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JAZZ EXPéRIMENTAL  |  B.O FILM/SERIE

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- Style : Miles Davis
- Membre : Bande Originale De Film
- Style + Membre : Edda Dell'orso

Ennio MORRICONE - L'uccello Dalle Piume Di Cristallo (1970)
Par AIGLE BLANC le 21 Janvier 2017          Consultée 2304 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

GOBLIN est le premier groupe qui vient à l'esprit quand on évoque la filmographie de Dario Argento. Le groupe de rock progressif italien a signé en effet les B;O de Profondo Rosso (1975) et surtout de Suspiria (1977), deux travaux d'auguste mémoire et révolutionnaires en leur temps, auxquels se greffe dans une moindre mesure leur version 80's de Tenebra (1982). Pourtant, les trois premiers films de Dario Argento, considérés comme sa trilogie animale, L'Oiseau au Plumage de Cristal (1970), Le Chat à Neuf Queues (1971) et Quatre Mouches de Velours Gris (1972), ont été mis en musique par le maître Ennio MORRICONE, travaux malheureusement assez méconnus aujourd'hui alors qu'ils sont d'une qualité remarquable.
Entre 1970 et 1975, le compositeur traverse sa période giallo (thriller italien) à laquelle il applique une recette imparable. Evoluant dans un registre jazz plus ou moins expérimental, sa musique délivre une tension extrême à peine adoucie par un thème romantique par-ci par-là.

Pour L'Oiseau au Plumage de Cristal, E. MORRICONE anticipe une trouvaille qui deviendra la signature des GOBLIN, à savoir un traitement pervers qui transforme une simple comptine en un monument d'ambiguïté, source d'inquiétude. Le titre d'ouverture, "Piume di Cristallo", subit ce traitement : une ligne mélodique volontairement simple, un chant féminin enjôleur repris bientôt par un ensemble vocal réduit qui semble bien approximatif. Des tintements cristallins ponctuant l'arrière-plan apportent une délicate touche onirique, et le tour est joué. De l'étrange maladresse du choeur, point une inquiétude qui se glisse dans les interstices de cette fausse comptine. Le chant solo est-il celui de la divine Edda Dell'Orso ? Le livret ne le mentionne malheureusement pas. Mais, étant donné l'importance qu'eut pour MORRICONE la découverte de cette chanteuse atypique, l'absence de crédit à ce propos semble suggérer que ce n'est pas elle qui officie au sein de cette B.O.
Pour l'essentiel, la musique de L'Oiseau au Plumage de Cristal évolue sur des terres sournoises, franchement expérimentales, comme dans "Svolta Drammatica" aux bruitages proches de la musique concrète ou dans "Corsa Sui Tetti" où le jeu frénétique des batteries et les pulsations cardiaques d'une trompette wah-wah se mêlent à des voix trafiquées qui traversent l'espace sonore à la manière d'un girophare tandis que des halètements féminins intensifient la dimension anxiogène d'un titre perturbant. L'orchestre conduit par Bruno Nicolai, le fidèle ami d'E. MORRICONE, privilégie la basse pincée, les percussions tubulaires ou cristallines, les gongs, les notes d'un piano étrange probablement préparé*, une trompette bouchée aux interventions sporadiques proches de celles, psychédéliques, de Miles DAVIS à la même époque et probablement jouée par MORRICONE lui-même, diplômé de trompette à l'académie nationale de Rome en 1946.
L'anxiété générée par cette démarche abstraite, qui consiste à laisser l'improvisation guider les instruments, sans aucune véritable hiérarchie de l'un sur l'autre, est rendue par de nombreux passages 'en sourdine', quelquefois aux limites du minimalisme, où les sons naissent et meurent dans un espace infini qui accroît le sentiment de solitude. A cet égard, le titre "L'Uccello dalle Piume di Cristallo" est un sommet d'intensité du point de vue de l'adrénaline qu'il exsude : des gémissements féminins, entre le plaisir et la douleur, l'orgasme et la torture, sont ponctués par une basse cardiaque oppressante.
Comme dans la plupart des gialli italiens des 70's débutantes, cette B.O s'octroie une plage sentimentale accompagnant généralement la scène amoureuse entre les deux protagonistes principaux. Autant les scènes de meurtres ne ménagent en aucune façon les nerfs du spectateur et de l'auditeur, autant la scène sentimentale plonge franchement dans la romance kitsch, la musique dès lors se faisant l'écho d'une approche quelque peu mièvre mais totalement assumée. MORRICONE n'échappe pas à cette tradition quand il compose "Non Rimane Piu Nessuno" dans un style voisin du grand Nino ROTA. L'orchestre sirupeux et les choeurs très "côte d'azuriens" semblent alors déplier les joies de la dolce vita. Ce qui pourrait passer pour une faute de goût, tant cela brise l'atmosphère globale de l'album, doit être considéré avec un sourire amusé et bienveillant, celui qui ravive une époque révolue quand on croyait encore, par les pouvoirs du cinéma, aux vertus communautaires des clichés aujourd'hui les plus éculés.


*piano préparé : Il s'agit d'un piano dont le musicien détourne la fonction de certaines cordes en y appliquant toutes sortes d'objets qui vont en entraver l'usage donc le son.

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   AIGLE BLANC

 
  N/A



- Ennio Morricone (compositions, orchestrations)
- Bruno Nicolai (direction orchestrale)


1. Piume Di Cristallo
2. Non Rimane Più Nessuno
3. Corsa Sui Tetti
4. Se Sei Stonato
5. Svolta Drammatica
6. Fraseggio Senza Struttura
7. La Città Si Risveglia
8. L'uccello Dalle Piume Di Cristallo
9. Silenzio Nel Caos
10. Violenza Inattesa



             



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