S’il avait tardé à donner une suite à l’excellent 1988 parut en 2017, le tourangeau semble pris de soudaine boulimie. Après Sunset Cassette sorti en 2020, il attaque le printemps 2021 pied au plancher.
En effet, après le mashup entre le "Zimbabwe" de Bob MARLEY, et le "Boys Don’t Cry" de THE CURE réalisé pour Radio NOVA à l’occasion du quarantième anniversaire du décès de l’icône Reggae, puis du Concert volant capturé par ARTE à L’institut du Monde Arabe, voilà qu’il nous offre St Soleil, son nouvel album.
Présenté comme un mini album, une mixtape, ce St Soleil se veut la suite de Sunset Cassette, une expression assez spontanée et variée des univers de BIGA RANX.

Ce dernier est accompagné de ses complices habituels : l’indétrônable Blundetto, le compositeur et beatmaker Lil’slow, et les arrangeurs Art-X et Black Ship. Le disque commence par un duo avec Jean-Prosper Dauphin, alias BEKEN. Le chanteur haïtien pose sa voix grave et lourde sur "Ma croix" pour un résultat très réussi. Dans un style plus habituel pour lui (ce "skibidibidip" en intro est quasiment sa signature), "La lune" est tout aussi réjouissant. On y retrouve ce mélange de Reggae et de Dub électro qui lui est cher. Cette ambiance qui, paradoxalement, parvient tout à la fois à se montrer hyper rythmée et alanguie.

La suite est plus surprenante, puisquril s’agit d’une relecture du tube des KORGIS, "Everybody’s Got To Learn" (The Korgis, 1979), renommé ici "Gotta Learn" et qui se voit enrichi d’un tempo Reggae bien lourd. Le son est massif, taillé pour les DanceFloors, "Mad Move" me fait moins vibrer. Non que le morceau soit mauvais, mais il ne parvient pas à me procurer le même frisson immédiat que les autres titres de St Soleil. Ce sentiment très personnel est certainement dû à un centre d’équilibre qui l’éloigne un peu trop du Reggae pour lorgner vers des univers plus Electro.

Car dès "Big Plane" et son riddim implacable je retrouve ce groove imparable et ce sentiment d’être emporté dans par un rouleau rythmique inéluctable qui ne fait de petites pause que pour nous laisser planer de courts instants. Brillant ! Un côté planant que l’on peut retrouver sur "Berlin Everything" qui possède certaines connexions avec l’univers Intelligent Drum & Bass de LTJ BUKEM. On flotte agréablement sur des nuages Electro propices à l’évasion spirituelle.

L’album s’achève avec "Ma petite ville", un titre chanté en français dans lequel évoque sa ville natale. Si le morceau est séduisant efficace, il est un peu dommage que la voix soit gérée comme un instrument de musique et que l’écho ne permette pas une parfaite compréhension de ses propos. On a un peu le sentiment que la teneur des textes n’est pas la préoccupation première de BIGA RANX qui semble plus s’attacher à leur musicalité et l’impact de son flow. Et on ne peut pas nier que son chant est très percutant et caractéristique.

Si St Soleil est un album relativement court, il se révèle très intéressant notamment du fait de sa densité et de sa qualité. BIGA RANX nous offre encore un beau voyage, très chaleureux.