S'intéresser aux Mamas and the Papas, c'est ouvrir l'une des plus belles pages de la pop US. Ce fameux groupe, que tout le monde ou presque ne semble plus connaître que par le biais de leur plus gros tube, fait pourtant partie du patrimoine musical section « haut du panier », et a réussi en très peu de temps à devenir en son temps un incontournable du paysage audio, au point de percer en Angleterre, rien que ça !

Pour un tel résultat, il fallait que The Mamas and the Papas soient des tueurs, et c'était le cas. Le groupe s'articule autour du couple formé par John et Michelle Phillips, rejoints par Denny Doherty. Tous trois évoluaient en 1965 dans les sphères du folk, genre alors bien en vogue chez l'oncle Sam, et voient l'avenir d'un oeil novateur. Pourquoi pas, en effet, faire se croiser le genre avec la pop music ? L'idée de mélange avait déjà été concrétisée avec les Byrds, qui avaient créé le folk rock à travers leurs albums de 1965, les Mamas and the Papas, devenus quatuor avec l'arrivée de Cass Elliot, en seront le versant pop.

De fil en aiguille, le quatuor vocal (ou presque, John Phillips jouant également de la guitare) se construit et dégage petit à petit son originalité. Les singles commencent à sortir fin 1965, avec un succès modéré, avant la sortie en 1966 du premier LP, nommé If You Can Believe Your Eyes and Your Ears. Le titre est aussi indigeste qu'un pan entier du power metal, mais dissimule un ensemble de pépites. Impossible de passer à côté, la première s'appelle California Dreamin'. Voilà LA chanson à laquelle on pense quand on parle des Mamas and Papas. En même temps, tout y est : harmonies vocales tout en majesté, chant lead aux paroles moins niaises que prévu, refrain qui tue (« All the leaves are brown, and the sky is grey... »), instrumentation simple mais pertinente. Une formule qui fait des ravages, et un léger côté intemporel. Somebody Groovin', qui a été sa face B, méritait pour sa part une place en face A. Cette chanson entrainante a le mérite de présenter de manière éclatante le chant de Cass Elliot en lead, qui s'affirme déjà en femme forte sur tous les plans. Elle donnera d'ailleurs du fil à retordre aux autres membres du groupe, en termes de ressources humaines. Monday, Monday affiche pour sa part des harmonies masculines et féminines qui s'affrontent pour ensuite mieux se rejoindre, notamment au niveau du refrain.

Tout n'est pas de cette trempe sur ce premier album, cependant. Le passif des musiciens assure une qualité irréprochable, mais ne suffit pas à expliquer certains choix. Reprendre Spanish Harlem, co-écrit par l'éminent Phil Spector, offre un résultat anecdotique au possible, et celle des Beatles est moyennement bonne, elle s'écoute sans marquer pour autant. Dans l'autre sens, peut-on repérer des chansons vraiment ratées ? Non, loin s'en faut, et heureusement.

L'intégralité de l'album n'est pas du tout parfait, mais cela suffira pour le Billboard. Le groupe aura d'ailleurs la surprise doublée de l'honneur de dominer le fameux classement, de truster cette première place si enviée. Mieux, The Mamas and the Papas frappent presque aussi fort en Angleterre, avec une 3e place pas dégueulasse du tout. Et dire que la machine ne fait que démarrer...