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HOWLIN' WOLF - Howlin' Wolf (1962)
Par LE KINGBEE le 15 Janvier 2019          Consultée 1831 fois

Nous sommes maintenant en 1962 et Chess se décide enfin à sortir le second disque du Loup Hurlant. Parfois appelé « The Rockin’ Chair », ce second disque éponyme demeure probablement le plus connu de l’harmoniciste et pourtant il n’a pas encore été bien aidé sur ce coup ci. On ignore ce qui a pu passer dans la tête de Don Bronstein, photographe et directeur artistique de la maison Chess, pour pondre une pochette aussi tartignole. Un Rockin’ Chair sur lequel s’appuie une guitare acoustique Bast, pas folichon pour faire accourir les acheteurs. En fait on peut se demander comment un gars qui avait également en charge les couvertures du magasine Playboy a pu faire des pochettes aussi moches pendant de si longues années, de 1957 à 68 année de sa mort. Rien que pour l’année 62 ce ne sont pas moins de 26 pochettes que va nous refourguer le photographe.

Cette fois ce disque sans titre est produit par Ralph Bass, celui qui osa produire le « Please, Please, Please » de James Brown contre l’avis de Sid Nathan, boss du label King. Enfin quand on dit produire, disons que Bass ne s’est pas trop cassé le bonichon sur ce coup là, il a tout simplement incorporé six singles. Et oui, une moitié de ces titres peuvent faire figure de recyclage, mais attention de la refourgue comme ça, on en redemande tous les jours. Ralph Bass a donc regroupé six 45 tours enregistrés entre juin 1957 et décembre 61 et pour mieux noyer le poisson, les douze titres ont été éparpillés au petit bonheur la chance sans la moindre cohérence chronologique.

Cette fois ci Chester Burnett, alias Howlin’ Wolf, n’a composé que deux morceaux. Hormis « Going Down Slow », le classique de Jimmy Oden, les neuf titres restants proviennent de la plume de Willie Dixon. Si le standard de St Louis Jimmy Oden était un Piano Blues bien caractéristique de Chicago, la version du Loup se révèle nettement plus stylisée grâce à d’intenses touches de piano. Signalons que le loup a changé deux couplets et que Dixon intervient comme conteur.
On peut aujourd’hui s’étonner que Ralph Bass n’ait pas jugé bon de placer « Tell Me », l’une des deux compos du Loup en début ou milieu de disque. Non pas que le morceau soit mauvais, mais la sonorité plus brute de décoffrage interfère légèrement par rapport à l’ensemble. Seconde création d’Howlin’ Wolf, « Who’s Been Talkin’ » est un superbe Slow Blues qui vient adoucir le contenu. Si Robert CRAY et Lil’ Ed Williams placeront le titre dans leur besace avec bonheur, on reste attaché à la version du Loup. Ces deux titres écrits et enregistrées en 1957 sont loin d’être anodins, ils viennent témoigner qu’à partir de 1960, le Loup se consacrera à ses enregistrements et à ses concerts et laissera Willie Dixon s’occuper des arrangements mais aussi de l’écriture.
Willie DIXON, reparlons-en justement. L’arrangeur, contrebassiste, auteur de 9 titres apporte ici une contribution plus que royale avec 4 titres qui deviendront des classiques du Chicago Blues et 2 demi-standards du Blues. Pas mal pour un second disque !

En ouverture, « Shake For Me » est le prototype du boogie rythmé un brin machiste joué à la guitare, registre dans lequel John Lee HOOKER nageait comme un poisson dans l’eau. Pas étonnant qu’Eddie C. CAMPBELL, R.L. Burnside ou Bilbo Walker le glisseront dans leur répertoire alors que Stevie Ray VAUGHAN lui donnera une seconde vie lors du second Blues Revival. « You’ll Be Mine », un autre Boogie Blues vaut pat la dualité entre la guitare d’Hubert Sumlin et le piano d’Henry Gray. « Little Baby » s’inscrit pleinement dans l’ambiance que parvenait à diffuser le Loup, un Rockin’ Blues minimaliste, entêtant et efficace. S’il n’est pas rentré totalement dans la catégorie des grands classiques, « Down In The Bottom » n’en est cependant pas très éloigné. Comme le titre précédent, le tempo fruste devient vite obsédant et n’arrête pas de vous trotter dans la tête. Certains groupes sixties le feront tomber dans leur escarcelle (Q 65, The CRAWDDADYS, The Count Bishops, et plus tard George THOROGOOD). « Howlin’ For My Baby » aurait pu lui aussi rentrer dans la case des grands standards s’il n’avait pas été pompé sur le « Howlin’ For My Darling ». On peut même coller cette réplique comme une alternate.

Passons maintenant non pas au dessert mais au plat de résistance avec quatre titres qui deviendront des classiques. Le petit coq à crête rouge de la basse cour réputé pour son appétit sexuel fut dans le passé l’objet de chansons grivoises (Charley Patton, Memphis Minnie). Avec « The Red Rooster » Dixon refait l’histoire avec une sauce bien épicée, des textes moins vieillots et une slide superbement crasseuse. Si le titre deviendra un énorme succès pour les STONES, on lui préférera des reprises féminines (Etta JAMES, Carla THOMAS, Big Mama Thornton, Diunna Greenlaef ou Demetria Taylor) certaines de ces dames allant même jusqu’à imiter le coq, mais c’est avec des non-dits que le Loup se fait insidieusement plus salace. Initialement enregistré par Dixon quelques années avant, « Wang-Dang Doddle » nous assène derrière les oreilles un leitmotiv coup de bâton au rythme ensorceleur. On conseillera la reprise de Koko TAYLOR avec le même Willie Dixon à la contrebasse (la version de 66). Autre grand classique, « Spoonful », influencé par « A Spoonful Blues » de Charley Patton, nous plonge dans un climat ambigu à la limite du glauque que CREAM ne tardera pas à transformer en hit ; alors que Selah Sue massacrera le morceau dans une pub pour une marque de glace célèbre. Dernier gros carton avec « Backdoor Man », titre inquiétant et peu amical. L’homme de derrière la porte sera source d’inspiration pour les DOORS, dans une version largement modifiée. Les paroles peu réjouissantes sont renforcées par le phrasé de guitare de Freddy Robinson à mi chemin entre lymphatique et narcoleptique. Mais souvenez vous bien : « I am a back door man - Well the, men don't know, but the little girls understand - When everybody's tryin' to sleep -I'm somewhere making my, midnight creep -Yes in the morning, when the rooster crow … ». Avec un tel titre, vous souhaiter une bonne nuit serait incompréhensible.

Avec pas moins de cinq titres piochés les yeux bandés dans les singles du Loup et qui rentreront très vite dans l’inconscient collectif, ce disque éponyme rentre de plein fouet dans les albums dits de référence. S’il fallait choisir un disque du Loup Hurlant, le rockin’ chair remporterait tous les suffrages.

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   LE KINGBEE

 
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- Howlin' Wolf (chant, harmonica)
- Hubert Sumlin (guitare 1-2-3-6-7-8-9-11)
- Freddy Robinson (guitare 5-7-10)
- Jimmy Rogers (guitare 6-9)
- Otis 'smokey' Smothers (guitare 4-12)
- Abraham Smothers (guitare 11)
- Willie Dixon (contrebasse)
- Johnny Jones (piano 1-2-6-9)
- Otis Spann (piano 5-7-10)
- Hosea Lee Kennard (piano 4-11-12)
- Henry Gray (piano 3-8)
- Sam Lay (batterie 1-2-3-6-8-9)
- Fred Below (batterie 5-7-10)
- Earl Phillips (batterie 4-12)
- S.p. Leary (batterie)
- Adolf 'billy' Duncan (saxophone 4-12)
- Abb Locke (saxophone 11)


1. Shake For Me
2. The Red Rooster
3. You'll Be Mine
4. Who's Been Talkin'
5. Wang-dang Doodle
6. Little Baby
7. Spoonful
8. Going Down Slow
9. Down In The Bottom
10. Back Door Man
11. Howlin' For My Baby
12. Tell Me



             



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