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- Style : The Moody Blues , The Nice

PROCOL HARUM - Procol Harum / A Whiter Shade Of Pale (1967)
Par MARCO STIVELL le 26 Janvier 2025          Consultée 564 fois

Le chat avait un nom latin, inexact en plus ! Mais avant cela, tout ou presque commence lorsque les étoiles s'alignent pour permettre la rencontre d'une bande de jeunes londoniens, tous nés entre 1945 et 47. Keith Reid, fils d'un Juif ayant survécu à la Shoah, né à 20 km au nord de la capitale dans l'Hertfordshire, quitte tôt l'école pour devenir auteur de chansons. Il rencontre Gary Brooker, fils d'un guitariste professionnel, et qui lui-même choisit de ne pas rester trop longtemps étudiant en botanique et zoologie à l'université de Southend-on-Sea, station balnéaire très prisée du comté d'Essex (est de Londres). Brooker joue d'ailleurs du piano et est depuis 1960 (à l'âge de 14 ans !) chanteur remplaçant d'un certain Mick Trower dans un groupe rhythm'n'blues local nommé The PARAMOUNTS.

Il y côtoie notamment un premier guitariste nommé Chris Copping, le batteur Barrie James 'B. J.' Wilson, ainsi qu'un autre guitariste, petit frère de l'ancien chanteur et qui s'appelle Robin Trower. Tous auront leur importance plus tard, mais en 1963 déjà, ils décrochent un tube mineur en Grande-Bretagne, 35ème place du classement, en reprenant "Poison Ivy", chanson des COASTERS (sortie en 59). Ils gagnent même le respect de leurs pairs, notamment les ROLLING STONES qui sont fans d'eux et partagent leurs scènes. Durant les deux-trois années suivantes, ils publient maints efforts et singles mais ne retrouvent jamais pareil succès. De plus, les projets parallèles fleurissent et Gary Brooker se voit dès lors plutôt compositeur aux côtés de son nouvel ami Keith Reid, parolier donc, qui a travaillé entre autres pour un certain Michel POLNAREFF.

Ils proposent des chansons à maints artistes connus mais rien n'aboutit. Alors ils décident de garder le tout et, dans le sillage de la fin des PARAMOUNTS en 66, fonder un nouveau groupe. Les membres recrutés sont le guitariste Ray Royer, le batteur jazz Bill Eyden, le bassiste David Knights, et par-dessus tout, l'organiste Matthew Fisher. Ce dernier, jouant lui aussi plutôt de la quatre-cordes à l'origine, a écouté les ANIMALS et craqué pour le Hammond, ce grand monsieur en bois à touches noires/blanches et boutons-pédales-pistons, plus belle version électrique et portative du saint-orgue d'église et si bien adapté au rock. Fisher est en outre très proche de Ian McLagan des SMALL FACES qui favorise un modèle M102 de Hammond avec cabine Leslie et le pousse à faire de même en acquérant le tout (il a fallu emprunter l'argent de sa grand-mère !). Au sein des SAVAGES, il joue avec l'illustre guitariste Ritchie Blackmore avant que celui-ci ne fonde DEEP PURPLE.

Début 1967, PROCOL HARUM est né, avec ce nom étrange qui signifie 'loin d'elles', quoiqu'un peu anglicisé (le mot exact de 'loin' étant 'procul'), en tout cas totalement emprunté au nom donné par une connaissance amicale à son chat. Les hasards de la vie, et qui font que même appartenant aux groupes classiques d'outre-Manche, ce patronyme unique dont les plus proches seront COLOSSEUM et GENESIS (également un mot latin) ne résonnera pas dans l'histoire autant qu'il l'aurait pu/dû. Pourtant, quel début de carrière formidable, rêvé, avec ce morceau "A Whiter Shade of Pale", publié comme single en mai 1967 par le label Deram (filiale de la major Decca), un mois avant le reste de l'album. Album qui ne l'inclue d'ailleurs pas à sa tracklist dans sa version anglaise éditée par les indépendants de Regal Zonophone, contrairement aux Américains de A&M Records qui ont eu meilleur flair.

D'un côté à l'autre de l'Atlantique, le 33 tours porte soit le nom du groupe, soit celui du tube. Ce tube donc, qui concentre toute l'attention ou presque, au point que sans lui, l'album anglais semble un peu maigre. Le côté slow psyché-planant mais en douceur, avec rythmique basse-batterie-guitare feutrée, la mélodie portée à merveille par un Gary Brooker pianiste-chanteur débordant de soul en 'whiter' simplicité mais éclatante au refrain, les paroles inhabituelles signées Keith Reid... Celles-ci d'ailleurs déjà un rien 'opaques' (il aime ça) dans le thème avec la fameuse phrase-titre, entendue lors d'une fête sur une simple constatation dite par un gars à une fille sur comment son visage à elle lui paraissait, a été transformée en différend mixte qui se résout très simplement par un acte sexuel torride !

Sans oublier, au-dessus du piano de Brooker, cette nappe d'orgue Hammond que Matthew Fisher a partiellement empruntée à Jean-Sébastien BACH. Une telle pureté ronronnante finit de canoniser la pop qui en cette fin 60's ne va que gagner en enrichissements, de manière très 'progressive', chose à laquelle PROCOL HARUM, tout comme les MOODY BLUES au même moment, vont beaucoup contribuer. Et puis, détenir un poète-parolier comme membre à part entière, ce n'est pas sans offrir de distinction ; GRATEFUL DEAD en fait autant à l'autre bout des Etats-Unis, et même le futur KING CRIMSON, groupe débordant de créativité lui aussi, aura son Peter Sinfield.

Du coup, "A Whiter Shade of Pale" est devenue une 'love-song' en diable autant qu'en douceur, idéale pour danser joue contre joue, corps contre corps et langoureusement en soirée ou discothèque. Et s'il n'y avait que ça ! "A Whiter Shade of Pale" est restée la chanson la plus jouée en lieux publics de Grande-Bretagne entre 1935 et le nouveau millénaire ! Numéro 1 dans de nombreux pays, reprise par nombre d'artistes internationaux, utilisée dans des documentaires sur le Vietnam autant que des fictions de Martin Scorsese en passant par le Dr House, c'est à se demander comment elle a pu ne faire 'que' six millions de ventes par le monde ! L'effet enchanteur se brisera d'abord quand le groupe en aura marre de la jouer, dès le début des années 70, n'ayant pas connu de succès similaire, puis environ quarante années plus tard, quand Fisher se réveillera un jour pour réclamer sa part de droits, moyennant tribunaux, sur un crédit Reid-Brooker qui le laissait absent.

Et donc, un mois après en juin 67, il y a le reste de l'album, même si on devrait dire le sympathique mais terne premier album de PROCOL HARUM, enregistré tout comme le tube à l'Olympic Studio de Londres. Entretemps, le groupe a déjà perdu deux membres, Bill Eyden et Ray Royer étant remplacés par deux anciens PARAMOUNTS : B. J. Wilson ainsi que Robin Trower ! Si l'édition américaine met "A Whiter Shade of Pale" en première position, l'album anglais débute avec "Conquistador", blues-rock/psyché bien d'époque, joliment tourmenté, où dominent l'orgue et le chant de Brooker. Un critère qui demeure une constante jusqu'à la moitié de l'album, comme si le groupe avait besoin de se chauffer longuement.

Il y a une bonne progression 'dreamy' et nonchalante sur "Something Followed Me", Brooker semblant traîner un fantôme dans la jungle urbaine londonienne, puis le groupe switche vers la cacophonie de New Orleans avec un "Mabel" très music-hall et délirant, jusque dans les voix, kazoos etc. On retrouvera un peu de cela plus loin sur "Good Captain Clack". Puis la brume anglaise revient de plus belle sur "A Christmas Camel", où l'on ressent l'importance du couple orgue-piano incarné par Fisher et Brooker dans cette musique. Si la voix du second est un atout imparable, déjà une des plus belles de son époque, Robin Trower, encore très porté sur Gibson (Les Paul) en ces débuts et par encore guitar-hero digne de ce nom, sonne même un peu brouillon sur "Something Followed Me", qui plus est avec trop d'écho.

En revanche, dès "Cerdes (Outside the Gates of)", morceau mystique et un peu 'laid-back', Brooker se détache un peu mais ne laisse que plus de place à Trower, dont le solo est un vrai régal. Idem pour "A Christmas Camel", suivi ensuite de près en qualité par "Kaleidoscope", rock solaire avec une bonne énergie de B. J. Wilson à la batterie tandis que basse, guitare et piano forment un bon riff commun. Preuve que mis à part le tube, et les efforts divers du tandem Brooker-Reid en écriture originale ("She Wandered Through the Garden Fence", qui propose alors des titres comme celui-là ?) sur la première face, cette face B se fait plus solide et égale. Fisher y compose d'ailleurs seul, bien que toujours très tourné vers BACH (inclusion du fameux "Prelude n°1" joué par Brooker), l'instrumental "Repent Walpurgis", sombre et porté par l'orgue autant que la guitare lyrique. Il y a une certaine recherche globalement, mais pas encore beaucoup du grand PROCOL HARUM.

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   MARCO STIVELL

 
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- Gary Brooker (chant, piano)
- Matthew Fisher (orgue hammond)
- Robin Trower, Ray Royer (guitares)
- B. J. Wilson, Bill Eyden (batterie)
- Dave Knights (basse)
- Keith Reid (paroles)


1. Conquistador
2. She Wandered Through The Garden Fence
3. Something Followed Me
4. Mabel
5. Cerdes (outside The Gates Of)
6. A Christmas Camel
7. Kaleidoscope
8. Salad Days (are Here Again)
9. Good Captain Clack
10. Repent Walpurgis



             



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