Les CRANBERRIES nous avaient laissé une impression mitigée avec leur dernier album en date, un Wake Up And Smell The Coffee qui tentait maladroitement de renouer avec le passé rock de la formation irlandaise. En proie au doute, le groupe décide alors en 2003 de s'accorder une pause salvatrice, mettant en suspens la sortie hypothétique d'un nouvel album dont les chansons étaient alors en cours d'écriture. Quelques projets solo (pour Dolores O'riordan et Noël Hogan principalement) plus tard, le groupe nous revient, remonté comme jamais, et prêt à défendre bec et ongle un nouvel opus, Roses, dont la sortie est prévue pour février.

Pas bégueule, la belle Dolores se prend alors à renier les albums les plus récents du combo (« Après les trois premiers albums, le groupe est parti en vrille », se plait-elle à lancer à la cantonade), tandis que le groupe nous propose, en guise d'apéritif, un single qui paradoxalement reprend les choses là où les Irlandais les avaient laissées.

En un sens, « Tomorrow » constitue un résumé tronqué de la carrière des CRANBERRIES. On retrouve, avec grand plaisir, la voix si remarquable de la vocaliste aux idées bien arrêtées, tandis que le rythme entraînant et la mélodie délicieusement sucrée du morceau nous ramène à l'époque de « Bury the hatchet ». Tant et si bien que l'on se demande si ce titre ne serait pas issu des sessions d'écriture avortées de 2003. Les mordus de la musique du groupe seront aux anges. Les autres un peu moins. Car nous avons ici affaire à un CRANBERRIES formaté, certes loin d'être désagréable, mais reprenant tous les poncifs largement utilisés par le groupe sur ses derniers opus. Le rock le plus brut et contestataire des premiers albums semble aujourd'hui appartenir à une époque révolue, et l'on ne peut que regretter le manque d'audace qui ressort de l'ensemble. C'est frais et printanier, mais comme les saisons se succèdent, ce single ne semble pas destiné à marquer durablement les esprits.

Si le nouvel album tant attendu des CRANBERRIES est à l'image de ce titre transparent et passe-partout, il risque alors d'avoir des allures de pétard mouillé. Certes, le groupe conserve cette originalité naturelle, principalement véhiculée par la voix irrésistible de Dolores O'Riordan, mais l'illusion qui pouvait encore fonctionner sur les derniers albums du groupe aura, après tant d'années d'absence, grand mal à prendre auprès d'un public qui, somme toute, est passé à autre chose.