Le moins que l’on puisse dire c’est que BIGA RANX n’est pas resté inactif ces derniers temps.
En effet, il nous revient avec son troisième album en trois années, auxquels peuvent s'ajouter quelques projets annexes. Et, après Sunset Cassette en 2020, et St.Soleil en 2021, le revoilà avec ce Eh Yo! toujours d’aussi bonne facture.
On peut même considérer que le tourangeau confirme le niveau de qualité qui figurait sur 1988 et St.Soleil, à mon sens, deux de ses albums phares.
Car si le style n’a pas changé, il en est de même de la capacité qu’à BIGA RANX à nous pondre des titres qui réussissent à conjuguer efficacité, personnalité et professionnalisme.
Pour ce qui est du style, il pratique toujours ce Vapor Dub dynamique. Une sorte de Reggae électronique et moderne qui fait la part belle aux mélodies planantes et aux rythmiques expérimentales.
Et il le fait très bien !

Comme il en a l’habitude, le chanteur s’est entouré d’une pléiade de partenaires de jeux qui viennent l’aider à enrichir son propos. Certains sont des habitués. C’est ainsi le cas du DJ et Producteur Atili BANDALERO, qui est accessoirement son frère, et qui participe au très dance et lumineux "7 Days". Sur l’excellent "Montpellier" c'est le touche à tout BLUNDETTO qui vient aider son compère à pondre un titre imparable, propulsé par une diction d’une efficace clarté. Dommage que le texte, qui semble évoquer la DDASS qui par le passé gérait les enfants en détresse, se révèle un peu trop obscur. Mais le riddim est si convaincant que cela n’est pas bien grave.
Sur "Bruce Wayne", c’est Lil'SLOW, déjà présent sur Sunset Cassette, qui apporte sa touche pour un morceau doté d'un riddim lourd et nonchalant.
JAEL, qui a récemment assuré sa premières partie sur plusieurs dates, participe aux plus rugueux et incisifs "Ice in Cool" et "Illegal Dance". Deux titres chantés en anglais et qui reposent sur des rythmiques plus "rentre-dedans".
Ces apports divers permettent à Eh Yo! de couvrir une palette assez large de styles. L’artiste se frottant aussi bien au Vapor Dub, qu’au Digital Reggae et au Stepper. Alors soit, pour des non initiés ses frontières sont bien ténues, mais cela permet tout de même de rendre le propos de BIGA RANX vivant et captivant.

Une diversité que l'on retrouve dans l'usage des langues. Ainsi, alors que l’album est majoritairement chanté en français, "Como esta", le morceau partagé avec Aitor LYON & MOISTUNE, est l’occasion pour BIGA RANX de se frotter à l’espagnol.
Mais le bonhomme est également à même de nous pondre des morceaux imparables sans aide extérieure, comme il le prouve avec cet excellent hymne caché (même pour lui) à Lamotte Beuvron : "Tarte Tatin".

La qualité du son et des instrus, l’utilisation fluide et harmonieuse des rythmiques et des gimmicks sonores permettent à BIGA RANX de survoler son sujet et de nous emporter pour une immersion complète et jouissive dans son Reggae Dub. Sa maitrise technique étant habilement mise au service de son inspiration artistique.
Le seul petit défaut que je relèverais concerne les textes qui manquent trop souvent de clarté et de profondeur, à l’image de l’étrange "Bruce Wayne" qui ne semble pas donner dans la biographie de Batman.
C’est à mon sens un des rares axes de progression de BIGA RANX.
Pour le reste nous n’avons qu’à nous réjouir de le voir aligner les albums marquants avec une telle facilité apparente.