Haa, San Cisco... en voilà un groupe plaisant à voir en 2012. Quiconque découvrait ce groupe australien se retrouvait face à des morceaux d'orfèvre, des pépites indie pop savoureuses et redoutables. Le premier album de San Cisco, qui faisait suite à quelques EP prometteurs, s'assurait ainsi une place de choix parmi les meilleurs albums de l'année, et c'était avec grande impatience que ses amateurs attendaient la suite, espéraient pouvoir s'enivrer de plaisir de nouveau.

Sauf que San Cisco a regardé son public dans les yeux et lui a dit : « NOPE »

Gracetown, sorti en mars 2015, débarque pour a priori satisfaire la soif intense de ses fans. Mais il n'en est rien. L'alarme avait déjà sonné avec Run : au lieu d'un single pas forcément novateur mais assez original, comme l'était Beach, San Cisco délivre une chanson fade, sans saveur, mais surtout qui n'est qu'une chanson pop banale comme on en trouve que trop souvent chaque année. Que s'est-il passé ? Pourquoi admettre l'existence d'un single aussi plat alors qu'on a eu Awkward, Beach ou encore Wild Things ? On me répond « changement de direction », et je dirais oui dans l'absolu, à condition que ce soit intéressant.

Bien entendu, le reste de Gracetown n'est pas fondamentalement meilleur. Ce ne serait pas drôle sinon. D'une part, San Cisco se fond de plus en plus dans le moule de la chanson de 4 minutes, toute prête pour les ondes sur la forme. Le résultat est triste, et peinant quand on sait que le potentiel des quatre musiciens a pu donner mieux. Too Much Time Together revient dans le style idéal de San Cisco, mais le refrain gâche toute la chanson. Autre chose, la batteuse Scarlett Stevens se retrouve au poste de chanteur principal sur Magic. C'est une bonne chose dans l'absolu, ce que les couplets qu'elle interprétait sur Awkward ainsi que les quelques refrains de l'album de 2012 ne démentent pas. Mais la chanson en elle-même n'est pas franchement grande et mémorable. Et puis sérieusement, c'est quoi ce Just for a Minute ? D'où vient ce morceau synth/nu disco à écouter en matant un coucher de soleil aux Bahamas ?

San Cisco veut aussi montrer qu'il peut toujours enivrer son auditeur en 2 minutes 30. Là encore, ce qui était vrai avant ne l'est plus maintenant. La plupart de ces morceaux tapent dans un style musical inadéquat pour le format, le pire étant Super Slow et son r'n'b sirupeux imbitable. Bon, il y a aussi Bitter Winter, à la fois nerveusement rapide et divertissante. Mais globalement, San Cisco s'effondre sur ce point, et se contente de mettre en évidence un calvaire moins long.

Dans ce fatras tristement plat, seul ressort About You. Enfin on retrouve le bon San Cisco, celui qui sait faire quelque chose de pop et plaisant, exprimant avec justesse des sentiments forts et jouant bien avec ses instruments. Et... c'est tout. On ne pourra pas reprocher au quatuor de vouloir innover, de ne pas rester planté sur ses acquis. Il n'empêche qu'on ne peut pas passer sous silence son erreur d'aiguillage non plus, qui l'orient vers le désert de la fadeur et de l'oubli, comme des centaines de formations indie pop qui l'ont précédé.