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- Membre : Helena

KATERINE - Robots Après Tout (2005)
Par THOM le 30 Novembre 2006          Consultée 6521 fois

Depuis son premier album en 1994, on avait de Katerine l'image du dandy à la mèche gominée, égrenant les fines provocations sur fond de bossa nova chic choc. Celui qui nous sortait nonchalamment "tu vois, moi je suis une merde, et je vous emmerde", conscient de ne s'adresser qu'à un public relativement restreint (ce qui n'avait pas l'air de le complexer pour autant). Honnêtement, on voyait mal comment les choses pouvaient en être autrement. C'est en septembre 2005, lorsqu'on entendit le titre "Louxor, j'adore" que les spéculations ont commencé à fuser. Pas de doute, c'était bien du Katerine, plus maniéré que jamais, et poussant le pastiche du parisianisme à des hauteurs inégalées.

La différence étant que le chanteur a envoyé bouler les arrangements langoureux au même titre que ses Recyclers, qui l'accompagnaient sur les précédents albums, en échange d'une simple boîte à rythmes, et aux manettes le canadien Gonzalès (avec qui Katerine avait déjà collaboré). Au vu de la provocation affichée, ce serait donc soit un foirage monumental, soit le carton de l'année. En tout cas rien qui puisse engendrer de moites critiques, du style "oui... mais bon..., enfin bof." Un an après, il s'avère que la deuxième proposition était la bonne, et on suppose qu'elle lui a fait gagner des millions. Une grosse partie de ce succès revient à la chanson "Louxor j'adore" et son refrain "Je coupe le son... et je remets le sooooooon", qui révéla aux yeux des béotiens un nouvel amuseur public. Et aux avertis de contempler le tour de force : la preuve que Katerine pouvait réussir à faire de la musique de boîte de nuit sans se paumer, tout en critiquant irrésistiblement le clubbing.

Certes, Katerine a toujours critiqué, mais l'ambition qui sous-tend cet opus est bien plus énorme que celle du tout-venant des contestataires qui se ramasse à la pelle (n'est pas Noir Désir qui veut). D'ailleurs le titre (pastichant celui d'un autre groupe affilié aux night clubs), donne à lui seul l'envergure du génie. Car Katerine s'affiche dans son Robots Après Tout comme le personnage social, dépressif limite ("Borderline"), stressé et flippé qu'on nous dit être le parangon du citoyen moderne. Parlant à la première personne dans toutes les chansons, il est le héros de notre vie de tous les jours, cristallisant sur son personnage tout ce en quoi nous nous reconnaissons, et aussi ce en quoi nous redoutons de nous reconnaître. La mise en abîme est vertigineuse, et tout y passe : la frime de "100% VIP", le cauchemar de "Le 20-04-2005" (qui nous renvoie notre impuissance face au FN), et tout ce qui caractérise notre monde parfait ("78-2008", entre autres).

Des chiffres, des acronymes, des listes comme s'il en pleuvait et pourtant le miracle est là : il s'agit bien de poésie. Il se greffe sur la musique des machines (dont les intros sont souvent particulièrement entraînantes), une musique des mots tellement parfaite et évidente qu'on pourrait passer sans la voir. J'en veux pour preuve l'énumération de "100% VIP" sur fond de beat electro : les mots ont un tel rythme, s'enchaînent si naturellement que si ce n'est pas de la musique, je veux bien me faire curé...

Notez qu'avec mes mots de rhéteur, je ferais passer cet album pour aussi chiant qu'un film colombien de 82 en deuxième partie de soirée sur Arte. Que nenni : Katerine n'a rien du moraliste verbeux, et son humour acerbe est plus que jamais présent (de prime abord, la pochette donne le ton...). Un exemple parmi tant d'autres : on n'a pas fini de se régaler de "Excuse-moi" et de sa (mauvaise) méthode anti-éjaculation précoce. Ou encore les provocations style "Après moi", dans lequel des gamins sont invités a répéter "qu'ils sont tous des imbéciles, qu'ils se prennent pas pour de la merde, etc...".

Sans en avoir l'air, Philippe Katerine a fait avec cet album une oeuvre culte (terme absolument pas galvaudé...) et parfaitement ancrée dans notre époque, qui repousse loin, très loin les limites convenues de la chanson (française), comme seul Gainsbourg l'avait fait avant lui. Et il semble bien qu'il ne faudra pas comme pour ce dernier, attendre quinze ans que les kids d'Albion s'en rendent compte, avant de voir notre bon peuple se réveiller...

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- Philippe Katerine: Chant
- Gonzales Et Renaud Létang: Programmation


1. Etres Humains
2. Borderline
3. Numeros
4. Le Train De 19h
5. Louxor J'adore
6. Le 20-04-2005
7. Titanic
8. 100%vip
9. Patati Patata
10. Excuse-moi
11. Qu'est-ce Qu'il A Dit ?
12. 78-2008
13. Après Moi
14. 11 Septembre



             



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