On a beau se réclamer de la fidélité, il y a certains moments où on la perd, où on la retrouve ensuite, peut-être. Cela arrive avec certains artistes que l'on a adulé, mais quand cela concerne une période particulière, un vivier de création ou d'interprétation, on peut sentir un pincement au coeur. C'est ainsi que je repense à Katie MELUA, lorsque l'occasion m'est donnée, comme la sortie d'un nouvel album.

J'avais en effet "lâché" la belle chanteuse caucasienne, m'étant senti fort peu convaincu après le magnifique The House (2009) par le retour de Mike Batt à la gestion de sa production, pour deux albums qui n'atteignaient pas un niveau d'affection bien haut et dont je peine à me souvenir d'une seule chanson parmi celles qu'ils contenaient.

Katie MELUA, elle-même, après avoir rempli son contrat de six albums avec Dramatico, le label de Batt, n'a absolument pas cherché à le reconduire et met en application la phrase fatale qu'une personne vous dit parfois dans votre vie : "C'est mieux comme ça".

Cet album "de Noël", judicieusement baptisé In Winter ("en hiver") pour ne pas s'en tenir à la célébration de la Nativité, n'est sans doute pas ce qu'on aurait attendu de MELUA comme retrouvailles, mais il lui permet de redonner un coup de fraîcheur – c'est bien le cas de le dire ! - à sa carrière, prendre un nouvel envol. À juste titre.

Dès le premier morceau, il y a de quoi être convaincu et succomber à la passion, avec un goût de nouvelle première fois, différemment par rapport à l'année 2003. In Winter nous permet de renouer avec l'univers de Katie mieux que jamais en cette décennie 2010, tout en ayant l'impression de la redécouvrir, à travers ce disque qui est son plus féminin.

Enregistré en Géorgie, son pays natal, afin de revenir aux sources, In Winter est réalisé en compagnie du choeur de la ville de Gori, exclusivement constitué de femmes. La douce et ample réverbération d'un lieu de culte hante les dix chansons de l'opus, à commencer par celles réalisées a-cappella. Avec des phrases autrement qu'en anglais, s'il vous plait...

Comment décrire des merveilles comme "The Little Swallow" et la sélection "All-Night Vigil / Nunc Dimittis", où la voix angélique de MELUA est entremêlée à celle du choeur avec un souci de pureté, de grâce passionnée ?... "Cradle Song", même avec le choeur seul en l'absence de la chanteuse, est splendide. Tout cela est connoté musique sacrée ancienne, mais "A Time to Buy" fonctionne bien aussi dans un registre gospel.

Certains moments sonnent plus "chansons pop" dans la tradition des albums de la belle qu'on a connus et, contre toutes attentes, c'est The House qui ressort en particulier, parce que ses morceaux les plus intimistes misent sur la voix de Katie, sa guitare, ainsi que des arrangements mesurés. C'est le cas de "Perfect World", de "River", de "Plane Song" et ses sifflements à la Alessandroni (l'ami d'Ennio MORRICONE)...

Le disque est relativement court, mais c'est un voyage splendide qui se conclue avec une version de "O Holy Night", d'une qualité totalement inattendue, tant MELUA et le choeur y dépassent les cimes d'élégance et de beauté, avec de jolis effets de canon sur le final... Qui l'eût cru avec un tel classique ? In Winter fait son petit chemin à travers une foule d'albums au thème similaire qui ne nous touchent pas autant, alors que lui n'a nul autre besoin qu'un simple apparât et le talent d'une demoiselle qui a mûri.