Je ne sais pas ce qu’il leur a pris, aux boss d’EMI, pourtant des gros pontes de l’industrie musicale. Ils ont essayé de nous assassiner avec une couverture d’une laideur apocalyptique. Donc je sais, chers camarades, pour tous les puristes ici présents, j’ai choisi la couverture de la réédition, je refuse de voir cette horreur dans les colonnes de notre joli site ! Ca c’est fait ! Ce 'son des ombres' est donc leur 4ème opus, à une époque où les charts sont outrageusement dominés par le british boom des BEATLES et des KINKS. Mais il faut bien survivre et on sait que Cliff RICHARD va traverser toutes les époques avec une facilité déconcertante, comme notre Johnny national, les SHADOWS veulent faire de même en ne reniant rien de leur passé glorieux.

Pour moi, c’est "The Lost City" est le grand standard de cette année 65 pour les SHADOWS. On y retrouve tous les éléments qui ont fait le succès du groupe, avec une wah-wah utilisée en son clair. Voilà qui n’est pas si fréquent. "Deep Purple" est un des classiques de cette livraison pour ce vieux hit des années trente de Peter DEROSE et qui donna son nom au méga-groupe de hard-rock, plutôt sympa mais évidemment un peu suranné. "Santa Ana" est une compo de Lordan, le mec qui a composé "Apache", leur plus grand succès ! On y retrouve sa patte originale ainsi que le son clair si identifiable de Hank.

Alors "Brazil" se prête-t-elle au son des SHADOWS ? La guitare rythmique de Bruce Welch y est tout à son aise, mais je n’en dirai pas autant de Hank Marvin qui doit ici composer avec un état d’esprit qui n’est pas réellement le sien. On remarque ensuite le petit côté coquin dans le "Dean’s Theme" que John et Hank ont composé, d’autant que la batterie de Brian y est impériale. "Cotton Pickin" me semble aujourd’hui bien trop daté mais s’écoute bien pour des oreilles indulgentes. C’est "Breakthru" qui me semble le seul essai véritablement novateur de cet ensemble parfois un brin terne, cette fois il y a de la vie dans cette compo.

Welch et Rostill se sont pointés avec 3 titres : "Blue Sky Blue Sea Blue Me" voit donc Bruce enfourcher la guitare solo, et on ne voit guère de différence avec Hank. Bien entendu, c’est un brin sirupeux et on apprécie une fois de plus les capacités de rythmiques du grand guitariste. "Bossa Roo" nous propose un état d’esprit singeant quelque peu la bossa Nova du grand Tom JOBIM, pas de quoi en ouvrir un paquet de caramels mous. Le duo a vraiment pour objectif d’attirer l’attention du marché sud américain avec "National Provincial Samba"… Décidément ! Tout ceci reste assez peu convaincant. Rostill a composé seul "The Windjammer", quelques intonations exotiques et une ambiance B.O sympa, pas révolutionnaire.

Nous avons aussi quelques chansons : "A Little Bitty Tear" est un classique de Hank COCHRAN– non pas le frangin de Eddie -, et c’est Hank qui se colle au mike pour cette version. La voix est veloutée, on croirait presque le King ELVIS à Hawaï. Un petit instant de douceur très réussi. "Five Hundred Miles" n’est pas si mal réussie. Bien sûr, les SHADOWS ne sont pas le KINGSTON TRIO mais on apprécie ce petit instant. A nouveau, l’essai de copier quelque peu les harmonies vocales des EVERLY BROS est bien là sur cette version anglaise du classique de Gilbert BECAUD, le "je t’appartiens" devenu "Let It Be Me" par la force des choses, pas vraiment à retenir.

Pour une livraison de l’année 65, il n’y a ici rien de bien moderne mais peut-être reste-t-il encore suffisamment de fan de rock instrumental pour suivre les SHADOWS dans leur démarche. Le créneau n’est guère fourni en terme de groupes, seuls les VENTURES survivent aux USA, leur pendant américain. Alors l’ex plus grand groupe du monde s’en sort toujours, même si aujourd’hui on ne parle plus guère d’eux ! Je reste sur un trois équilibré.