Recherche avancée       Liste groupes



      
VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 

ALBUMS STUDIO

1988 Mademoiselle Chante
1990 Scene De Vie
1993 Je Te Dis Vous

Patricia KAAS - Je Te Dis Vous (1993)
Par MARCO STIVELL le 15 Mars 2025          Consultée 23 fois

Attention, la grosse artillerie est là ! Non, laissez Bertha où elle est ; le souvenir, le devoir de mémoire, bien sûr, mais en termes agréables, rappelez-vous plutôt de Patricia, fine comme le blé lorrain. Oui, Patricia KAAS qui en cette année 1993 tient à couronner un succès qui se compte désormais en années et qui va largement continuer. L'année précédente, déjà, elle figure sur le disque live La Soirée à l'Opéra des ENFOIRÉS qui, après la première tournée caritative de 89 en faveur des Restos du Cœur (également parue en album), vont instaurer dès lors l'événement annuel et l'enregistrement fameux qui l'accompagne. En 92, c'est encore 'petit comité', musique simplement, avec donc Patricia KAAS qui sent qu'elle fait maintenant partie des grands de la chanson française, et interprète, seule ou en duo, des chansons d'elle peu connues du public hormis ses fans ("Un Dernier Blues", "Une Dernière Semaine à New York" et "Regarde les Riches").

Hormis cela, tandis qu'une partie du catalogue de la maison Columbia/CBS passe par Sony Music, donc elle également, Patricia s'envole pour Londres et va prendre poste aux Eel Pie, les studios du rockeur Pete Townshend, tête pensante des mythiques The WHO. Elle s'octroie les services du producteur Robin Millar, alias 'smooth operator' puisque c'est lui dont SADE nous parle beaucoup depuis 1984, bien nommé à plus forte raison car il mène ce projet-là également. Cela promet de belles choses, même si côté écriture/inspiration, Je Te Dis Vous (sorti en avril 1993), est encore plus disparate que les précédents. Il y a juste un meilleur équilibre, malgré qu'avec les années 90 et le format CD, on passe de quarante minutes et quelques avant à ici presque une heure dix ! Le seul qui tire un peu la tronche, c'est Didier BARBELIVIEN, toujours bien représenté avec mister François Bernheim, le tandem qui a 'façonné' la belle mosellane, mais qui accepte mal que celle-ci lui échappe. Les années guériront cela, et il faut reconnaître qu'il lui a donné le meilleur de son talent.

Tout comme l'album précédent en moins conceptuel, ce nouveau possède son intro, l'étrange "Y'avait Tant d'Etoiles" au côté berceuse jazzy entre célesta et montées de piano nostalgique, fort prenant et terminé par les rires de la chanteuse. Avec "Hôtel Normandy" et "Je Retiens Mon Souffle", très imprégnés de la féminité d'une telle personne en présence d'hommes ou emportant leur souvenir, Patricia KAAS donne l'impression de vouloir prendre son temps, et elle le fait bien. Caressante, fidèle à son rôle adopté depuis 1988, elle fait rimer sur la seconde 'l'amour, l'amitié ça n'a rien à voir', 'j'aimerais, un jour, rattraper ce retard' et 'comme un glaçon dans la Marie Brizard'. Enfin, elle pour la voix et l'idée de base, mais question écriture, c'est un certain Marc LAVOINE, bien aidé par Fabrice Aboulker, son compositeur fétiche, et Pierre Grillet.

Le même trio signe deux autres titres plus loin, "La Liberté" d'abord, pour ramener la jeune diva de vingt-sept ans à des considérations plus universelles. Avec un effet réécriture de Paul Eluard, reliant sans-abri et sans-culottes, dont on apprécie grandement la musique jazzy exotique (timbales, marimbas), le seul son de saxophone réellement pertinent du disque (merci Patrick Bourgoin, en invité) puisque l'alto un peu terne par rapport au chant y est encore favorisé, des choeurs féminins adorables sur le solo d'orgue final après avoir été joliment haletants. À ce niveau et ensuite, parlons des soupirs suggestifs mais légers de "Reste Sur Moi", dernier effort de LAVOINE & co, une très belle parenthèse funk 90's quand le reste est encore très '80's', sensuelle et qui vaut à Patricia KAAS une franche reconnaissance sur les dancefloors outre-Atlantique (top 20 US consacré).

Pour le reste, c'est un album long certes, mais plaisant d'autant plus qu'elle y fait un peu ce qu'elle veut. Reprendre James BROWN et Tony Joe WHITE ? Banco ! Un élancement pop/rhythm'n'blues aux allures de tube en allemand (signé Marius MÜLLER WESTERNHAGEN, star en son pays et ancien acteur, présent lui aussi à Londres pour enregistrer en 92), à savoir "Ganz und Gar" ('absolument') pour faire une suite inattendue mais logique à "D'Allemagne" ? No problemo ! Engager, parmi les musiciens anglais 'de base' (les Français sont ici occasionnels), un grand monsieur de la guitare et de l'amour en musique comme Chris REA sur "Out of the Rain", reprise de WHITE pour le côté blues entre delta et country texane ? Histoire de s'ancrer un peu plus en Amérique, et ça marche, en termes musicaux du moins.

Même sur le standard "It's a Man's World", elle n'a pas à rougir de son accent français (les 'angliches' adorent, pour rappel) et sa prestation ne singe pas celle de BROWN, préférant un talk-over/parlé-chanté grave, profond en 'lead', et une seconde voix aiguë aussi magiques l'un que l'autre, un emballage instrumental laissant les cuivres pour les cordes plus marquées. Difficile de dire qu'avec des perles pareilles, Je Te Dis Vous est trop long, de manière basique et lapidaire. Troisième effort en langue de Shakespeare, "Space in My Heart" est un autre moment de volupté (cette basse, cette guitare classique, aaah !) en compagnie de la blonde lorraine.

Le titre éponyme, avec son caractère épistolaire jouant amoureusement sur les pronoms, sa progression musicale, contient toutes les qualités musicales du début de carrière de KAAS. Une petite beauté signée Joëlle Kopf et le claviériste (Paul-)Michel Amsellem, tout comme la berceuse d'intro et puis "Fatiguée d'Attendre", cet amour impossible-échec dont on ne se remet jamais, avec l'orage qui éclate et la musique la plus orientée 'Russie-Europede l'Est' de l'ensemble, remarquable. N'oublions pas donc, dans la même veine, notre tandem Bernheim-BARBELIVIEN, avec d'abord "Jojo", non pas le même que BREL mais une forte ambiance nordique et nostalgique là encore (gare de Cherbourg, hôtel du Nord), un peu "Manu" (RENAUD) version KAAS pour le côté 'réconfort de comptoir'. Et puis, ils ont fait cet "Hotel Normandy" en jazz-bossa très classieux, laissant de l'espace aux musiciens (impro finale) comme si la chanteuse s'invitait elle-même sur son disque !

On parlait d'universel, de social pour "La Liberté", et après un début d'album traînant mais avec classe, la chanteuse bien aidée par son tandem de compositeur plus-pour-longtemps favori rentre dans le vif du sujet avec "Ceux Qui N'ont Rien", blues lent et puissant qui ramène la 'Kaastafiore' absente jusqu'alors et marque les esprits. Un beau message d'espoir pour les laissés pour compte autant que certains repris de justice (pour des vols 'mineurs'), pour 'couper le destin'. Mélodie porteuse, orgue, choeurs 'spiritual', cuivres et sax soliste à l'appui, sans oublier la guitare superbe, encore une fois, de Chris REA. Sans lui cette fois mais sur le même ton musical par les mêmes auteurs B-B et qui ne retient pas moins l'attention, la ballade "Entrer Dans la Lumière", dédiée au public chéri et à chaque concert ('être là de passage, sans avoir rendez-vous, avoir tous les courages de me donner à vous') est une bien jolie conclusion.

Toutefois, ce disque, pourtant déjà plus que solide, à cheval sur deux décennies, alternant sans complexe batterie intègre et boîte à rythmes au fil des chansons (sans parler des autres sons), s'il marque les esprits et se vend à plus d'un million d'exemplaires méritoires rien qu'en France, il le doit à une autre chanson. C'est bien "Il Me Dit Que Je Suis Belle" qui renforce l'amour des foules pour Patricia KAAS et lui permet de franchir un cap, autre que les dates. Il est vrai que là encore, le texte rêveur au féminin, miroir séducteur du "Je Te Promets" de HALLYDAY (et pour cause !), le chant habité, la mélodie onctueuse (pour un slow 'killer') et ses envolées lors des refrains, la progression musicale (variation du second refrain puis accélération inattendus !), son clip torride, soleil et île déserte ou presque, tout est fait sur mesure. Allez, il y a juste le premier solo de guitare 'shredisant' par Paul Stacey, légèrement too-much, mais pour 'corriger' cela entre autres, il y a le maître à penser.

Aucun scoop, tout comme Johnny, Patricia KAAS peut remercier Jean-Jacques GOLDMAN (on comprend mieux le désarroi de BARBELIVIEN !), qui se fait nommer ici Sam Brewski, son vieux jeu de pseudo(s) comme à la fin 70's-début 80 avant qu'il ne soit lui-même reconnu, prenant ainsi sa revanche après son autre effort caché de la sorte un an plus tôt pour Philippe LAVIL ("Comme un Tout P'tit Bébé", album Y a Plus d'Hiver, 92) qui, lui, n'a pas marché. Et cela va bien le conforter d'écrire pour d'autres durant les années d'autres chanteuses (on se demande qui, en 1995 et pas que !), d'autres tout court en visant large ("Aïcha"). En attendant de revenir vers Patricia, non sans refaire son propre enregistrement de la chanson afin d'en être mieux satisfait – pour la version single, quel coquin -, il laisse ainsi à la jeune dame et son public en émoi une de ses plus belles chansons, avec des vers bien à lui ('de dépit en défiance', 'quand les vies ne sont plus qu'ombre') par rapport à d'autres plus spécifiques, tout à son honneur ('et pauvre de moi, j'y crois !'). Maître, donc magistral.

A lire aussi en VARIÉTÉ FRANÇAISE par MARCO STIVELL :


Nicolas PEYRAC
Case Depart (2009)
Nostalgie hivernale




Joyce JONATHAN
Une Place Pour Moi (2016)
Variété pop et folk


Marquez et partagez





 
   MARCO STIVELL

 
  N/A



- Patricia Kaas (chant, choeurs)
- Robin Millar (guitares, piano, synthétiseurs, marimbas)
- Mark Smith, Jannick Top (basse)
- Jeremy Stacey, Claude Salmiéri (batterie)
- Paul Stacey (guitares électrique et acoustique)
- Chris Rea (guitare solo, guitare slide)
- Patrice Tison, José Souc (guitare électrique)
- Jess Bailey (piano, orgue hammond, synthétiseurs, programma)
- Michel Amsellem (piano)
- Jean-pierre Sabar (orgue)
- Pete Davis (synthétiseurs, programmations)
- Martin Ditcham, Marc Chantereau (percussions)
- Martin Green (saxophones alto et ténor)
- Steve Sidwell (trompette)
- Matt Coleman (trombone)
- Antoine Russo (trompette bouchée)
- Patrick Bourgoin (saxophone solo)
- Gavyn Wright (alto)
- Bobby Valentino (violon)
- Roger Smith, Paul Kegg (violoncelle)
- Mick Feat, Trio Esperansa (choeurs)
- Carole Rowley, Guida De Palma (choeurs)


1. Y'avait Tant D'etoiles
2. Hôtel Normandy
3. Je Retiens Mon Souffle
4. Ceux Qui N'ont Rien
5. Il Me Dit Que Je Suis Belle
6. Space In My Heart
7. La Liberté
8. Fatiguée D'attendre
9. Jojo
10. Je Te Dis Vous
11. Reste Sur Moi
12. Ganz Und Gar
13. Out Of Rain
14. It's A Man's World
15. Entrer Dans La Lumière



             



1999 - 2025 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod