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1972 Paul Simon
1986 Graceland
2016 Stranger To Stranger
 

- Style + Membre : Simon & Garfunkel

Paul SIMON - Graceland (1986)
Par COWBOY BEBOP le 19 Juin 2016          Consultée 2704 fois

Songwriter éclectique, Paul SIMON a toujours eu un don pour incorporer des influences étrangères et des styles variés dans sa musique. Reggae, musique traditionnelle anglaise ou sud-américaine, jazz, rythm'n'blues. Cette fois, c'est vers l'Afrique du Sud qu'il tourne son regard. Et comme notre ami ne fait jamais les choses à moitié, il décide de se rendre là-bas pour enregistrer avec de nombreux groupes locaux, bravant l'embargo culturel alors imposé par les pays occidentaux en réaction à l'apartheid. Il ira jusqu'à faire venir des musiciens sud-africains à New York pour réenregistrer les morceaux qui lui plaisent le plus, trois mois après les jam sessions initiales à Johannesburg. Il fait également appel à la formation de chant a cappella LADYSMITH BLACK MAMBAZO pour les chœurs de l'album, qu'ils enregistrent à Londres, et leur collaboration se passe si bien que le groupe l'accompagnera sur la tournée mondiale qui suivra la sortie de l'album.

C'est seulement après avoir enregistré une base musicale solide que SIMON s'attaque à la rédaction des paroles. Caressant un moment l'idée d'un album politiquement engagé, il abandonne vite, jugeant qu'il n'est pas apte à cela. Son but est plutôt de créer une symbiose entre le chant et les instruments : les textes ont été écrits avec la musique en tête, le rythme et les intonations étant alors d'une importance capitale. Le résultat est une nouvelle démonstration de son talent de songwriter. C'est une facette jusqu'alors inconnue de son chant qui s'offre à l'auditeur : le phrasé est fluide, parfois presque parlé, s'adaptant aux creux et aux courbes des rythmiques africains. Ses textes sont émaillés de petites trouvailles : comparaisons poétiques (« loosing love is like a window in your heart ») ou abstraites (« the Mississippi delta was shining like a national guitar »), allitérations (« the boy in the bubble and the baby with the baboon heart »), ou encore des tirades délicieusement absurdes (« I could say oooooh and everybody knew what I was talking about ») qui indiquent que les textes de Graceland ne sont pas à prendre trop au sérieux et que leur signification est secondaire face à la musique.

La musique tient en effet une place centrale dans cet album, peut-être plus qu'elle ne l'a jamais fait jusqu'alors dans une œuvre de Paul SIMON. Graceland mélange de nombreux styles en un insouciant cocktail : rythm'n'blues, zydeco, country, folk. Décennie 80 oblige, les synthétiseurs sont également de la partie. Leur utilisation mesurée a permis à l'album de très bien supporter le passage du temps : le riff imparable de « You Can Call Me Al » est toujours aussi efficace aujourd'hui. A côté de ces touches de modernité cohabitent des guitares aux accents très vintage, telles qu'on aurait pu en trouver sur des albums de soul et de rock'n'roll des années 50. La réverb, le slapback (un léger écho presque « collé » aux notes qui donne cet effet caractéristique de « dédoublement »), les guitares au sons clairs et les rythmiques old-school plébiscitées par les musiciens sud-africains, tout cela évoque pêle-mêle le label Sun, Elvis PRESLEY, et les costumes rayés. En voyageant à plusieurs milliers de kilomètres de son pays natal, SIMON a retrouvé les sonorités qui ont bercé son enfance. Le pèlerinage vers le ranch de « Graceland » symbolise une sorte de retour aux sources, une manière pour SIMON, qui sort d'une période difficile au niveau personnel et professionnel, de renouer avec les racines de la musique américaine et de retrouver son inspiration.

La colonne vertébrale de l'album, c'est la basse : ronde, élastique et bondissante, c'est elle qui fait la cohésion du tout et lie les chansons entre elles. Graceland est album construit sur les rythmes, les pulsations et les boucles mélodiques. Entre les tissus de guitare viennent broder des instruments plutôt inhabituels pour de la pop : piano-accordéon, tin whistle (une petite flûte en métal)… La rencontre des deux mondes, loin de tomber dans l'incohérence et la cacophonie, engendre quelques-unes des plus belles chansons jamais écrites par SIMON. Le lumineux « The Boy In The Bubble » combine une section rythmique évocatrice du style de Johnny CASH avec un accordéon typique du « township jive », qui lui donne ce côté dansant et entraînant. Les sonorités de « Gumboots » et « Crazy Love, Vol. II » reproduisent celles de la fameuse cassette qui fit découvrir à SIMON la musique populaire africaine, en les enrichissant avec divers instruments « occidentaux », comme du saxophone par exemple. Le « travellin' rythm » des couplets du morceau-titre rappelle la country américaine, tandis que le refrain est emprunté à l'Afrique du Sud. L'accent mis sur les rythmes, inédits dans la musique occidentale de l'époque, n'empêche pas les chansons de posséder des mélodies magnifiques et mémorables. Chaque morceau possède une atmosphère propre et évoque des émotions différentes, tout en s'intégrant parfaitement dans le tout constitué par l'album.

SIMON fait intelligemment usage des chœurs traditionnels africains en les intégrant naturellement dans la musique, comme on peut l'entendre sur le syncopé « I Know What I Know » (avec les GAZA SISTERS), le nostalgique « Under African Skies » ou encore le guilleret « Diamonds On The Soles Of Her Shoes ». Il leur réserve toutefois une piste entièrement chantée a cappella, le superbe « Homeless », où sa voix vient se fondre dans celles des autres chanteurs. Enfin, des groupes américains aux ascendants très « roots » font leur apparition sur la fin du disque, achevant de boucler le cercle des influences. « All Around The World », enregistré avec le groupe américano-mexicain LOS LOBOS, fait en quelque sorte la synthèse de l'album : chœurs africains, drum machine et cuivres se mélangent joyeusement dans ce qui reste au fond une chanson résolument pop.

Graceland, c'est une collection de vignettes colorées, de paysages et d'impressions, recueillies et compilées avec soin par Paul SIMON. La chanson éponyme est inspirée d'un voyage avec son fils au fameux ranch, dans « Crazy Love, Vol. II » il se dépeint sous les traits d'un archange gras et blasé et évoque son divorce difficile. Quant à « You Can Call Me Al », elle se fait l'écho de son expérience du dépaysement en pays africain en décrivant les impressions d'un voyageur qui visite pour la première fois un pays étranger. Dans l'atmosphère merveilleuse et mystique qui enveloppe tout le disque évoluent des personnages qu'on dirait tout droit sortis d'un conte : un ex-présentateur de jeu télévisé reconverti en ermite, un jeune homme pauvre et une riche jeune fille qui porte des chaussures incrustées de diamants, un prêtre noir qui suit le chemin tracé par les constellations, autant de personnages qui viennent s'ajouter à la longue galerie de portraits déjà peints par SIMON et s'installent dans l'imaginaire de l'auditeur pour ne plus le quitter, devenant plus réels avec chaque écoute.

Depuis le début des années 80 et surtout depuis l'échec commercial de Hearts & Bones, Paul SIMON était tombé en disgrâce chez les critiques et le public. Profitant de ce que sa maison de disque le considère comme un has-been gentiment dérangé et ne se mêle pas de ses affaires, lui et le producteur Roy Halee peaufinent Graceland sans aucune pression extérieure. Ils font un usage conséquent du digital pour éditer et mastériser les prises analogiques, apportant ainsi une dimension moderne au processus de création. Le résultat, à la fois rétro et innovant, multi-culturel et intime, est sans conteste l'un des meilleurs albums des années 80 tous genres confondus. Salué par la critique et le public (cinq fois platinium aux États-Unis, il restera le plus grand succès commercial de la carrière de Paul SIMON), Graceland mélange brillamment tradition et modernité pour créer ce cachet intemporel qui sied aux plus grands albums.

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   COWBOY BEBOP

 
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- Paul Simon (chant, guitare acoustique, basse)
- Rob Mounsey (synthétiseur)
- Ray Phiri (guitare)
- Adrian Belew (guitare)
- Demola Adepoju (pédale steel)
- Daniel Xilakazi (guitare)
- Sherman Robertson (guitare)
- César Rosas (guitare, chœurs)
- David Hidalgo (guitare, accordéon, chœurs)
- Conrad Lozano (basse)
- Alonzo Johnson (basse)
- Lloyd Lelose (basse)
- Bakithi Kumalo (basse)
- Isaac Mtshali (batterie)
- Vusi Khumalo (batterie)
- Petrus Manile (batterie)
- Alton Rubin, Jr. (batterie)
- Louie Pérez (batterie)
- Steve Gadd (percussions)
- Makhaya Mahlangu (percussions)
- Ralph Macdonald (percussions)
- Youssou N'dour (percussions)
- Babacar Faye (percussions)
- Assane Thiam (percussions)
- James Guyatt (percussions)
- Lulu Masilela (tambourin)
- David Rubin (washboard)
- Alton Rubin, Sr. (accordéon)
- Jonhjon Mkhalali (accordéon)
- Forere Motloheloa (accordéon)
- Barney Rachabane (saxophone)
- Mike Makhalemele (saxophone)
- Teaspoon Ndela (saxophone)
- Lenny Pickett (saxophone)
- Earl Gardner (trompette)
- Alex Foster (saxophone)
- Ronnie Cuber (saxophone)
- Jon Faddis (trompette)
- Randy Brecker (trompette)
- Lew Soloff (trompette)
- Alan Rubin (trompette)
- Dave Bargeron (trombone)
- Kim Allan Cissel (trombone)
- Morris Goldberg (tin whistle, saxophone)
- Johnny Hoyt (saxophone)
- Steve Berlin (saxophone)
- The Everly Brothers (chœurs)
- The Gaza Sisters (chœurs)
- Diane Garisto (chœurs)
- Michelle Cobbs (chœurs)
- Ladysmith Black Mambazo (chœurs)
- Joseph Shabalala (chœurs)
- Linda Ronstadt (chœurs)


1. The Boy In The Bubble
2. Graceland
3. I Know What I Know
4. Gumboots
5. Diamonds On The Soles Of Her Shoes
6. You Can Call Me Al
7. Under African Skies
8. Homeless
9. Crazy Love, Vol Ii
10. That Was Your Mother
11. All Around The World Or The Myth Of Fingerprints



             



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