Bonne nouvelle que ce nouvel album de l’infatigable Steve LUKATHER qui nous revient pour son (déjà) 9ème opus en solo. Pour ceux qui sont un peu éloignés du sujet, je rappelle que le bonhomme, outre son rôle éminent au sein de TOTO, roi de l’AOR entre 1978 et 2015 (dates de ses premier et dernier albums), reste un des guitaristes de session les plus respectés de ces 50 dernières années. C’est lui par exemple qui assure les guitares de plusieurs titres du légendaire Thriller de Michael JACKSON (dont "Beat It" à part bien entendu le solo), mais on lui prête la participation à plus de 1000 enregistrements. Son style, fait d’influences multiples dont Jimmy Hendrix et Jeff Beck, est immédiatement reconnaissable, s’adaptant à merveille à des ambiances variées, du Rock le plus dur à des atmosphères plus mainstream, au Blues ou au Jazz Fusion.
Avec Bridges, Steve annonce clairement la couleur : TOTO ayant mis un terme à sa carrière, il reprend le flambeau et jette un pont entre ses œuvres solo antérieures (plus orientées grosses guitare) et le style plus consensuel de son groupe d’origine. La jolie pochette renforce le sentiment d’entrer dans un projet classieux et ambitieux, ce qui n’est pas pour me déplaire.

A l’écoute de l’album, la promesse est bien remplie, et la synthèse annoncée parfaitement présente. Tout au long des 8 titres et des 36’ que dure l’album (oui c’est court), Steve nous démontre qu’il n’a rien perdu de la recette ayant fait ses succès passés et qu’il maîtrise parfaitement les attendus du genre qui exige de belles mélodies, une parfaite qualité d’interprétation et de production, mais avant tout des tubes à la pelle. Bien épaulé par des musiciens aussi réputés que David Paich, Joseph Williams, Simon Philips ou encore Trev, son propre fils, le cahier des charges est parfaitement rempli. L’album, extrêmement bien troussé, révèle à chaque écoute un peu plus ses atours, le maître des lieux y ajoutant de biens chatoyantes couleurs avec sa jolie voix toujours parfaitement placée et ses flamboyants solos virtuoses mais jamais inutilement démonstratifs : ça s'appelle la grande classe.
Ainsi "Far From Over", après la petite intro d’usage, dévoile un riff bien hard, un couplet sympa et un fort refrain qui s’incruste immédiatement dans la tête. Le solo est parfait comme il se doit. Dans la même veine, "Not My Kind Of People" ajoute de jolies notes un peu funk à un ensemble très addictif. J’aime aussi beaucoup "Someone" à l'intro calme marquée par de superbes parties de batterie, avant une irrésistible montée en puissance, un refrain superbe et un solo court mais parfait. "Take My Love" est une superbe pièce blues lente dans une ambiance de night-club, dont le chant est extrêmement prenant, bien appuyé par des chœurs gospel, et les guitares brillantes. "Burning Bridges" penche plus vers le blues à la ZZ Top avec un riff tournant, un superbe refrain (une constante) et un solo plus gras et gourmand. C’est un de mes titres préférés. "I’ll Never Know" est également une jolie réussite en fin d’album, l’ambiance y est plus planante et un peu mystérieuse, et la guitare toujours aussi inspirée.
Je n’ai pas encore parlé de "All Forever Must End", une jolie ballade quoique légèrement sirupeuse, et "When I See You Again" nettement plus dynamique et bien fichue mais un tantinet moins impactante.

L’appréciation finale de l’album dépend beaucoup de l’état d’esprit dans lequel on l’écoute : si vous cherchez des surprises et des tournures innovantes, passez votre chemin. Si en revanche vous aimez les belles mélodies, vous délectez de titres tirés à quatre épingles et appréciez une maîtrise instrumentale supérieure, cet album est fait pour vous et il ne vous décevra pas. Pour ma part, je me limite à un très bon 3, en raison de la prise de risque minime et de la durée un peu courte. Mais, ne vous y trompez pas : le plaisir d’écoute de ce disque regorgeant de classe est totalement au rendez-vous.