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BURNIN RED IVANHOE - Burnin Red Ivanhoe (1970)
Par LE KINGBEE le 5 Juin 2021          Consultée 756 fois

En Scandinavie, le Danemark a longtemps fait figure de parent pauvre dans le registre du Rock post sixties. Avouons, sans pour autant se flageller plus que nécessaire, que le niveau du Prog danois se situait à des années lumière d’une production hexagonale aussi insignifiante qu’affligeante. On ne parle pas ici de culture musicale, c’est là une autre thématique !

Dès la fin des sixties, le Danemark voyait se propulser de nombreux petits groupes mêlant Prog. Rock et Jazz Psyché, des formations inconnues chez nous, nos radios et nos deux chaines de télé nous repassant la même bande de guignols, des produits musicalement sans grand intérêt. Le Danemark qui pouvait, contrairement à nous, compter sur sa facilité à manier l’anglais avait déjà deux ou trois marches d’avance.

Nous sommes en 1967, Karsten Vogel, alors étudiant à Copenhague, est un fondu de littérature, passionné de Jazz et de Rock. Suite à sa rencontre avec Niels Wille, un parolier capable de manier l’anglais et le danois, Vogel décide de monter un groupe. Après un premier double-album "M 144" comprenant un disque chanté en anglais et un second en danois, le groupe se stabilise autour du guitariste Ole Fick, du batteur Bo Thridge Andersen (ancien équipier de Hugh Steinmetz), de Kim Menzer un redoutable multi-instrumentiste et enfin du bassiste Jess Staehr (ex-Maniacs, Day Of Phoenix). Ce curieux assemblage constitué à première vue de bric-et-de-broc se révèle vite un atout. Les influences diverses des différents membres se recoupent autour d’une combinaison hybride de Rock Prog à consonance jazzy et bluesy. Le groupe se produit d’abord sous le nom de M S Mitte avant de se transformer en BURNIN RED IVANHOE, nom tiré d’une compo' de Niels Wille.
En décembre 68, le groupe se fait remarquer en première partie d’un concert de SPOOKY TOOTH et décroche un contrat avec Sonet. Si la formation enregistre un premier double-album en 69, une première pour un groupe danois, c’est avec ce second opus éponyme que le groupe se fait remarquer dans toute la Scandinavie, le Benelux, l’Allemagne et l’Angleterre. A peu prêt partout, sauf chez nous où les radios nous ressassent "L’Amérique" (Dassin), "Les Bals Populaires" (Sardou) tandis que des couples se font et se défont sur "Adieu Jolie Candy" ⃰. On est à la bourre comme souvent.

Suite à une tournée passant par l’Angleterre, Sonet propose une captation enregistrée à Londres, dans les studios de la CBS. Cet éponyme propose six originaux. Karsten Vogel demeure l’unique pourvoyeur de la face B, tandis qu’il a coécrit les trois titres de la face A avec différents membres du band, Vogel s’annonçant comme le grand maitre d’œuvre ou l’âme pensante du band.
La pochette ne renseigne guère sur le contenu : on y voit cinq jeunes assis par terre devant un bosquet. On doit ce visuel à Poul Bruun, photographe designer attitré chez Sonet, qui se fera connaitre plus tard comme producteur chez CBS et patron du label Medley Records. Karsten Vogel est à l’extrême droite, Kim Menzer complètement à gauche.

D’entrée, on est comme entraînés dans une folle course un peu baroque avec "Across The Windowsill" , un long titre de presque huit minutes dans lequel viennent s’emberlificoter Prog, Rock, Psy. Parfaitement maitrisé d’un bout à l’autre, ce premier jet étonne par l’assemblage d’instruments inattendus (flûte, saxophones, trombone et guimbarde), une combinaison qui pourrait presque sonner folklorique. S’ensuit l’ahurissant "Cannaltrip", un instrumental dans lequel fusionnent une guitare folk 12 cordes et un saxophone jazzy apportant son lot de douceur. Un titre qui pourrait se résumer en une rencontre entre Paul DESMOND et PINK FLOYD. Cette face A se clôt en apothéose avec "Rotating Irons", un long Prog Blues avoisinant les 9 minutes. Le tempo extrêmement lent nous enveloppe d’une belle torpeur, l’harmonica de Menzer offre une solide fondation sur laquelle la guitare et le chant d’Ole Fick peuvent se poser en toute confiance. Un morceau long mais qui passe comme une lettre à la Poste. Sur le plan mélodique, le titre évoque par moment le "Season Of The Witch" de DONOVAN.

La face B s’ouvre sur un instrumental des plus curieux, "Gong-Gong The Elephant Song". Une sorte de cor des Alpes ouvre les hostilités pendant une cinquantaine de secondes, amenant ainsi un décor singulier. L’instrument est relayé par un saxophone et un trombone sur une grosse ligne de basse tandis qu’un harmonica strident fait son apparition. Si le morceau était jusqu’alors ancré dans une teinte Rock Psy, la seconde moitié bifurque vers un registre conjuguant Free et Jazz d’avant-garde. "Near The Sea" se révèle le maillon le plus faible. Il y en a souvent un dans un disque. On retient la sonorité de la guitare agrémentée d’une flûte pour un titre qui pourrait s’insérer entre IF, OUT OF FOCUS et CARAVAN. Le disque s’achève sur une longue (10 minutes) transmission de Jazz Prog aux émanations avant-gardistes dans laquelle le saxophone et le trombone se tirent une incroyable bourre alors que les baguettes d’Andersen martèlent un rythme sans concession.

Aujourd’hui encore, ce second disque de Burnin Red Ivanhoe (quel nom !) peut être considéré comme un précurseur de la montée du Prog Jazz scandinave. Karsten Vogel a contribué à favoriser l’émergence de nombreuses petites formations méconnues de notre contrée œuvrant entre Prog, Jazz Rock, Psyché, Krautrock et Canterbury (The Savage Rose, Pan formé à l’instigation du français Robert Lelièvre, Alrune Road, Hurdy Gurdy, Gasolin ou Culpeper’s Orchard pour ne citer que les plus emblématiques). Si le combo donne parfois l’impression de ne pas savoir où il va, l’improvisation n’étant ici pas négligeable, la jonction des différents instruments, la qualité des mélodies et des influences bigarrées proposant de brèves colorations folkloriques débouchent sur un disque particulièrement captivant et cohérent. Si la face A frise la note maximale, la seconde s’avère moins goûteuse avec un 3. Note réelle 4, soit la moyenne des deux faces.

Ce disque connaît plusieurs pressages : Warner, Telefunken et Stateside France (filiale d’EMI) le publient suite à un accord commercial avec Sonet. En 2020, le label français Long Hair spécialisé dans la réédition a édité le vinyle avec le visuel d’origine mais une nouvelle pochette intérieure.

⃰ Il s’agit des premiers exemples me venant à l’esprit. Nul doute qu’on puisse trouver bien pire.

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   LE KINGBEE

 
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- Karsten Vogel (saxophone, orgue)
- Ole Fick (chant, guitare)
- Jess Staehr (basse)
- Bo Thrige Andersen (batterie, percussions)
- Kim Menzer (harmonica, cor, flûte, trombone, saxophone, guimba)


1. Across The Windowsill
2. Canaltrip
3. Rotating Irons
4. Gong-gong The Elephant Song
5. Near The Sea
6. Secret Oyster Service



             



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