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VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  B.O FILM/SERIE

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Eric DEMARSAN - L'ibis Rouge (mocky) (1975)
Par MARCO STIVELL le 27 Mars 2023          Consultée 315 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

L'Ibis Rouge, ou quand Jean-Pierre Mocky, s'inspirant d'un fait réel et d'un roman tous deux américains, parvient à rendre léger et drôle le sujet d'un névrosé, tueur en série étrangleur de femmes. Cela peut choquer, mais c'est la réalité ! Même si ce n'est pas le rôle le plus emblématique de Michel Serrault (qui a d'autres comédies flamboyantes et détachées des femmes au même moment), il le gère de main maître ; pléonasme me direz-vous. Surtout qu'à côté, il y a Michel Galabru, aux prises avec des malfrats à qui il doit de l'argent, et dont la femme, très jolie Evelyne Buyle (Comment Réussir Quand On Est Con et Pleunichard de Michel Audiard, future Maryvonne de la série Louis La Brocante), avec un petit côté Elizabeth Hurley française et avant l'heure, veut divorcer tout en profitant de lui, le garder pour ami. 1975, c'est l'époque de la libération des femmes... et le grand chambardement dans les couples mariés !

Plus inattendu : Michel Simon en 'Zizi' (hommage au libertinage de l'acteur ?), vendeur de kiosque à journaux, de prime abord gros raciste envers des Grecs qui ont un restaurant voisin typique, mais qui n'aime personne autant que le jeune Africain qui cherche sa compagnie. Ce personnage croustillant parle d'une maison à vendre mais qu'il n'a peut-être pas en fait, et ne cesse de narguer femmes comme flics en clamant qu'il est l'étrangleur, alors que ce n'est pas le cas. La présence de Simon et son faciès grêlé s'est révélée décisive pour Mocky, celui-ci ayant voulu respecter le vœu de l'acteur à ce que le film tienne place dans les quartiers situés le long du canal de l'Ourcq, qu'il affectionnait beaucoup. Et la symbolique reste d'autant plus forte que c'est le tout dernier film de Michel Simon, décédé d'une embolie au mois de mai.

Policier et populaire, avec une BO digne de ce nom et pourtant peu représentative, sauf du 'populaire' justement. Eric DEMARSAN, croisé pour le très bon L'Ombre d'une Chance (1973), est de nouveau préposé à la musique, pour un résultat qui semble d'abord traditionnel au possible, avec ce générique en valse populaire à l'ancienne, très Montmartre dans l'esprit. Du Mocky pur jus en notes mais avec une originalité certaine dans l'orchestration, avec cette mélodie fofolle jouée à la scie musicale qui suit de près un célesta sur des roulements de guitare classique. C'est léger, frivole et passionné en même temps ; on s'en délecte et on sait d'emblée qu'on y aura souvent droit au cours de l'heure vingt qui suit. Toutefois, cela arrive assez, dans le sens suffisant, juste ce qu'il faut pour éviter l'écœurement !

Une des raisons à cela, c'est parce que tout en suivant nos trois Michel qui ne se connaissent pas ou peu mais se retrouvent à force de drôleries et de quiproquos, DEMARSAN s'amuse comme un gamin et nous procure un plaisir de fou. Comme si Mocky lui avait dit "Carte blanche, vous faites ce que vous voulez quand vous voulez". Il a son célesta sous la main, mais aussi son Fender Rhodes, et dans les moments de calme aussi bien que les courses-poursuites, il passe de l'un à l'autre, mêle les deux, triture le thème principal et fournit des variations, avec ou sans scie, parfois en ajoutant une harpe et en augmentant le tempo quand il suit Galabru notamment. Il y a aussi, tantôt, une version militaire du thème (très savoureuse) et une autre 'manège'. C'est assez jubilatoire, du moins au cours des deux premiers tiers du film puisque la fin revient à un schéma plus classique.

L'Ibis Rouge, tenant son nom de l'écharpe que porte Serrault, est un film noir totalement décalé ou presque et c'est en partie ce qui fait sa réussite. On voit bien une scène d'étranglement au début, mais un peu plus loin dans le film, une autre femme que Serrault agresse chez elle parvient à se dégager et lui percer la main avec sa machine à coudre. Pendant ce temps, DEMARSAN joue une musique des plus tendres, et on se délecte de l'ensemble ! Il n'y a pas que cela bien sûr : le tendre et mignon célesta se remet au diapason des sentiments de notre Serrault dès qu'il se sent seul, alors que ses amis eux aussi misogynes rigolent avec des femmes en parlant d'étranglement devant lui. Violon, accordéon et saxophone alto complètent d'ailleurs l'orchestration atypique.

Autres moments de choix, le piano latin pour la scène du cabaret, et le tango pour le couple Buyle-Galabru enlacé dans la rue ou en pleine dispute chez eux - Galabru qui, pour calmer ses créanciers, en vient tout de même au casse avec collant sur la tête ! Et pour compléter la fête populaire avec une autre pointe d'exotisme, parlons de ce qui ne figure assurément pas sur le single de la BO, à savoir les thèmes du restaurant grec, très richement rythmés par le bouzouki, en arpèges rapides et en danse de sirtaki ou autre sur de longues minutes.

Bref, c'est festif, franchement excellent malgré une baisse de régime sur la fin et un peu de fainéantise dans la répétition du thème principal à la scie. L'effort réalisé par Eric DEMARSAN est aussi simpliste qu'adapté à la théâtralité surjouée, aux personnages hauts-en-couleurs de tels films. Il revient pour le film suivant (Le Roi des Bricoleurs), et mister le réalisateur lui demande par la suite de revenir ponctuellement au milieu des années 80 puis pour ses films de la fin des années 90/début 2000, preuves d'une collaboration fructueuse comme il l'aura avec Gabriel YARED.

Juste après Un Linceul N'a Pas de Poches (1974), cet Ibis Rouge fait mieux que poursuivre une période plutôt de grande qualité depuis dix ans pour Mocky, il en illumine la carrière tout comme L'Albatros quatre ans plus tôt. En revanche, pour les sept prochaines années, cela se gâte et la seconde moitié des années 70 est moins marquante, en plus d'être moins prolifique. Côté film policier, Le Témoin (1978), son seul film avec Philippe Noiret, n'atteint pas le niveau attendu, hélas. Les deux autres œuvres de la période, Le Roi des Bricoleurs (1976), grosse comédie avec Sim et Serrault, ainsi que Le Piège à Cons (1979), autre polar, ne sont guère mémorables non plus.

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