Pour être complet dans l'étude de ce groupe fondamental de l'histoire de la musique pop/rock qu'est Ultravox, il ne faut pas omettre les deux albums des années 90. C'est un fait, ils sont gênants... un double exemple typique d'usurpation d'identité en vue d'une capitalisation sur celle-ci. Le plus difficile est de juger la musique objectivement en faisant abstraction du nom, surtout sur le premier, celui de 1993, Revelation.

Après U-Vox, paru en 1986, Midge Ure, Chris Cross et Billy Currie sont partis chacun de leur côté. Currie, le claviériste-violoniste, a entamé une carrière solo qui a bien vite stagné. En 1992, il a décidé de reformer un Ultravox avec de nouveaux partenaires, tous inconnus au bataillon. C'est encore le chanteur Tony Fennelle qui a réussi la plus belle carrière, mais surtout comme producteur musical pour la télévision. Les autres, Gerry Laffy, Neal Wilkinson et Jackie Williams, semblent avoir eu leur point culminant sur cet album enregistré et publié en 93. Pourtant, si les chansons ne sont pas impérissables, il y a un son globalement convaincant. La bannière Ultravox a peut-être été plus un poids qu'autre chose... ils n'ont pas bénéficié de l'indulgence qu'on aurait accordée à un nouveau groupe.

Revelation n'a pas marqué les esprits, c'est une évidence. Plus personne à part quelques fans du groupe ne le connaît encore. Il n'a jamais bénéficié de bonnes critiques et ne s'est guère vendu, bref, un bide. C'est à moitié justifié. Moi-même, j'hésite à donner des points «parce que c'est Ultravox» et pourtant, la musique n'est pas si mauvaise, surtout la première moitié de l'album. Il n'est même pas insensé de le trouver plus agréable que Quartet, le son est bien plus riche ici. Un son typique de son époque, avec une panoplie électronique moderne et bien maîtrisée. Le problème est le style, qui n'a vraiment pas grand chose à voir avec l'ordinaire d'Ultravox. Revelation propose une musique pop plutôt joyeuse, romantique mais légère, sans doute trop, les paroles sont d'ailleurs fort naïves.

On trouve ici un éclectisme modéré. Certaines chansons sont de la pop dansante, le single d'ouverture «I am alive» en est l'exemple le plus mémorable, «The great outdoors» et «Unified» lui ressemblent fort et prouvent un certain manque d'inspiration. «True Believer» est quant à elle carrément de la dance, au texte religieux plutôt douteux. Côté ballades, on a du bon, avec la délicate «Perfecting the art of common ground» et du poussif avec le final «The new frontier». La groovy «The closer I get to you» n'est pas très originale mais entraînante, Genesis n'a pas fait beaucoup mieux avec «Congo»... une comparaison sur laquelle nous reviendrons avec l'album suivant. La chanson-titre «Revelation» est une pop tranquille bien fichue, clairement un des numéros à retenir ici. Enfin, «Systems of love» est le plus beau passage, bien rythmé, avec un beau refrain dramatique. Dommage que tout ne soit pas de ce niveau.

Alors, que retenir de cette tentative ? Pas grand chose. L'enchaînement «Revelation-Systems of love-Perfecting...» est excellent, mais l'album dans son ensemble n'est guère mémorable. Trop de remplissage, pas assez de bonnes mélodies, on voit le genre : Un disque moyen comme il y en a des wagons, même pas susceptible d'intéresser un fan d'Ultravox. Impossible de le conseiller à quiconque mais peut-être un amateur d'électropop des années 90 y trouvera-t-il son bonheur...