Dans son petit chalet typique isolé au cœur de la forêt finlandaise, Aku Raski s’ennuie grave. Assis dans un rocking-chair en plastoc’ flashy, barbe en broussaille et crâne fraîchement rasé, le DJ contemple d’un œil triste le golfe de Botnie qui s’étend au loin. Dans quelques jours, il sera en Angleterre ou aux States, en Allemagne ou au Japon. Un sourire discret aux lèvres, il dit que ça va quand même lui faire du bien de retrouver une salle comble, uniquement remplie d’amateurs de musique électronique, les vrais, qui viendront le temps d’un set se défouler dans son déluge. Mais pourtant, il ne peut s’empêcher de regretter ses premières tournées, celles où il n’était encore que cet illustre inconnu surprenant tout le monde avec son « $$ Troopers », création magique qui allait lui valoir localement l’affectueux surnom de « Boucher-Charcutier ». Sobriquet somme toute un peu banal mais déjà bien mieux que celui de « Bûcheron », ce n’est pas parce qu’on a une grosse barbe et des épaules larges qu’on coupe du bois enfin ! Et puis la mode est un peu retombée, et Aku s’est mis en tête d’aller encore plus loin, toujours afin de satisfaire ce public cruel et goulu. Encore plus brutal, toujours plus brutal ! Et finalement il y eut Cryptocracy, le Graal, l’album qui devait mettre tout le monde d’accord. Ce fut le cas : tout le monde s’accorda à le trouver merdique. Alors Aku Raski est retourné dans son chalet typique isolé au cœur de la forêt finlandaise. Sur son rocking-chair en plastoc’ flashy. Une tasse de camomille à la main, allongée d’une très légère dose de MDMA troquée au vieux chasseur sami du coin. Pas trop de camomille non plus, c’était ça qui l’avait rendu malade lors du mixage de Cryptocracy.

Mais Aku Raski n’est pas HUORATRON pour rien. C’est un guerrier. Et il va le prouver en 2014. D’ailleurs Last Gang Records s’impatiente.

Trois sorties sont ainsi à signaler cette année. Pas au format physique ce qui est une première, mais uniquement en fichier MP3 à télécharger quelque part sur la Toile. Bim, coup sur coup déboulent donc DDoS, Pioneers of Nothing et Acid Reign. Mais on oublierait presque qu’Aku Raski est un sacré filou, car en fait Acid Reign reprend aussi les morceaux-titres des autres EPs virtuels précédents, dont l’on se demande bien l’utilité désormais. Et après l’écoute d’Acid Reign, on commence sérieusement à se poser la question si oui ou non le Finlandais est allergique à la camomille.

Parce que non, Acid Reign c’est non. Imaginez-vous HUORATRON reprendre ses premiers mixs, ouvrir le micro-onde, touiller un peu et nous resservir tout ça sur un plateau en carton. « Acid Reign » imite « Prevenge », déjà pas bien originale, quand « DDoS » souhaite retrouver sans succès la puissance de « Corporate Occult ». « Pioneers of Nothing » montre un petit effort d’assemblage, mais traîne en longueurs pour finir en remake de « Trolls ». HUORATRON ne recherche plus rien, il sélectionne d’anciens soundchips déjà utilisés et les rassemble en espérant que cela passe inaperçu. Acid Reign est un océan de vide. Si « DDoS » marque un demi-point en privilégiant pour une fois plus l’emballage que l’inlassable beat, on n’ira pas plus loin. Le règne de l’acide se termine en règne du truc qui ne fait aucun effet.

Après Cryptocracy, Acid Reign. Même constat, même déception : HUORATRON tourne en rond et se pastiche lui-même. Aku Raski se démène devant sa table de mixage en hurlant des « bordel comment j’avais fait la dernière fois ? », faisant valser câbles et Game Boy aux quatre coins de la pièce, sans de nouveau parvenir à renouer avec l’époque bénie de ses premières œuvres. Foutu camomille, elle est forte cette année !