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GRYPHON - Midnight Mushrumps (1974)
Par MARCO STIVELL le 8 Novembre 2018          Consultée 1066 fois

1974 est l'année la plus faste de GRYPHON. Deux disques – leurs meilleurs -, deux tournées en première partie de grands groupes (STEELEYE SPAN pour leur album Now We Are Six, puis YES pour Relayer). Midnight Mushrumps, en particulier, demeure emblématique du succès du groupe qui donne le seul et unique concert "rock", hors opéra/ballet et représentations de théâtre, de l'histoire du Old Vic (lieu de spectacles parmi les plus prestigieux de Londres) à ce jour. Ce dimanche de juillet 74 fait également date dans les grandes lignes du rock progressif, de même que ce deuxième album, souvent considéré comme leur meilleur.

Meilleur ne signifie pas chef-d'oeuvre, hélas. Midnight Mushrumps souffre du même problème que le premier album, avec une seconde face moins réussie, et même un écart encore plus grand avec la première en terme de qualité. GRYPHON est un groupe de surdoués qui ne peut éviter de surjouer parfois. En témoigne "Gulland Rock" qui n'a de rock que le nom. C'est une composition du bassoniste où celui-ci gère tous les instruments. Elle tient de la performance sans créer d'accroche réelle (sauf la partie douce à la flûte à bec et les couleurs jazz des claviers), alors que les thèmes s'enchaînent.

Il en va de même de "Dubbel Dutch" et de "The Last Flash of Gaberdine", morceaux extrêmement bavards d'un Graeme Taylor décidément peu en forme, malgré des parties de guitare intéressantes, à l'instar d'une poignée d'autres éléments. Il n'en va pas de même en revanche de la seule chanson du disque, "The Ploughboy's Dream", complainte traditionnelle où officie David Oberlé. Moment plein de grâce, dû à la voix claire du batteur/chanteur (on peut faire un parallèle avec le rôle qu'aura Kevin Conneff pour le CHIEFTAINS), aux harmonies avec Gulland qui se distingue dans les graves, aux orgues ainsi qu'aux tournebouts qui ressortent mieux qu'ailleurs, vraiment rares pour ce disque, contrairement au premier !

Sur "Dubbel Dutch", la basse du petit nouveau, Philippe Nestor, ressort elle aussi avec une classe certaine, de même que sur "Ethelion", véritable tour de force lui par contre et sur son entièreté, malgré les rires déments de l'intro qui annoncent un final humoristique, comme le premier album. C'est grandiose, débordant de thèmes passionnants, de percussions inspirées (Oberlé continue de vous rendre amoureux de la formule peaux + baguettes en soliste, quand vous ne l'êtes jamais ailleurs dans le rock), un duo basse/basson dans les aiguës splendide. La seconde face ne vaut donc vraiment que pour "Ethelion" et "The Ploughboy's Dream", par ailleurs les seuls efforts de tout le groupe conjointement en composition et en arrangement.

Concentrons-nous donc sur cette face A qui fait l'attrait principal, pour ne pas dire la qualité de l'album en entier : "Midnight Mushrumps", pierre angulaire de la musique progressive qui a charmé Steve Howe de YES et tant d'autres cadors du genre, jusqu'à Mike OLDFIELD sans aucun doute. Richard Harvey, dont nous n'avons pas parlé jusque là, est, tel un Tony Banks version GRYPHON, seul responsable de ce qui pourrait être sous-titré "Symphonie de 19 minutes pour claviers et instruments folk anglais". Le parallèle avec le maestro de GENESIS n'est pas incongru dans le sens où Harvey, mieux que ses flûtes et tournebouts habituels, réalise un travail colossal aux touches noires et blanches, "reed and pipe organs" (re-coucou Mike OLDFIELD !), harmonium, clavecin Elka, piano-jouet, glockenspiel électronique.

Dès l'introduction, nous sommes happés par la chaleur d'une mélodie royale, survolée par le basson de Brian Gulland, pointe de fragilité et de nostalgie qui atteint sa cible directe. Plus tard, rentrent des arpèges de guitare merveilleux par Greame Taylor, des flûtes et percussions pour musique de parade, des airs graves d'orgue et de basse, des clavecins festifs, des pianos électriques classisants et féériques, des explosions orchestrales basées sur des accords à la Henry PURCELL (les fameuses "Funérailles de la Reine Mary" reprises pour Orange Mécanique, le film de Kubrick), et même une partie funk-folk avant la fin.

Cet enchaînement instrumental de mélodies douces et belles à en donner des frissons et d'autres plus égayantes, ce mélange d'éléments sacrés et populaires, est une réussite absolue. Elle vaut bien un Thick as a Brick de JETHRO TULL, pour rester à un niveau de maîtrise comparable dans le domaine progressif en vogue, et aussi celui de l'exaltation créée pour l'auditeur. Rien de blues, pas grand-chose de rock, on pense toutefois que ce que l'Afrique et l'Inde ont apporté au rythme en musique, l'Europe (notamment l'Angleterre et les pays celtes) en fait autant d'un point de vue mélodique. Sachant que "Midnight Mushrumps" est d'abord une musique de commande destinée à une représentation théâtrale de La Tempête, une des dernières oeuvres de William Shakespeare, et qui reçoit un accueil plus que favorable, d'où sa présence obligatoire au Old Vic Theatre.

Comment employer la contrainte et la rigueur occidentales dans un ensemble qui respire la liberté et la puissance ? On en trouve ici une belle leçon, par un groupe qui possède un son bien à lui au coeur d'un style de musique génial et fourmillant. Bravo Richard Harvey, bravo GRYPHON !

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   MARCO STIVELL

 
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- Richard Harvey (claviers divers, flûtes à bec, tournebouts)
- Brian Gulland (basson, tournebout basse, flûte à bec, choeurs)
- Graeme Taylor (guitares acoustiques, classique et électrique)
- David Oberlé (batterie, timbales, percussions, chant)
- Philip Nestor (basse, choeurs)


1. Midnight Mushrumps
2. The Plough-boy's Dream
3. The Last Flash Of Gaberdine
4. Gulland Rock
5. Dubbel Dutch
6. Ethelion



             



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