Sans grosse surprise, Eleven est le onzième album de Tina ARENA. Son titre est également censé faire référence au mois de naissance de la chanteuse, novembre, et au fait que le disque est composé de onze chansons dans sa version originale.
Après le gros succès commercial remporté par son prédécesseur, Reset (2013), il semble que ce nouvel album traduise la volonté d’utiliser les mêmes recettes 'rassurantes'. Nous avons donc là droit à un habile mélange entre la Pop et l’AOR, des styles susceptibles de rassembler largement. Et c’est peut-être là que le bât blesse un peu : à trop vouloir la jouer le consensus et viser le grand public, Tina ARENA nous sert un album qui manque un peu de personnalité et de relief.

Tout est trop propre, policé, rutilant. Cela est particulièrement sensible dans les arrangements soignés et nets. Ici, on ne recule pas devant l’usage de chœurs et de claviers en fond sonore. Mais ce constat vaut également pour le chant. Celui-ci est souvent plus axé sur la puissance et l'emphase que l’émotion et la fragilité.
Tous ces choix artistiques débouchent sur un résultat difficilement critiquable, mais guère exaltant. A l’image de "Not Still in Love with You", il n’y a aucune réelle faute de goût, mais c’est un peu trop convenu et sage. Il en va de même du morceau d’ouverture "Unravel Me". C’est puissant, accessible, avec de belles envolées vocales à la Céline DION ou Lady GAGA (période A Star Is Born), mais il y a un petit arrière-goût amer qui donne le sentiment que cela est un peu artificiel, un peu surfait. On ne retrouve pas la Tina ARENA qui sait se montrer fragile et touchante. A la place, nous avons droit à des morceaux qui manquent de saveur, et nous sommes face à certains des travers d’un AOR un peu aseptisé.
Pourtant, il faut reconnaître qu’il y a du savoir-faire et que, de temps en temps, la magie opère. C’est ainsi le cas du dynamique "Overload", chanson de Pop de facture assez classique, mais très efficace. Ou de "Magic" dont l’orientation Dance/Disco à la Kylie MINOGUE est assez heureuse. Une ambiance Dance que l’on peut retrouver dans "Filter". Mais à côté d’un "Make You Believe" assez touchant, on doit se farcir trop de titres qui, à l’image de "Wouldn’t Be Love If It Didn’t", se révèlent bien trop mièvres et dénués de surprise.

A vouloir faire le pari de l’hyper-professionnalisme et de l’accessibilité à tout prix, Tina ARENA perd un peu en personnalité et en relief. Ce n’est pas dramatique, mais cela a pour conséquence de la maintenir dans le groupe important d’artistes du même acabit. Et donc de noyer un peu son propos dans l’anonymat.
Un problème bien moindre lorsqu’elle chante en français. On peut imaginer que le fait de chanter dans une langue étrangère génère un stress qui rend le résultat plus humain, plus fragile, et donc plus touchant.
Un bel album mais qui se veut un peu trop parfait.
A noter que le disque a été réédité en 2015 avec trois titres supplémentaires ("Heaven", "No Filter", "Walk with You"), parmi lesquels il faut signaler le très bon "Heaven" qui n’aurait pas démérité sur la version initiale.