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1980 Who's Been Talkin''
1983 Bad Influence
1986 1 Strong Persuader

Robert CRAY - Bad Influence (1983)
Par LE KINGBEE le 29 Mai 2023          Consultée 387 fois

Fondé au milieu des années 70, rien ne laissait présager que le ROBERT CRAY BAND connaitrait une si riche et longue carrière. La faillite de Tomato Records, éditeur de son premier disque en 1980 aurait pu lui être encore plus préjudiciable. Fort heureusement, l’album allait connaitre une seconde vie via deux rééditions proposées par Charly Records et Atlantic.

Entre 1980 et 1985, Robert Cray tourne énormément. Si son premier disque était passé inaperçu en Europe, cela ne l’empêche pas de multiplier ses venues sur le vieux continent. Le guitariste se produira abondamment en France, en Allemagne et au Benelux ; chez nous autres sous l’égide des P.T.T., Robert Cray participera à de nombreux concerts en milieu d’après-midi parfois devant un parterre d’à peine 60 spectateurs payants. Il faut dire que le Blues était tombé en désuétude ou en disgrâce durant les eighties. Mais la participation du géorgien à l’album Showdown en compagnie d’Albert COLLINS et Johnny Copeland permettait de rebattre les cartes, le disque publié sous la bannière d’Alligator Records connaissant un succès incroyable couronné par un Grammy Award en 1986 et intronisé trois ans plus tard au Blues Hall of Fame.

Bien avant cela, Robert Cray enregistre en 1983 Bad Influence, son second disque édité cette fois par le label Hightone Records, un tout nouveau venu dans l’industrie phonographique, l’album ayant l’honneur de débuter le catalogue de la petite firme indépendante. Comme l’annonce l’adage, on ne change pas une main gagnante, on retrouve à la production Dennis Walker et Bruce Bromberg, patron de Hightone Records, déjà présents sur le premier opus. En dehors d’une production aussi habile que soignée, le bassiste Richard Cousins fidèle équipier est toujours là, tandis que le sax David Li se transforme en percussionniste sur un titre tout en chapeautant les arrangements.

L’orchestre regroupe un petit comité avec l’organiste saxophoniste Mike Vannice qu’on retrouve plus tard du côté de Lowell Fulson, le jazzman Warren Rand au sax et le batteur David Olson, membre du band de 1975 à 1989. Robert s’offre même deux choristes de luxe sur "So Many Women, So Little Time" avec Phillip WALKER et Tony Mathews (ex Prince DIXON).

Il ne faut pas cent écoutes pour s’apercevoir que les influences éclectiques de Robert Cray correspondent aux divers registres qu’il écoutait lors de son enfance et de son adolescence ; les diverses pérégrinations géographiques dues aux nombreuses mutations de son paternel militaire offrent un tissage plus ou moins inconscient entre la Soul de Memphis (Hi Records et Stax), les Blues de Chicago et de la Californie. Au travers des huit coécritures, il est indéniable qu’Albert COLLINS et Albert KING pour la partie Blues, Otis REDDING et Al GREEN pour la Soul demeurent ses principales influences.

D’entrée de jeu "Phone Booth" nous plonge dans un océan bien groovy, derrière les volutes d’orgue, la Fender Strat contraste avec la voix douce presque Soulfull du chanteur. Le morceau sera repris l’année suivante par Albert King. Les compostions proviennent d’un gros travail d’équipe, les deux producteurs et Mike Vannice se montrant fortement impliqués. Sur "So Many Women, So Little Time", la guitare apporte une touche funky sur un refrain roboratif. Si le Blues constitue la pierre angulaire du répertoire, celui-ci se passe d’une touche FM comme en atteste "Where Do I Go From Here". A contrario, "Waiting For The Tide To Turn" nous renvoie vers Memphis par l’entremise d’une discrète section cuivre. On retrouve un soupçon de Blues FM sur "March On", hormis un chant plein de chaleur, la mélodie évoque certains passages des DOOBIE BROTHERS. Titre le plus long de l’album, "No Big Deal" se fait plus déclamatoire avec un jeu de percussions hésitant entre tribal et exotisme. L’excellent "The Grinder" sert de pont entre le Blues californien et celui des ghettos de Chicago.

"Bad Influence" qui donne son nom à l’album pourrait provenir d’un disque d’Al GREEN. Sous la forme d’un mini mélodrame, le guitariste nous conte la mauvaise influence d’une femme manipulatrice sur son quotidien, une variante de Pascal et de l’expression "Le cœur a ses raisons que la raison ignore". Si le morceau sonne juste et ne s’éternise pas, on regrettera juste l’envolée de sax trop ancrée dans le Rock FM des eighties. Le titre repris par Eric CLAPTON dans une production pleine de surenchère connaitra une réussite avec la cover des INMATES de Bill Hurley qui faisait le pont entre Memphis Sound et Pub Rock.

Quatre reprises viennent s’insérer judicieusement au répertoire. "Got To Make A Comeback", un inusité d’Eddie FLOYD nous expédie à mi-chemin entre la douceur d’un Gospel et la Soul de la Stax. La reprise de "Don’t Touch Me" *, titre de Johnny "Guitar" WATSON, s’avère nettement plus réservée que par rapport à la version originale influencée par le jeu clinquant de T. Bone Walker et des cuivres ancrés dans un R&B passé de mode. L’univers de la Stax est encore bien présent sur "Share What You Got, Keep What You Need", titre de William Bell repris plus tard par The Modulations. Si certaines intonations rappellent le chant vibrant de Sam Cooke, l’orchestration nous ramène encore entre Memphis Blues et Southern Soul. Si les paroles portent sur le partage, l’amitié et la bienveillance, le chanteur refuse clairement de partager sa bien-aimée, la bonté a ses limites. L’album se termine par un bon feu d’artifice avec "I Got Loaded" **, une petite tuerie de Lil’ Bob, chanteur batteur des Lollipops, éditée en 1965 par La Louisiane Records, un morceau festif qui fit danser de nombreux couples dans toute la Louisiane. Une chanson préalablement par Los Lobos.

Si certains auditeurs afro-américains reprochèrent au guitariste une approche trop FM et commerciale, il faut reconnaitre que le géorgien sera, à l’image de Stevie Ray VAUGHAN, le principal artisan d’un Blues contemporain, alors que le genre était sur le point de tomber dans une profonde obsolescence. Soigneusement produit par l’excellente paire Dennis Walker/ Bruce Bromberg, vendu à plus d’un million d’exemplaires, cet opus lancera définitivement la carrière du guitariste. Le vinyle sera réédité en 1986 via Mercury, tombé dans l’escarcelle de Polygram, puis par Shout Factory avant qu’Hightone ne soit racheté par le groupe Concord. En musique comme en océanographie, les gros mangent souvent les plus petits qu’eux. Un album annonciateur de Strong Persuader, le chef-d’œuvre du Robert Cray Band.



*Titre homonyme à celui d’Hank Cochran.
**Titre homonyme à celui de Peppermint Harris.

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   LE KINGBEE

 
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- Robert Cray (chant, guitare)
- Richard Cousins (basse)
- David Olson (batterie)
- Mike Vannice (claviers, saxophone)
- Warren Rand (saxophone)
- David Li (percussions 10)
- Night Train Clemens (chœurs 5)
- Phillip Walker (chœurs 5)
- Tony Mathews (chœurs 5)


1. Phone Booth
2. Bad Influence
3. The Grinder
4. Got To Make A Comeback
5. So Many Women, So Little Time
6. Where Do I Go From Here
7. Waiting For The Tide To Turn
8. March On
9. Don't Touch Me
10. No Big Deal
11. Share What You Got, Keep What You Need
12. I Got Loaded



             



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