Depuis près de quatre ans, nous étions sans nouvelles de ZERO SHE FLIES et cela manquait, face au(x) durcissement(s) de la société. Cela dit, les réseaux sociaux deviennent tellement surchargés qu'un groupe ou un artiste n'a pas tort de se concentrer sur les publications qui apportent vraiment quelque chose d'abouti.

Le duo mené par Jamie Field (MERMAID KISS) et Maria Milewska revient avec un deuxième E.P de quatre chansons, moins conceptuel que The River (2015). La formule musicale ne saurait en être dénaturée, les chansons restent écrites à deux (seule "Cinnamon" vient de Jamie Field seul), Wendy Marks et Shane Webb sont toujours là en intervenants occasionnels.

Field cependant ne joue pas de guitare cette fois, le hautbois est absent et, hormis la basse de Webb sur trois titres, doublée par la contrebasse de Marks sur "Shimmers" ainsi que la guitare arpégée de Jeremy Robberechts (plutôt claviériste habituellement et basé à Bristol, tout comme Milewska) sur "Cinnamon", c'est la chanteuse qui tient tous les instruments.

Son goût pour le piano valsé, entendu sur d'anciennes compositions d'elle en solo ou avec ZERO SHE FLIES résonne dès l'introduction de "One Star", avec un caractère précieux. D'emblée, la chanteuse dévoile sa superbe, toute en mélancolie. Séparés sur les couplets, la voix et le piano se mettent au diapason lors des refrains, puis rentrent une nappe de synthé, la basse de Webb, des choeurs et des flûtes, enfin une batterie légère.

Le mixage un rien timide n'affecte pas la beauté d'une chanson qui se révèle la plus sombre de l'E.P, musicalement parlant, tout comme "Shimmers" avec ses arrangements similaires et tout aussi travaillés, des cymbales jazzy, du Mellotron et un effet nocturne supplémentaire. Quant aux paroles, elles se font mystiques, contemplatives, et si l'eau reste présente dans les thèmes comme en 2015 (on retrouve d'autres éléments pour coller de près à l'idée de ces « Nature Stories »), c'est surtout la femme qui est à l'honneur, comme sur The River, comme au temps de MERMAID KISS.

La grâce et la beauté de ces deux titres revêtent des habits printaniers et estivaux sur les deux autres. "Cinnamon" est habitée à sa façon par les émotions que fait passer Maria Milewska à travers son chant et par ses refrains d'une belle fraîcheur bucolique. Les paroles plus modernes de "Twisted" nous surprennent mais d'une manière convaincante, en faisant référence aux filles du XXIème siècle, la tendance au paraître décuplée par Internet et tout ce que cela peut cacher au fond des personnalités.

Milewska s'illustre encore sur ce dernier titre à travers une partition vocale plus bluesy, une instrumentation composée de batterie aux balais, piano Rhodes. Le ton est caressant, et jusqu'au dernier (très bel) accord en suspens, on a largement le temps de se convaincre que de tels artistes méritent de l'attention. La pochette offre un mélange de style assez coloré entre Milewska qui pose telle une princesse préraphaélite et une touche de surréalisme incarné par l'homme-cheval en arrière-plan, dose d'humour à l'anglaise quelque part et qui se prête rarement de la sorte au classicisme. Avec distinction, cette œuvre courte, "nouvelle musicale", donne envie d'y revenir !