Et si beauté physique et qualité musicale allaient toujours de paire ? Alors Enrique Iglesias serait un grand compositeur, et les Rolling Stones seraient les parias du rock. Le vilain Neil Young recevrait des pierres et des fruits pourris à chacun de ses concerts, alors que n'importe quelle pouffe issue d'une télé-réalité quelconque se verrait reconnue comme l'artiste du siècle... Par chance, nous n'en sommes encore pas là, même si les médias tendent à favoriser les artistes au minois sympathique plutôt que les pâlichons aux cheveux hirsutes...

Frère et sœur, Angus et Julia STONE sont beaux comme des dieux, même si la pochette de Down the Way, leur deuxième album, ne le montre pas. La méfiance devrait-elle être de mise ? L'écoute de cet opus devrait rapidement dissiper les doutes : ce n'est pas pour leur faciès attrayant que les deux Australiens ont été signés, mais bien pour leurs talents combinés au service d'un folk acoustique de toute beauté et à considérer comme l'une des sorties les plus intéressantes de cette année 2010.

Sur le principe de la complémentarité, les deux auteurs interprètes œuvrent chacun leur tour derrière le micro, et touchent à tous les instruments. De sa voix naïve et délicieusement puérile, Julia se fait doucereuse, triste et mélancolique. C'est à elle que revient la tâche d'ouvrir l'album, par un « Hold On » riche en arrangements qui mettent en exergue la tristesse latente d'un titre qui s'avère néanmoins lassant à la longue. Cet adjectif ne s'applique pas en revanche à l'intimiste « For You », qui s'impose rapidement comme le morceau le plus intéressant de Julia. Soutenue par une simple guitare acoustique, le mélodie se voit finalement reprise en son milieu par une basse, une batterie et une guitare électrique légère et discrète pour un résultat tout bonnement époustouflant. Tout en nuances et en progression, le titre grandit au fur et à mesure des écoutes, et s'installe comme un titre-aimant vers lequel on revient inlassablement. Dans une même veine mélancolique, les autres titres chantés par Julia (« Santa Monica Dream », « I'm Not Yours ») s'avèrent fort appréciables, particulièrement « And the Boys », dont le refrain persistant en fait un des titres les plus efficaces de l'opus.

Angus, pour sa part, œuvre dans un même registre folk, mais offre une facette plus introspective profonde. Le long mid-tempo « Yellow Brick Road » s'en fait l'avatar. Laissant le temps aux ambiances de s'installer, le jeune Australien offre une réflexion profonde sur l'être humain et la société à grands renforts de guitare acoustique. Sa voix douce fait des merveilles sur « Hush » bien aidée par un harmonica aux intonations country. Mais c'est bien avec « Draw Your Swords » que l'artiste laisse exploser tout son talent. Durant quasiment sept minutes, le bonhomme passe de la torpeur à la colère, en passant par la tristesse et la résignation, et accouche d'un véritable petit chef-d'oeuvre.

Non sans rappeler un autre duo, The Swell Season, les Stone marient leurs voix à plusieurs reprises (« Walk it Off », « I'm Not Yours »), offrant au passage quelques harmonies vocales fort appréciables.

Le folk apparaît, grâce à Angus et Julia Stone, sous son plus beau visage avec ce Down the Way, qui constitue d'ores et déjà un album indispensable de l'année 2010 pour les amateurs de ce genre en constante innovation. Du grand art.