Je l’avais déjà dit dans ma chronique d’All’s Well de Camberwell Now, mais Recommended Record est vraiment un label qui sait faire plaisir à ses partisans, surtout lorsqu’il s’agit de rééditer et de remasteriser de vieilles discographies auparavant difficile à dégotter dans leurs totalités. Avec Out Of Cold Storage, RēR nous propose la discographie quasi-complète de l’un de ses groupes les plus renommés, THIS HEAT. Hormis les introuvables et dispensables This Heat with Mario Boyer Diekuuroh et Live In Krefeld, ce coffret nous rassemble donc les deux albums du groupe anglais, à savoir This Heat et Deceit, mais aussi d’autres disques moins connus, comme l’EP Health And Efficiency, le live Made Available et les compilations Repeat et Live 80/81. Une vraie petite mine d’or en somme, que je ne chroniquerai cependant pas dans sa totalité puisqu’à l’exception du Live 80/81, inédit sur lequel je vais au contraire spécialement m’attarder désormais, les autres skeuds rassemblés sur Out Of Cold Storage ont déjà été chroniqués sur le site. Je vous renvoie donc aux chroniques correspondantes pour plus d’informations.

Live 80/81 donc, n’est pas, comme son titre pourrait le laisser penser, un véritable live, mais une compilation de plusieurs morceaux respectivement enregistrés à Tilburg, Nimègue, Aarhus, Apeldoorn, Vienne et Reims. Comme quoi, THIS HEAT tournait alors dans toute l’Europe à l’époque. Néanmoins, le témoignage sonore de cette tournée s’avère avec Live 80/81 des plus décevants. Tout d’abord, on a ici affaire à des live qui, même remasterisés, conservent un son déplorable rendant l’écoute le plus souvent très désagréable. Pour des morceaux se basant justement sur la force de leurs expérimentations sonores, qui construisent cette ambiance si particulière propre au premier album, tels qu’ici « Horizontal Hold » ou « Music Escaping Like Gas », le résultat ne pouvait s’avérer que décevant, et c’est toute cette esthétique voulue rude et froide qui ne fonctionne finalement que partiellement, voire pas du tout. Et lorsque THIS HEAT s’attaque au répertoire de son second album, aux compositions volontairement plus brutes et brouillonnes, Live 80/81 devient un véritable calvaire, en particulier sur « S.P.Q.R », « Paper Hats » et « Makeshift Swahili », presque inécoutables, où d’autant plus nos trois musiciens ne brillent pas non plus des masses, ne faisant que reproduire leurs travaux de studio, au contraire de Made Available.

Ce qui est d’autant plus dommage, c’est que nous avions le droit ici à deux inédits, « Aerial Photography » et « The Rough With The Smooth », qui ne marquent définitivement pas l’auditeur de part ce son si dégueulasse, bien que, après réflexion, l’ambient désolé d’« Aerial Photography » reste un bon moment, qui aurait néanmoins été certainement meilleur accompagné d’une qualité sonore supérieure. Enfin, n’exagérons pas non plus, Live 80/81 n’est pas non plus dans son intégralité à dénigrer, puisqu’il a su garder, et heureusement, quelques excellents passages, plus particulièrement à la fin du disque, où étrangement la remasterisation se révèle plus réussie. Ainsi, « Twilight Furniture » se montrerait presque meilleure que son originale, avec ses percussions tribales et hypnotiques, et son ambiance minimaliste d’une tristesse prenante, gagnant en intensité lorsque le chant d’Hayward se fait entendre en retrait. Toutefois, je retiendrai encore davantage la performance du groupe sur l’interprétation vraiment folle d’« Health And Efficiency », sur laquelle THIS HEAT se lâche, conférant à ses envolées de guitare et son long passage instrumental une puissance jubilatoire.

Vous l’aurez toutefois compris, Live 80/81 reste un disque franchement dispensable dans la maigre discographie de nos Londoniens et on lui préférera ainsi largement Made Available, enregistré chez John Peel en 1977, d’une qualité au contraire excellente, également présent sur cet Out Of Cold Storage (titre en référence à la chambre froide désaffectée où le groupe travaillait). Pour en revenir à ce dernier, mis à part donc ce Live 80/81 et peut-être le plus dispensable Repeat, cette compilation reste ma foi une très bonne acquisition, malgré son prix, il est vrai, élevé. Néanmoins, rien que pour les deux chefs d’œuvre qu’il contient, le glacial This Heat et le violent Deceit, il mérite quand même toute votre attention, d'autant mieux qu'il contient un livret passionnant de plus 40 pages sur l'histoire du groupe, habituellement toujours assez discret quant à ses travaux.