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JAZZ  |  STUDIO

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- Style : Henry Cow, Steve Hillage
- Membre : Robert Wyatt , Kevin Ayers , Uk, Matching Mole, Gilgamesh, Soft Heap

The SOFT MACHINE - Third (1970)
Par ONCLE VIANDE le 8 Décembre 2006          Consultée 10325 fois

Je l’avoue, j’ai sauté sur « Third » de peur que quelqu’un ne le chronique avant moi. Bien que cet empressement était injustifié, je reçus l’offrande avec soulagement puis, à mesure que je prenais conscience qu’il m’incombait de parler de cette chose, je fus progressivement envahi d’une angoisse paralysante. J’ai alors retardé cette mission écrasante, esquissant une phrase par ci, une introduction par là, la repoussant toujours à plus tard, consacrant ma pauvre plume à d’autres disques comme autant de faux fuyants n’exigeant pas la même implication. Puis arriva le moment du corps à corps ; au pied du mur (et quel mur), il fallut me résoudre à parler enfin de la chose en question, rassembler les bribes de phrases jusqu’ici accumulées et esquisser un semblant de chronique.
Mon premier réflexe fut d’effacer la mention « Canterbury » pour la remplacer par un « Jazz » rageur, sans doute pour me donner l’illusion de partir sur une base connue. Le bon vieux « progressif » des familles eut été plus judicieux. Avec lui, je ratissais large et rameutais un public de fans acquis à LA cause, la vraie. Malheureusement, ou heureusement, « Third » a tellement peu en commun avec la nébuleuse progressive (laquelle gagnerait en cohérence et en crédibilité à se voir étiquetée « symphonique » ou « art rock ») que cet amalgame lui aurait été préjudiciable. « Third » n’est pas plus progressif que traditionnel, pas plus jazz que rock, c’est un OMNI : un Objet Musical Non Identifié comme le rock a su en produire une poignée depuis quarante ans, et qui échappe à toute classification, à toute comparaison, et dieu merci, à toute notation.

S’attaquer à cette chose s’apparente à braver l’impossible. Chroniquer « Third », c’est gravir l’Everest en tongs avec un petit lu dans le sac à dos. Voila quinze ans que j’ai l’objet, et je me demande sincèrement si j’en ai une connaissance suffisante pour prétendre en parler. J’ai encore en mémoire des commentaires pertinents sur cette entité sonore ; des choses comme « eh bé ! », ou bien « ouh là ! », ou encore « bof » ; ce dernier commentaire émanant d’un fin mélomane ayant acheté le disque la veille et s’apprêtant à le revendre le lendemain.
J’ai des souvenirs de contorsions journalistiques : le chroniqueur désemparé parlait de l’album précédent, l’air de rien, consacrait dix lignes à nous expliquer en quoi Soft Machine ne faisait pas du jazz rock, puis terminait par une brève biographie du groupe, ni vu ni connu ; circulez y a rien à voir ! Melmoth, dans un Rock’n Folk de 1970, fut celui qui s’en tira le mieux. Il avait compris avant tout le monde qu’on ne pourrait jamais parler de la chose, et était parti dans une prose surréaliste exprimant par là son impuissance à mettre en mots l’objet, et fournissant à ce journal, encore passionnant à l’époque, l’une de ses plus belles pages.

Il y a des choses que l’on ose plus appeler des disques. Des choses qui vous bottent les fesses et vous rappellent pourquoi vous vous mettez un casque sur les oreilles huit heures par jour. Des entités musicales qui vous administrent à nouveau la preuve qu’il y a bien, en ce bas monde, des moments de lumière, de magie, d’amour, qui défient le temps et échappent aux tristes inerties terrestres. Des réalisations exhaustives et totalisantes, qui semblent tout contenir en elles, tels des récipients aux dimensions infinies dont on ne verra jamais le fond. « Third » fait parti des ces œuvres « scalpels » qui vous ouvrent le cerveau, le dilatent, en délient les nœuds et le décompartimentent pour le rendre apte à percevoir autrement : sans limitation ni division. Alors non, je ne vous parlerai pas de « Third », car en parler, c’est mentir.
Il est un mot qui, à force d’utilisations abusives a perdu non seulement son sens et sa force, mais a aussi acquis le pouvoir de réduire à néant la crédibilité d’une chronique tant son usage se montre presque toujours inopportun. « Third » m’octroie ce rare plaisir de l’employer sans risquer le ridicule, et encore moins l’erreur : oui, "Third" est un chef d’œuvre.

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   ONCLE VIANDE

 
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- Mike Ratledge (orgue, piano)
- Hugh Hopper (basse)
- Robert Wyatt (batterie, chant)
- Elton Dean (saxophone alto)
- Rab Spall (violon)
- Lyn Dobson (flute, saxophone soprano)
- Nick Evans (trombone)
- Jimmy Hastings (flute, clarinette basse)


1. Facelift
2. Slightly All The Time
3. Moon In June
4. Out Bloody Rageous



             



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