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B.O FILMS/SERIES

1976 Carrie
1980 Dressed To Kill

COMPILATIONS

1989 Love And Menace
 

- Style : Bernard Herrmann
- Membre : Bande Originale De Film

Pino DONAGGIO - Love And Menace (1989)
Par AIGLE BLANC le 26 Mars 2023          Consultée 672 fois

Des cinéastes américains de sa génération (Francis-Ford COPPOLA, Steven SPIELBERG, George LUCAS ou Martin SCORCESE), Brian DePALMA est celui sur qui l'oeuvre d'Alfred HITCHCOCK a produit la plus forte impression, au point que certains critiques ont pu reprocher à ses thrillers de n'être que des copies serviles du maître du suspens. Cette assertion me semble d'autant plus injuste que non seulement DePALMA n'a jamais nié l'inspiration qu'est pour lui le réalisateur de Psycho, mais n'a de plus eu de cesse de revendiquer son influence. Si la servilité n'est pas le terme adéquat pour caractériser ses thrillers, c'est en raison de la perfection de leur mise en scène. En effet, s'il a profondément étudié le style d'HITCHCOCK et sa manière si personnelle de susciter le suspens, il s'est servi des leçons du maître non pour simplement les appliquer mais davantage pour les développer et les conduire jusqu'à leur acmée émotionnelle et artistique. J'ai beau aimer passionnément Psycho, Vertigo et The Birds, aucune séquence hitchcockienne ne me paraît aussi parfaite dans la gestion du suspens que la scène de bal de Carrie. Certes, HITCHCOCK a fixé les bases du suspens au cinéma, mais DePALMA a eu l'intelligence de les améliorer jusqu'à leur quasi-perfection.
Lorsqu'il réalise Sisters (1974), son premier grand film en dehors du circuit underground, il n'est guère étonnant qu'il se tourne vers Bernard HERMANN pour en composer la musique. Le compositeur attitré d'HITCHCOK a su, mieux que quiconque, magnifier les idées de mise en scène du réalisateur de Vertigo. Et DePalma lui offre à son tour un écrin sur lequel poser sa musique hypertendue. Dès leur second film, Obsession, il n'en faut pas plus pour que leur collaboration atteigne des sommets de beauté vénéneuse qui égalent à mon sens ceux de Vertigo.
Hélas, à la mort de Bernard HERMANN, DePalma devenu orphelin se voit privé du musicien idéal à l'expression de son art cinématographique. A l'occasion de non nouveau film, Carrie, il lui faut donc remplacer l'irremplaçable. Un collègue l'invite alors à visionner le film anglais Don't Look Now (1973) de Nicolas ROEG (très bon thriller au demeurant) avec Donald Sutherland et Julie Christie, adaptation d'une nouvelle de l'écrivaine Daphné du MAURIER, auteure dont Alfred HITCHCOCK avait adapté trois oeuvres, et pas des moindres, (L'auberge de la Jamaïque, Rebecca et Les oiseaux. La bande originale de Don't Look Now, d'un certain Pino DONAGGIO, séduit tant DePALMA que celui-ci engage sur le champ le compositeur italien. Et grand bien lui en a pris car le miracle se produit : Carrie scelle en effet le début d'une collaboration fructueuse, devenue à son tour mythique, et qui aura l'occasion de s'épanouir à six reprises.
De la même façon que le cinéaste américain s'est vu reprocher son style trop inspiré d'HITCHCOCK, Pino DONAGGIO est apparu aux oreilles de certains critiques comme un simple épigone de Bernard HERMANN. Il est évident que sa musique orchestrale évolue sur les bases de celle d'HERMANN mais, une fois admise cette réalité, il faudrait être sourd pour ne pas se laisser gagner par l'admiration devant un compositeur, certes sous influence, mais si génial en définitive.

Pour vous convaincre du génie 'supposé' de Pino DONAGGIO, peut-être pourriez-vous jeter vos deux oreilles sur la compilation chroniquée en ces lignes. Love and Menace offre l'opportunité unique de découvrir en un seul CD la quasi intégralité de la collaboration DONAGGIO-DePALMA, les deux films non représentés (Raising Caïn-'L'esprit de Caïn' (1992) et Passion (2012) étant postérieurs à l'année de sortie (1989) de cette rétrospective. A ce titre, une réédition remise à jour par le label MILAN est parue en 1994, intégrant deux titres extraits de la B.O de Raising Caïn, mais ce n'est pas la version concernée par cette chronique.
Le constat est indéniable : cet excellente sélection démontre, si besoin en était, l'étourdissant talent du compositeur italien qui améliore la recette établie pourtant par le non moins immense HERMANN. Les années 70 et 80 savaient encore proposer des scores orchestraux de toute beauté et, dans ce registre, DONAGGIO impose sa patte unique, dosage subtil de motifs séquencés, dont les boucles conduisent aux confins de la folie de-palmesque, de crissements d'archets dans la veine expérimentale, le tout saupoudré d'une recherche mélodique constante, ce qui, appliqué à ce style de musique axé sur le suspens, n'est pas aussi facile qu'on pourrait le penser.
La grande force de la musique de DONAGGIO, c'est son art à faire cohabiter sensualité et menace, érotisme et violence, Eros et Thanatos ; c'est ce qui explique peut-être l'osmose entre ses partitions et les images de DePalma, cinéaste jouant sur la confrontation de la sensualité et de l'horreur. Dans ses thrillers, les scènes de meurtres sont filmées avec le faste d'un opéra baroque tandis que les scènes d'amour le sont avec l'aspect tranchant d'un rasoir. Cette dualité qui vire à la dialectique fait tout le fruit de titres tels "Contest Winners" (Carrie, 1977), "The Shower" (Dressed to Kill, 1980) et "Love and Menace" Body Double dont le lyrisme le dispute à l'agressivité de certaines attaques d'archets, bousculant les repères de l'auditeur malmené entre l'émotion de mélodies souvent sublimes ("For the Last Time We'll Pay" -Carrie) / "Prelude" – Blow Out / "Love and Menace") et l'accélération de l'adrénaline quand l'orchestre s'emballe jusqu'à frôler la dissonance, mais sans jamais l'atteindre pleinement, ce qui maintient les partitions de DONAGGIO pour les thrillers de DePALMA dans l'axe d'une musique relativement accessible mais jamais simpliste pour autant.
Des sommets, cette rétrospective en contient à la pelle avec peut-être une prédominance dans l'excellence de la B.O de Body Double, dernière collaboration 'importante' de DONAGGIO-DePALMA, qui porte à incandescence la recette magique du compositeur, tout en y intégrant, année 1984 oblige, l'usage de synthétiseurs, sans que cette concession aux années 80 ne sonne aujourd'hui trop kitsch. Le titre "Body Double", bâti sur une séquence fluide proche de TANGERINE DREAM, auquel le génie de DONAGGIO adjoint les vocalises sucrées d'une voix féminine ultra-sensuelle, constitue même une merveille d'érotisme éthérée teintée d'une grâce vicieuse comme le cinéaste les affectionne dans ses thrillers les plus personnels.
Mais il serait injuste de ne pas mentionner "The Museum", indéniablement la composition la plus parfaite de DONAGGIO, où l'orchestre se lance dans une valse vertigineuse au crescendo ahurissant, le tout accompagnant la sublime scène du musée de Dressed to Kill-'Pulsion').

A la relecture, il m'apparaît que, à l'inverse de beaucoup de musiques de films, les partitions de Pino DONAGGIO se passent assez bien des images qu'elles sont pourtant censé servir. L'écoute au casque chez soi n'atténue en rien l'intérêt que l'on peut porter à des compositions solides et inspirées, toujours gratifiées du supplément d'âme qui fait souvent la différence avec le caractère automatique de certaines B.O qui soulignent certes leurs images, mais sans jamais les transcender.
Bien que reconnu, le talent de DONAGGIO me semble aujourd'hui encore par trop sous-estimé. Il n'est jamais trop tard pour réhabiliter un artiste de sa trempe. Et son apport non négligeable au septième art éclatera un jour aux oreilles qui savent trier le bon grain de l'ivraie.

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   AIGLE BLANC

 
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- Pino Donaggio (compositions)
- Natale Massara (direction orchestrale)
- Orchestre Symphonique De Milan (orchestre)


- carrie (1977)
1. Contest Winners
2. Bucket Of Blood
3. For The Last Time We'll Pay
- home Movies (1980)
4. Main Title Theme
- dressed To Kill (1980)
5. The Shower
6. The Museum
7. Liz And Peter
8. The Transformation-the Storm-the Revelation
- blow Out (1981)
9. Prelude
10. Blow Out
11. Fire Works
12. Sally's Death
- body Double (1984)
13. Claustrophoby
14. Love And Menace
15. Drill Of Death
16. Mental Chase
17. Brain Hunt
18. Body Double



             



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