Le discographie solo pour le moins menue de Ronnie CARYL contient un seul « vrai » album, entièrement original, une dizaine de titres au compteur. Cela fait peu sur l'ensemble d'une carrière aussi longue, mais le succès n'étant pas au rendez-vous, c'est avec un certain ravissement que l'on découvre Leave a Light On, oeuvre aboutie d'un musicien-songwriter ayant trouvé son accomplissement.

Ce qui caractérise ce disque, c'est une génèse assez longue, une confection étalée sur les premières années de la décennie 90, et donc une sortie plutôt tardive. Il faut dire que les projets se succèdent : la comédie musicale Good Rockin' Tonight, la casquette de directeur musical pour la chanteuse Maggie BELL, bientôt le groupe The FREE SPIRIT..

Mais ce qui ressort également volontiers, c'est une envie d'être serviteur de son propre talent jusque dans l'écriture, en enregistrant avec quelques amis, vieux amis même... Le plus ancien, Phil Collins, avec qui les liens ne se sont jamais rompus, répond volontiers présent pour jouer quelques parties de batterie et s'échappe même quelques heures de la tournée marathon 91-92 de Genesis pour participer au clip de « Somewhere Within ». Cela veut bien un remerciement spécial...

« Somewhere Within », single porteur donc, est une merveilleuse ouverture, qui apporte la confirmation d'un réel talent et un vrai plaisir d'écoute. Tous les éléments y participent : les choeurs présents depuis l'intro gospel, la batterie puissante et aisément reconnaissable de Phil Collins, les claviers-cordes, la mélodie très belle et l'efficacité des paroles. Sans oublier le chant soul, clair et légèrement rocailleux de CARYL, conscient de ses limites, ainsi que son feeling de lead guitariste, qualité principale.

Pour le premier single You Got It, j'avais parlé d'un rapprochement stylistique avec Chris REA. Cela se confirme encore plus largement sur tout le présent album, avec une musique très « smooth », rose tendre avec des textes adaptés, et qui s'ancre immédiatement en tête. Pas d'abus de sucre cependant pour les ballades « One of Those Days » et « Here I Go Again », juste de très jolies mélodies et du travail bien fait. Dans un genre plus folk, « Where Would I Be » contient même un petit solo de trompette. La chanson-titre possède également son lot de qualités, avec l'emploi du piano Fender Rhodes par Neil Drinkwater.

À l'inverse, « Sweet Love » durcit le ton, le résultat n'étant pas moins brillant d'un point de vue guitaristique. Certains titres comme le funky « Jealousy » (ces cuivres !) se démarquent de la grande majorité des autres, dont le son possède une réverbération typique de ce caractère « tardif » d'une telle oeuvre, et qui de ce fait passe pour une nostalgie des 80's, à tort. Un autre vieil ami de CARYL et Collins, David Hentschel, se charge du mixage sonore, qui est réalisé au studio Fisher Lane « The » Farm, avec le consentement des collègues de GENESIS.

De cette expérience, on peut encore retenir le superbe blues lent « Only You », où Ronnie CARYL semble mieux à l'aise pour ses soli de guitare Stratocaster que partout ailleurs et où les choeurs (parmi lesquels Zoe Caryl, sa soeur) résonnent de manière encore plus belle. « Where the Wind Blows » possède cette ambiance atmosphérique et cette profondeur soul qui la porte très haut sur le final, ponctué par les breaks savants de Collins. De même pour « Don't Let Me Go », dont les guitares 12 cordes soutiennent un tempo folk, à l'empreinte aussi agréablement optimiste qu'entraînante.

Il va sans dire que ce disque est réservé aux plus curieux, sachant qu'il est difficilement trouvable et si c'est le cas, à un bon prix. C'est dommage car sur les dix chansons proposées ici, aucune ne fait pâle figure, bien au contraire ! Un des must-have de la pop/soul à l'anglaise. CARYL le compositeur autant que le chanteur et bien sûr, le guitariste, a eu raison de concrétiser un projet qui n'aura pas son pareil. Suite (et fin ?) dans une dizaine d'années...