Avoir du talent, c'est bien. L'exploiter, c'est mieux. Avec une moyenne d'un album par an, on peut dire que Mikael Erlandsson et son LAST AUTUMN'S DREAM sont l'exemple parfait d'un talent fort bien exploité. Alors que la redite et la baisse de régime se font au fil des ans des menaces de plus en plus probables, le Suédois est parvenu à faire fi de ces écueils en restant fidèle à son style d'origine, un A.O.R. délicat et mélodique. Si certaines précédentes sorties du groupe n'ont pas autant marqué les esprits que ses premières réalisations, l'exigence de qualité que s'impose l'artiste oblige à un certain respect.

Car pour son douzième album, LAST AUTUMN'S DREAM ne déçoit pas. Mieux, il se révèle à ses auditeurs sous un jour nouveau, empreint d'une énergie renouvelée qui confère à cet album une fraîcheur appréciable. Le changement ne nous éclabousse pas aux oreilles, mais se révèle par touches discrètes. La hargne de "Bring Out The Heroes", le son rugueux de la guitare et l'énergie brute du chant de Mikael Erlandsson témoignent ainsi d'une envie certaine de se renouveler, ou tout au moins de varier son propos. La révolution n'est pas pour autant en marche. Dans son ensemble, Paintings poursuit avec une réussite insolente une oeuvre entamée il y a 13 ans, et ne surprendra pas les amateurs de la musique du groupe. L'impact des mélodies, encore et toujours, constitue l'essence même de cet album. Cette obsession de l'efficacité qui fait de "Out of Love" un titre imparable, porté par un refrain à faire danser les morts. Évoquant l'époque "Saturn Skyline", ce titre qui offre une place de choix aux claviers est une sucrerie que l'on consomme sans modération.

La reprise du "Take It On The Run" des REO SPEEDWAGON sert avant tout de prétexte à une flamboyante démonstration du nouveau guitariste (déjà présent sur Level Eleven) Peter Pac Söderström qui, sans s'éloigner outrageusement du style d'Andy Malacek, pose son identité et prouve qu'il n'est pas qu'un pourvoyeur de riffs. Parmi les autres petites surprises, notons le long solo de saxophone de "Too Late", qui clôt avec beauté un titre alambiqué et riche en mélodies appréciables. Avec la fausse ballade "An eye for an eye", qui se transforme en un titre hard rock très énergique, ou encore la délicate "In case of Landing on water", nous renouons avec les sonorités "classiques" de LAST AUTUMN'S DREAM, et l'on se prend au jeu sans réserves, en grande partie grâce à la voix légèrement éraillée de Mikael Erlandsson qui reste l'argument principal de cet A.O.R. de grande classe.

En se renouvelant juste ce qu'il faut, LAST AUTUMN'S DREAM propose un bien sympathique nouveau chapitre de sa féconde carrière, évitant le remplissage inutile et se faisant suffisamment varié pour maintenir l'intérêt tout au long de ces 10 titres qui ne souffrent d'aucune faiblesse. Un album classieux, idéal pour les amateurs convaincus ou les néophytes curieux.