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Xavier RUDD - Jan Juc Moon (2022)
Par GEGERS le 11 Mai 2022          Consultée 1414 fois

A l'extrémité sud de l'île Flinders, un aigle fond sur sa proie. A hauteur de Coober Pedy, dans la fournaise, un wallaby traverse la sablonneuse route 87. Dans le Prince Regent National Park, un koala mâchouille paresseusement une feuille d'eucalyptus. Quelque part dans le Queensland, une petite araignée à toile-entonnoir tape au carreau des Floodwood Studios. De l’autre côté de la vitre, Xavier RUDD, aux manettes, peaufine les arrangements de son dixième album. Une nouvelle réalisation studio qui se trouve être le fruit non pas du silence mais de la tranquillité. Pour la première fois en plus vingt ans de carrière, le musicien se retrouve avec du temps devant lui, une pandémie dont vous avez peut-être entendu parler ayant mis à l’arrêt tous ses projets de tournée à l’étranger. Cette tranquillité, c’est la même que celle qui enveloppe la plage de Jan Juc, à une centaine kilomètres au sud-ouest de Melbourne, le soir venu. Cette plage, qui donne son nom à l’album, fait face à une mer tumultueuse, dont les vagues attirent chaque année de nombreux surfeurs. D’un côté, la placidité de cette langue de sable qui semble s’étirer vers l’infini. De l’autre, un mur de tourments. Entre les deux, l’artiste australien avance tel un funambule sur le fil du rasoir.

Ce nouvel album se fait l’évocation d’époques multiples. Si les ambiances folk restent ici prédominantes, elles ont beaucoup moins de bagout que sur le phénoménal Storm Boy (2018), et elles laissent beaucoup plus de place aux expérimentations ainsi qu’aux réminiscences reggae qui retrouvent une belle vigueur après avoir été un temps laissées de côté. Ce nouveau voyage, initié par l’artiste, devient rapidement un voyage intérieur, dont on ressort apaisé et grandi. Malgré une discographie foisonnante, la magie fonctionne toujours, et Jan Juc Moon se révèle rapidement être un de ces albums inconditionnels, à l’écoute desquels il est impossible d’effectuer tout autre activité qu’une écoute attentive.

Nous enveloppant dans de belles sonorités reggae, infusées de références musicales à la culture aborigène, « I am Eagle » introduit l’album par une évocation païenne, une personnification de l’animal. L’artiste, l’auditeur et l’animal ne font plus qu’un. Sous une lune pleine, l’aigle survole la plage de Jan Juc (« Jan Juc Moon »), Xavier RUDD en profitant pour tisser une toile folk acoustique du plus bel effet, offrant un espace d’expression très large à la basse. Un peu plus loin, la crique de Stoney (« Stoney Creek ») emmène l’auditeur sur une balade, au coucher du soleil le long d’un bord de plage. Il y a ici une fausse légèreté, car si l’artiste chante la beauté du monde, il n’occulte pas pour autant l’étiolement du merveilleux et l’émergence des premiers stades d’un effondrement des espèces, des richesses environnementales, des valeurs. Sur le fil du rasoir, toujours, Xavier Rudd propose d’un côté une ballade folk légère et intimiste (« Joanna ») et de l’autre un titre folk profond et lancinant, « The Calling » (« Je suis persuadé que ce monde s’effondre », chante-t-il en ouverture), dont la puissante lenteur décrit tout autant le marasme d’un avenir incertain que l’espoir d’un sursaut des consciences. Et le morceau de gagner en intensité à mesure qu’il se prolonge (et si la bande-son des dernières minutes du monde était une guitare slide ?), pour devenir rapidement et finalement un des morceaux les plus audacieux de l’artiste.

Au risque de galvauder cet adjectif, il faut bien reconnaître qu’il s’applique également à « Dawn to Dusk », un morceau-monde de près de 11 minutes dans la lignée de « Spirit Bird » et « True Love », autres morceaux dont les ailes se déploient sur de longues minutes. Evoquant ici le sujet du suicide dans les communautés aborigènes, Xavier RUDD balaye ici le spectre complet des couleurs, proposant un chef-d’œuvre majoritairement acoustique, porté par une fragile mélancolie, et qui nécessite de nombreuses écoutes pour révéler ses facettes multiples. Porté par un motif mélodique devenant incantatoire avec l’ajout de chœurs, « Dawn to Dusk » est un tour de force, un morceau modestement titanesque à l’écoute duquel on ressort grandi et apaisé.
A côté de cela, l’expérimental « Sliding Down a Rainbow », avec son didgeridoo tribal, fait figure de bond dans le passé, le morceau évoquant les premiers albums de Xavier Rudd, tout comme « Ball and Chain », dont le motif reggae est apporté, une fois n’est pas coutume par le piano. Bénéficiant de la participation du rappeur aborigène J-Milla, et prolongé par une longue partie finale au didgeridoo, ce morceau témoigne de l’audace remarquable de Xavier RUDD qui continue à briser les barrières et abattre les derniers murs. Savoureux, tout comme le folk entraînant, bien que plus conventionnel de « We Deserve to Dream », autre grand moment de l’album.

Bariolé, à l’image du monde qu’il dépeint, Jan Juc Moon est un album dans lequel les émotions s’entremêlent autant que les instruments. Faisant cohabiter désespoir face à un monde qui court à sa perte, guitare, harmonica, saveur des beautés qui subsistent, didgeridoo, slide guitar, saveur des plaisir simples, Xavier RUDD, de sa voix toujours faussement fragile, propose une dixième réalisation qui balaye le spectre complet de ses influences, un album-synthèse constitué de chansons de très grande qualité, qui assoient un peu plus l’importance d’un artiste tel que lui dans notre paysage culturel. Ecoutez Xavier RUDD et, si vous le pouvez, aller le voir. Vous en ressortirez changé, et plus conscient du monde qui nous entoure.

4,5/5

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1. I Am Eagle
2. Jan Juc Moon
3. Stoney Creek
4. Great Divine
5. Ball And Chain
6. We Deserve To Dream
7. The Window
8. Slidin Down A Rainbow
9. Dawn To Dusk
10. Magic
11. Angel At War
12. The Calling
13. Joanna



             



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