lamentant sur son sort. Si les Journeymen sont les premiers à l'enregistrer dans une veine Folk des plus édulcorée, notre trio en délivre quelques semaines plus tard un échantillon plus puissant. Chez nous autres gaulois, on a le train mais aussi des idées, le parolier Jacques Plante en fait une adaptation que Richard Anthony s’empresse de faire grimper dans notre hit-parade avec "J’entends siffler le train". Bien évidemment, cette adaptation sous forme de slow ou de chanson triste perd une grosse partie de son essence protestataire. Le trio s’attaque à "Bamboo", un inusité simple et répétitif de Dave Van Ronk, alors membre actif de la Libertarian League (un cercle anarchiste) et figure légendaire de Greenwich Village.
"If I Had My Way", accrédité au Révérend Gary Davis via "Samson And Delilah", prend en fait une partie de sa source dans une chanson de Blind Willie Johnson gravée en 1928 par la Columbia et dont le texte provient de versets bibliques. A travers l’histoire du géant Samson, le trio délivre une Protest Song sur une mélodie vitaminée pouvant rappeler l’ambiance des feux de camps. Terminons avec les trois pistes les plus connues. Si le Folk Boom américain a largement puisé dans les répertoires anglophones, il s’est aussi invité vers des destinations plus exotiques. "Lemon Tree" ⃰ ⃰ ⃰, célèbre titre de Will Holt, pose ses fondations sur "Meu limão, meu limoeiro", une chanson brésilienne d’avant-guerre remise au goût du jour par Wilson Simonal. Cette fois-ci, la chanson compare l’amour à un citronnier dont la fleur aussi magnifique soit-elle ne se mange pas. Si le KINGSTON TRIO avait le titre à son répertoire depuis plus d’un an, la version de PETER, PAUL AND MARY nous semble plus intense en raison de l’assemblage des trois voix. Le chant baryton de Paul vient en contrepoint du timbre ténor de Peter tandis que celui de Mary favorise nostalgie mais sagesse. Le titre connaît une seconde vie par l’entremise de l’acteur chanteur guitariste Trini LOPEZ. Composé en 1949 par SEEGER et Lee Hayes en soutien du Mouvement Progressiste, "The Hammer Song" enregistré par les WEAVERS ne connaît guère de succès. Transformée douze ans plus tard en "If I Had A Hammer", les paroles qui faisaient initialement référence au monde du travail et au syndicalisme, vont tomber dans l’escarcelle du Folk et puis du Mouvement pour les Droits Civiques initié par Martin Luther KING. Et comme tout va pour le meilleur des mondes, le titre tombe bientôt dans la besace d’insouciants cupides uniquement intéressés par l’appât du gain. C’est ainsi que la Motown en livre une version dansante via MARTHA & The VANDELLAS. Chez nous, un jeune blondinet se trémoussant comme un chiot pas encore sevré invite le monde à taper dans ses mains pour une invitation à la danse. Si la version des Weavers demeure la plus puissante, celle du trio a le mérite de grimper sur les plus hautes marches des classements mondiaux. Un titre qu’il est toujours agréable d’écouter, surtout au moment où le Président Trump vient d’être mis sous cloche après avoir pris un coup de marteau derrière les oreilles. Le dernier morceau avec un bel hommage à Pete SEEGER avec le poétique "Where Have All The Flowers Gone". Ecrit en 1955, ce standard du Folk comprenait trois strophes d’un livre de l’écrivain russe Michael Sholokov. Le folkloriste Joe Hickerson, longtemps responsable de la Library of Congress et grand ami de Seeger, adaptera trois versets de "Koloda Duda" une chanson cosaque. Au moment où les jeunes américains étaient envoyés combattre dans les méandres du Mekong, cette chanson anti-guerre connaissait un immense succès. Ces fleurs qu’on trouve de la naissance aux différents passages de la vie sont identiques à celles qu’on retrouve sur les tombes des soldats morts au combat. Francis Lemarque adapte la chanson sous le titre de "Où vont les fleurs ?", chantée par Marlene DIETRICH, Jacqueline François et Jean Jacques Debout. Lors d’une interview, Pete SEEGER déclarait qu’il avait une préférence pour la version de Marlene chantée en allemand.

Ce grand classique du Folk contient un bon tiers de titres transformés en standards, un tiers de titres solides devenus de vrais intemporels. Paradoxalement, si les harmonies vocales ne sont pas exceptionnelles, la combinaison des trois timbres de voix (contre-alto, ténor et baryton) et les changements de voix de tête viennent conforter le trio. Si soixante ans après leurs sorties, les paroles peuvent faire sourire, il suffit de se replonger dans le contexte de l’époque. PETER, PAUL AND MARY seront pendant une décennie les dignes successeurs de Pete SEEGER, Lee HAYES, Josh WHITE, Woody GUTHRIE et Cisco HOUSTON, avant que le registre s’essouffle. Ce disque a été réédité en vinyle en 2016 par WaxTime avec trois titres Live en bonus.

⃰ Titre homonyme à ceux de Roy MILTON, Sonny Boy WILLIAMSON, Bobby DARIN et The TOKENS.
⃰ ⃰ Titre homonyme à ceux des MCCOYS, PINK FLOYD et Mort SHUMAN.
⃰ ⃰ ⃰ Titre homonyme à celui du groupe allemand Fools Garden.
♠ Mary nous a quittés en 2009, victime d’une leucémie.

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- Peter Yarrow (chant, guitare)
- Paul Stookey (chant, guitare)
- Mary Travers (chant)


1. Early In The Morning
2. 500 Miles
3. Sorrow
4. This Train
5. Bamboo
6. It's Raining
7. If I Had My Way
8. Cruel War
9. Lemon Tree
10. If I Had A Hammer
11. Autumn To May
12. Where Have All The Flowers Gone



             



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