C’est une de ces chansons qu’on entend quelque part et qui nous marque. Moi, j’ai découvert "A Girl Like You" en voyant Demi Moore tenir le rôle de villain dans Charlie’s Angels: Full Throttle et je suis tombée amoureuse instantanément de ce morceau au mordant sensuel et à la classe parfaite. L’album qui l’abrite depuis 1994, c’est Gorgeous George, troisième album d’Edwyn Collins qui, rappelons-le, signait encore des compositions assez timides quelques années plus tôt, sans vraiment réussir à se démarquer dans la grande parade de la Britpop.

Malgré tout, COLLINS reste en marge, inclassable. Le son devient de plus en plus fin tout en conservant cet esprit d’indépendance que j’ai bien aimé sur les deux premiers albums. Tout débute sur "The Campaign For Real Rock", un morceau qui suinte l’ironie où Edwyn fait son crooner avec le panache qu’on lui connaît désormais. La batterie est sèche et sans vernis mais c’est véritablement la guitare qui lui insuffle ce petit côté rock alternatif très sympa et ce solo qui arrive rapidement en riffs tranchants qui me donne envie de poursuivre l’écoute.

Encore heureux car c’est là qu’arrive le tube intemporel "A Girl Like You". COLLINS laisse derrière lui ses racines post-punk pour embrasser les gants de soie d’un dandy romantique. Le style est indiscutable : une pop sexy, voire vénéneuse, une batterie qui claque enfin, un xylophone pour mon plus grand plaisir, des guitares fuzzy, une mélodie redoutable et un groove rétro qui survit à l’épreuve du temps - trente ans après sa sortie. On tombe immédiatement sous le charme de ce refrain irrésistible chanté d’une voix de lover magnétique, de ce rythme bouillonnant et de ces arrangements pointus, bref tous les éléments sont au rendez-vous pour créer ici quelque chose de rare et rendre ce titre culte tout simplement.

Après ce grand moment, Edwyn semble poursuivre avec cet humour noir venu d’outre-Manche et nous embarque sur "Low Expectations"… Mouais, autant vous prévenir tout de suite, ça part un peu en cacahuètes, la ballade de loser assumé qui souffre derrière les cordes ondulantes de sa guitare, vous vous en doutez, très peu pour moi car ça pue la chialante à plein nez ! Un petit coup d’harmonica sur la fin du titre pour faire pleurer dans les chaumières et on a la totale. La nonchalance de COLLINS qui pourtant se révèle assez séduisante en général donne presque le tournis.

On devra encore supporter les ambiances nostalgiques et cotonneuses dans des ballades folky agrémentées de nappes subtiles et de guitares pesantes comme "North Of Heaven", "Gorgeous George" et "Subsidence", argh ! Moins pire, "I’ve Got It Bad" contient des relents de post-punk avec sa guitare nerveuse mais COLLINS parvient même à transformer cette énergie-là en une chialante esthétique qui cherche clairement à trop en faire.

Dans le même délire, au choix, il y a l’ambiance pastel de "It’s Right In Front Of You" ou "Out Of This World" qui m’entraîne quand même un peu grâce à ses choeurs, sa jolie basse et son atmosphère poppy et planante de série B, mais surtout avec l’appui de ces cuivres lourds et ultra-classieux qui donnent au titre cette vibe désinvolte qui me plaît tant.

COLLINS nous livre ensuite un long morceau de pop aux influences sixties qui balancent doucement dans "If You Could Love Me" ; c’est tamisé comme tout mais c’est loin d’être à la hauteur d’un classique instantané comme "A Girl Like You". Les sentiments et la performance vocale sont en friche sur "Make Me Feel Again" et moi, je commence sérieusement à m’ennuyer… On va pas se mentir, ça sent la fin des haricots et pour sa satire finale, Edwyn s’en va, irrévérent et fatigué, sur les choeurs funky de "Moron".

Vous savez ce qu’on dit, l’enfer est pavé de bonnes intentions et notre rescapé des 70’s tente sa chance sur ce Gorgeous George, un album de Britpop classe, entre rock doux et pop molle, dont on ne retiendra rien hormis une chanson qui échappera au flegme à toute épreuve d’Edwyn COLLINS. Evidemment, on ne défait pas un banger alors "A Girl Like You" reste à ce jour la chanson la plus emblématique dans le parcours du chanteur écossais, l’hymne de sa carrière. Pour le reste, Edwyn se vautre avec style sur cette pop mal peignée qui mérite tout de même un joli 3,5.