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BACHMAN TURNER OVERDRIVE - Ii (1973)
Par LE KINGBEE le 7 Novembre 2021          Consultée 925 fois

Certaines acquisitions de disques restent plus ou moins mémorables. Celui-ci vient de chez Pygmalion, un magasin situé à deux pas du Chatelet qui nous servait de base arrière. Ce jour-là, devant les regards goguenards de quelques copains plus âgés, j’apprenais avec stupeur que Not Fragile n’était pas le premier disque de BACHMAN TURNER OVERDRIVE mais le troisième. On parle là d’une époque où Internet n’existait pas, où l’ORTF était sur le point de disparaitre, les seuls moyens pour satisfaire notre soif de culture musicale résidait dans la presse écrite, une presse qui bien souvent suivait les diktats des maisons de disques, des slogans publicitaires, en clair celui du pognon.

Bien que cela n’intéresse probablement personne, hormis les gens dans le même cas, je fais partie des gens qui ont découvert BTO avec Not Fragile, un album loin d’être extraordinaire si ce n’est par des riffs de guitares terriblement accrocheurs et bien bourrins, alors que certains virtuoses techniques du moment ont été oubliés depuis des lustres.

On ne reviendra pas sur l’historique de Randy Bachman et de ses potes (voir la chronique de Not Fragile) mais c’est par un gros coup de pot que BTO allait sortir de l’ornière ou du chapeau. Après avoir officié au sein de GUESS WHO, Randy monte Brave Belt. L’aventure sera de courte durée et s’arrête au bout de deux albums édités par Reprise Records, le label estimant qu’il est temps de stopper les frais. Il faut dire que les deux galettes n’ont bénéficié d’aucune promotion, hormis quelques lignes dans la presse canadienne et nord-américaine.

En Amérique, Mercury est en train de boire le bouillon, la firme vient de perdre URIAH HEEP au bout d’un unique album et une poignée de singles et Rod STEWART part chez Warner, soit les deux plus gros vendeurs destinés à la clientèle internationale. Charlie Fach, un ancien grouillot publicitaire de la RCA devenu vice-président chez Mercury se prend la tête à deux mains. Ancien dénicheur de talent pour la RCA à Camden, Fach soucieux de relancer le label se met à écouter des tonnes de démos envoyées par de multiples agents. La rumeur prétend que les bandes sont toutes aussi mauvaises les unes que les autres qu’elles atterrissent toutes derechef à la poubelle. Celle envoyée par Randy Bachman serait tombée à côté, ce qui aurait incité le grand manitou de Mercury à réécouter l’enregistrement et à revoir son jugement. Faut-il voir là un signe du destin ? Ne lui jetons pas la pierre à ce fantasque président, grand amateur de Country, c’est lui qui signera KOOL and THE GANG, les Ohio players permettant ainsi à Mercury de grossir son portefeuille.

Tout simplement intitulé "II", appellation qui a le mérite d’être claire à défaut d’être originale, ce second opus entièrement compose par la brochette Randy, Tim, Rob Bachmann et Charles F. Turner fait la part belle au Rock Boogie et au Hard Rock. Mais la grande recette de la réussite du quatuor réside dans les lignes mélodiques relativement élémentaires et des riffs de gratte répétitifs qui finissent souvent par accrocher l’oreille et devenir obsédants. Enregistré à Seattle, au Kaye-Smith Studios, un studio d’enregistrement détenu conjointement par Lester Smith et l’acteur chanteur Dany Kaye. Non content de proposer des sessions d’enregistrements, le label exploitait une demi-douzaine de stations radios couvrant l’Oregon, le Kansas, l’Ohio et Washington. Parallèlement à ses activités sonores, la firme tourne dans le giron de sa propre société de production, organisant de grosses tournées et participant activement à la renommée de Steve MILLER et BTO. Lors d’une interview postérieure, Charlie Fach déclara qu’il savait qu’il avait décroché la timbale en écoutant "Takin’ Care Of Business", un titre qui lui rentra aussitôt dans la tête pour ne jamais en sortir.

Lors de sa sortie, Mercury s’est lancé dans une habile promotion éditant plusieurs singles mettant en avant "Let It Ride", "Tramp" et l’imparable "Takin’ Care Of Business". Totalement inconnus sur le territoire américain, les canadiens allaient devenir en deux coups de cuillères à pot l’un des groupes phare de la décennie par le biais d’innombrables passages sur les ondes radios détenues par Smith-Kaye Productions. Rien que dans la région de Saint Louis, le disque se vendra à plus de 10000 exemplaires en moins d’une semaine, un bon chiffre pour un groupe quasiment inconnu.

BTO propose ici huit pistes assez longues, la plus courte "Stonegates" avoisinant les 4 minutes. Reposant sur les jeux des deux guitares parfaitement complémentaires et sur une rythmique solide comme un roc, excellente dans son rôle de gardienne du temple, le groupe distille ici des titres costauds mais terriblement harmonieux. Si "Blown" étrangement placé en tête de gondole se révèle comme un honnête Boogie Rock sans plus, les choses deviennent sérieuses avec le délicat "Welcome Home" sur lequel la guitare s’enhardit par passages alors que sur les cinquante dernières secondes, Randy Bachman nous offre un jeu de guitare Jazzy digne de Kenny BURREL. "Stonegates" nous renvoie entre CREEDENCE et les QUO, les volutes de guitares donnent l’impression d’avaler les grands espaces à triple galop. A contrario, ce sont les percussions qui viennent poser de solides fondations sur "Give It Time", Rob Bachman imprimant une cadence presque tribale pas si éloignée de BLACKFOOT.

Le groupe est également capable de bifurquer entre les cases Hard et Country Rock, c’est ainsi que "Tramp" * tient aussi bien de MARSHALL TUCKER BAND que de CROSBY, STILLS & NASH. Sur "I Don’t Have To Hide", le ton se fait plus hargneux alors que la guitare diffuse une coloration amérindienne renforcée par une batterie en droite ligne avec des tambours appelant ses braves à la bataille. Sur "Let It Ride" on retrouve une affiliation avec le jeu de guitare de CSN &Young, la seule différence résultant dans un chant plus prononcé et hargneux. A noter que lors de certains concerts d’anniversaires ou de commémoration que GUESS WHO (avec Randy Bachman) reprend encore le titre sous l’acclamation de la foule. Le titre sera repris sans génie ni saveur par Kobra And The Lotus, un groupe de Métal canadien.

Terminons par "Takin’ Care Of Business" ¤, un excellent Boogie Rock bien graveleux, terriblement accrocheur porté par un excellent riff de guitare et une ligne mélodique simple et répétitive ? Parfois la simplicité a du beau. Au fil des années, le titre deviendra un grand classique du Rock FM et sera repris entre autres par STATUS QUO, ATLANTA RHYTHM SECTION, Alabama ou Dread Zeppelin, mais à l’instar d’un slogan d’une célèbre pub, c’est souvent vers l’original qu’on revient. En 1980, la rappeur Kurtis Blow en fera une version qui vaut le détour.

Avec ce second disque, BTO posait son nom parmi les grands groupes de Hard Rock tendance FM, AOR et Boogie. A noter que le fameux logo BTO ne figure que sur la pochette dorsale. Presque un demi-siècle après sa sortie, cette galette s’avère encore savoureuse et croquante.



*Titre homonyme à celui de Lowell Fulson.
¤Titre homonyme à celui de Rudy Toombs popularisé par Freddy King.

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   LE KINGBEE

 
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- Randy Bachman (guitare, chant 2-6-8)
- Tim Bachman (guitare, chant 1-7)
- C. F. Turner (basse, chant 3-4-5)
- Rob Bachman (batterie, percussions)
- Norman Durkee (piano 8)


1. Blown
2. Welcome Home
3. Stonegates
4. Let It Ride
5. Give It Time
6. Tramp
7. I Don't Have To Hide
8. Takin' Care Of Business



             



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