Après nous avoir livré The Record en mars 2023, le trio BOYGENIUS revient en octobre de la même année pour nous offrir The Rest, format E.P de quatre titres seulement. Oui, parce que les douze minutes qui forment le reste n’ont peut-être pas trouvé leur place sur l’album studio des trois chanteuses, elles n’en restent pas moins une oeuvre à part entière, aussi courte soit-elle. Sur cet opus, BOYGENIUS est l’incarnation même de l’expression parlons peu, parlons bien. Nous voilà prévenus.

Cheveux au vent devant le spectacle de l’océan, les silhouettes de Bridgers, Dacus et Baker ont quelque chose de mystique, comme leur musique au centre de laquelle on s’apprête à entamer un bref voyage intergalactique. Inspirée d’un article scientifique de la NASA, "Black Hole" au passage instrumental sur lequel on retrouve batterie, claviers et autant de cordes que nécessaire, est écrite et interprétée comme un poème un peu cosmique qui pousse à la réflexion (Out here, it gets so dark/You can see the stars, the ones the headlines said this morning/Were being spat out by what we thought was just destroying everything for good).

Sur l’instrumentation de "Afraid Of Heights", BOYGENIUS revient à des sonorités plus folk avec sa pedal steel guitar ainsi que des refrains chantés à trois voix pour explorer, non pas le poids de la gravité mais l’idée de la mortalité (I don’t wanna live forever but I don’t wanna die tonight). C’est beau, presque céleste.

"Voyager", inspiré du vaisseau spatial, est une douce ballade, menée par la guitare acoustique, légère et fragile, de Bridgers. Dans le néant et la froideur de l’espace, les paroles nous font prendre conscience de notre insignifiance sur les jolis 'mmm' de Baker et Dacus (Walking alone in the city/Makes me feel like a man on the moon/Every small step I took was so easy/But I never imagined a dot quite as pale or as blue/You took it from me, but I would’ve given it to you).

Plus rythmée, la guitare de Baker rend le titre "Powers" plus intense que le précédent, tout comme les harmonies des trois chanteuses - véritable point fort du groupe - une manifestation de leur énergie collective. Ces harmonies ne viennent pas uniquement chercher des réponses aux grandes questions sur l’origine du monde (How did it start? Did I fall into a nuclear reactor?), elles servent aussi à signifier ce que chacune des chanteuses apporte à leur collaboration.

Et la collaboration, chez BOYGENIUS, relève plutôt de la connexion, une connexion supérieure à la somme de ses parties. Ca se sent dans les mélodies captivantes, les productions intrigantes et dans leurs paroles poignantes et poétiques. Bien qu’un peu court, on pardonne la frustration occasionnée par The Rest, un album à mille lieues d’être uniquement de simples restes.